Conscience inconscient temps et bonheur
Publié le 18/11/2022
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«
Chapitre 1 : Qui suis-je ?
La conscience, l’inconscient, le temps et le bonheur
L’homme se définit comme des sujets par opposition à l’objet.
Un objet, c’est ce qui est placé
devant moi, c’est-à-dire devant un sujet.
Le sujet, lui, n’est pas saisi de l’extérieur mais, au
contraire, il est le point de vue depuis lequel les objets sont saisis.
Le sujet, c’est cet être qui a
un « moi », qui est capable de dire « je », qui littéralement « se pense ».
Être un sujet, c’est
avoir une intériorité, c’est saisir ce qui se passe en nous et hors de nous, se mettre à
distance.
Les mots d’âme et de conscience sont liés à la notion de sujet.
Cette séparation entre des sujets et des objets n’est pourtant pas si simple car certains êtres,
les animaux, ne nous semblent pouvoir rentrer ni dans la catégorie des objets ni dans celle
de sujet.
C’est qu’il faut distinguer entre la conscience spontanée (la saisie des sensations
que l’on ressent) et la conscience réfléchie (la réflexion sur ces sensations).
Les animaux
n’auraient pas, comme les hommes, une capacité de saisir que c’est à « moi » que ces
sensations arrivent, que c’est un sujet qui ressent.
Ainsi le sujet, celui qui dit « je » est un être doté d’une subjectivité, d’une identité (centré
sur le sujet qui perçoit le monde, sur ses désirs, ses valeurs) parce qu’il est doté d’une
conscience réfléchie, d’une capacité à faire un retour sur lui-même, à se représenter ce qui
l’entoure et lui-même.
Mais quelle est cette spécificité de la conscience? Est-ce elle qui fait le sujet? Qu’en
est-il de cette permanence dans le temps qui fait qu’un être change et que pourtant
c’est le même sujet qui demeure? Qu’est-ce que ce « je » qui persiste ?
On parle de conscience psychologique, l’idée que nous pouvons nous représenter le
monde qui nous entoure, réaliser que quelque chose arrive et donc dire que, par cette
conscience, nous sommes présents au monde.
« Je n’ai pas pris conscience que ces mots pouvaient le blesser » ou « j’ai fait preuve
d’inconscience en traversant la rue sans regarder »
La conscience psychologique, c’est la faculté de penser qui permet aux hommes de
porter attention à ce qui est hors d’eux et en eux, c’est une présence au monde.
Mais on utilise aussi le terme de conscience autrement : « j’ai mauvaise conscience » ou
encore « science sans conscience n’est que ruine de l’âme » selon Rabelais.
On parlera dans
ce cas de conscience morale.
Ainsi la conscience morale est cette faculté de porter des
jugements de valeur sur des actes.
Moi capable d’agir à l’intérieur et à l’extérieur (conscience psychologique) et de discerner le
bien du mal (conscience morale).
I.
De la certitude d’être
La conscience est la capacité réflexive de l’esprit humain, se saisir de ce qui se passe en nous
et hors nous, ce qui permet à l’homme d’être un sujet.
o Critiques de la Raison pure, Kant
« Le je pense doit accompagner toutes les représentations » : Etre sujet, selon Kant, c’est
pouvoir dire « je »pour unifier toutes ses représentations.
A.
Le cogito de Descartes
Descartes inaugure un nouveau type de philosophie, la philosophie du sujet.
o Les Méditations métaphysiques, Descartes
Descartes veut arriver à une certitude : il a commencé par douter de tout ce qu’il croyait
savoir.
Il a atteint ainsi une certitude absolue, le cogito « je pense donc je suis » : il sait qu’il
existe dès qu’il pense car il ne saurait exister sans penser.
La pensée désigne toute activité
de conscience et le sujet n’est rien d’autre que l’être qui possède une conscience c’est-à-dire
une représentation de soi et du monde qui est absolument certaine.
Douter c’est en même temps savoir qu’on est : notion d’immédiateté.
« Je suis, j’existe est
nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce ou que je la conçois en mon esprit »
Dualisme : deux substances (réalité spirituelle) pensante et étendu.
Il ne se contente pas de
dire qu’il est mais aussi ce qu’il est.
Il ne se réduit pas à un corps, sa conscience lui révèle
qu’il ne peut être qu’une substance pensante.
B.
les critiques de cette conception de Descartes
1.
la critique du moi substance
o L’Entendement, Hume page 87
Pour le philosophe sceptique Hume, la conscience est incapable de saisir sa propre identité,
qu’elle reconstruit chaque jour différemment, elle est changeante.
Hume conteste cette
définition d’un moi substance, dont la qualité consisterait à durer dans le temps, qui aurait
une permanence et une unité clairement identifiable.
Il croit plutôt qu’on n’est qu’un
faisceau de sensations, et le « moi » n’est rien d’autre que ce qui est appelé ainsi par
commodité.
Il n’y a pas d’unité dans ces sensations, elles se succèdent sans qu’il y ait
quelque chose qui les unifie.
Il n’y a donc tout simplement pas de moi il n’y a que des
perceptions.
« L’esprit est une sorte de théâtre.
» : analogie entre la conscience et le théâtre
2.
L’analyse de Kant
o Anthropologie du point de vue pragmatique, Kant
Kant souligne que le sujet se constitue dans le langage.
L’homme c’est celui qui peut dire « je
», et même s’il ne le dit pas à proprement parler, car il l’a dans sa pensée, il est ainsi un être
singulier.
Cette capacité le distingue des autres êtres vivants, par là il est une personne,
c’est-à-dire un sujet distinct, par la dignité que cela lui confère, des choses et des animaux.
Cette capacité de dire « je » qui est présenté ici comme un pouvoir de synthèse n’est pas
quelque chose de spontané, c’est un acquis assez tardif de l’enfant.
Avant de se représenter
ainsi, l’enfant parle de lui à la troisième personne, et l’acquisition de ce « je », c’est-à-dire la
représentation de soi comme capacité que nous avons d’unifier le divers de nos
représentations, fait passer l’enfant du simple sentiment de soi à la pensée et à la
représentation de soi-même.
La subjectivité n’est pas donnée.
Elle se construit petit à
petit en lien avec l’évolution générale de l’enfant et ses capacités langagières.
Ce « je » que
je suis n’est pas non plus un moi substance.
3.
La critique de Nietzsche
o La Gai savoir, Nietzsche page 89
Selon Nietzsche, la conscience se développe par la mise en commun de nos idées
« moyennes », comme une maladie contagieuse qui vulgarise nos intuitions et nous
éloigne de nos meilleurs instincts.
Le « Je » n’est qu’une invention utilisée comme outil
grammaticale.
La conscience n’est que superficielle, qu’une faible partie de notre esprit.
C.
Conscience et intentionnalité
1.
Le projet de Husserl et ses conséquences
La phénoménologie est une méthode de pensée qui entend analyser non pas le monde
comme un objet réel mais ce qui apparaît à la conscience (des phénomènes).
Elle fait de la
philosophie l'analyse de l’expérience vécue, des contenus de conscience comme étant
eux-mêmes des phénomènes de la pensée qui se pense elle-même et pense le
monde.
Quand on réfléchit à ce que signifie « avoir conscience », on ne peut selon Husserl le
concevoir comme mettant face à face un objet psychique et de l’autre un fait physique : un
sujet face à des objets.
On ne peut utiliser l’expression « avoir conscience » que de façon
transitive (avec complément, sujet).
Il faut plutôt comprendre la conscience à partir de
l’intention.
« L’intentionnalité » explique l’auteur dans Idées directrices pour une
phénoménologie est cette propriété de la conscience qu’ont les vécus d’être conscient
de quelque chose.
La conscience apparaît comme un acte de mise en relation.
Il n’y a pas
d’objet pour une conscience sans conscience de l’objet.
Ils sont corrélatifs : « Toute
conscience est conscience de quelque chose ».
Il reproche à Descartes de n’avoir pas été assez loin dans le doute et d’avoir par conséquent
présenté à tort le sujet comme une substance pensante.
Il en a fait une chose, une réalité or
Husserl propose de considérer la conscience dans son rapport à ce qui apparaît, la
conscience est ce qui donne sens au monde, elle n’est pas un contenant, elle est
engagée dans le monde.
Il est faux de penser que le monde existerait de façon neutre et que ma conscience n’aurait
qu’à saisir ce qu’il est « en lui-même ».
La suspension du jugement qu’il pratique,
l’épochè lui permet de découvrir que le monde est une réalité pour moi, il est un objet pour
ma conscience : un phénomène.
Ce qui anime la conscience est un mouvement centrifuge,
elle est « visée », « en prise » sur le monde.
2.
Reprise par Sartre et la perspective nouvelle sur l’homme
o Conscience est intentionnalité, Situation I
Sartre propose ici une reformulation du cogito de Descartes « je suis, j’existe ».
Il revient à
la vérité premier du cogito : un acte qui ne suppose pas une substance.
« L’existence précède l’essence.
»
La conscience et le monde sont donnés d'un seul coup, la conscience est corrélative au
monde.
La conscience est un "éclatement" vers ce qui n'est pas elle.
Connaître c'est
"s'éclater vers" un au-delà de soi.
Elle n’a pas de dedans.
Le moi n’est pas une chose, c’est
de lui que les choses tiennent leur sens : ce qui ne signifie pas que les choses sont produites
par la conscience mais simplement qu’elle les éclaire, qu’elle leur donne sens.
o Le garçon de café, l’Etre et le néant
L'être de l'homme est porteur de néant.
La conscience cherche donc à se réaliser, au sens de
devenir réel.
Elle veut se donner une consistance pour abolir la dimension angoissante de la
liberté.
Par sa conduite stéréotypée, le garçon de café s'invente une essence d'objet pour
échapper au néant qu'il est.
Il joue pour éviter de se confronter à sa propre vacuité.
Comme notre ombre que nous trainons partout avec nous, l'homme traine avec lui sa
conscience, néant de lui-même et pourtant source de sa spécificité de sujet : la liberté.
Il n’y
a pas de déterminisme : tout individu est libre et responsable de ce qu’il fait.
On ne peut pas
dire qu’ « on n’a pas le choix », c’est de la mauvaise foi.
« On ne naît pas héros ou lâche, on
se fait héros ou lâche.
», « L’Homme n’est que ce qu’il se fait.
» Les obstacles ne doivent pas
être des excuses pour arrêter ses projets.
Mais cette liberté peut-être un fardeau, être à
l’origine de la peur de faire un choix : l’angoisse.
« C’est dans l’angoisse que l’homme prend
conscience de sa liberté.
»
D.
Conscience et liberté
o Idéologie allemande, Marx page 91
« Ce n’est pas la conscience qui détermine la vie, c’est la vie qui détermine la conscience.
»
Nos idées et représentations ne sont que le résultat des conditions matérielles, socioéconomique (vie).
Selon la thèse matérialiste de Marx, la conscience des individus est
déterminée par leurs conditions matérielles d’existence qui les empêchent d’imaginer
d’autres organisations sociales plus justes : on parle de déterminisme social.
D’abord, les
hommes s’organisent matériellement selon des rapports de construction, c’est la vie réelle,
puis, ils prennent conscience des représentations et des idées.
La conscience n’est donc pas
une réalité autonome, elle est dépendante aux conditions socio-économiques.
II.
Du Conscient à l’Inconscient
Page 160-163
La psychologie étudie le fonctionnement de l’esprit à l’état conscient.
La psychanalyse
étudie les rapports entre la conscience et l’inconscient de l’esprit.
La psychiatrie est une
spécialisation de la médecine qui étudie le fonctionnement du cerveau dans le cas de
maladies mentales.
Etre inconscient est un état dans lequel la conscience de l’individu est
inactive.
L’inconscient est une partie de l’esprit qui n’est pas accessible à la conscience.
L’inconscience désigne une absence de conscience morale où l’on ne parvient plus à
distinguer le bien du mal.
À la fin du XIXe siècle la psychanalyse a jeté le doute sur la transparence du sujet à luimême et sur son autonomie en faisant cette hypothèse controversée mais féconde de
l’existence d’un inconscient psychique.
Freud s’attaque en effet à l’identification même du
sujet et de la conscience.
Pour lui, psychisme et conscient ne sont pas équivalents comme
c’est le cas pour Descartes et il faut poser l’existence d’un inconscient qui peut se définir
comme l’ensemble des représentations refoulées.
Cet inconscient agit comme une force
dont les contenus cherchent à se manifester.
A.
Les petites perceptions, Leibniz
o Nouveaux essais sur l’entendement humain, Leibniz page 164
Pour le philosophe Leibniz, certaines de nos perceptions sont trop microscopiques pour
atteindre la conscience : les « aperceptions » sont donc constituées d’une multitude de
perceptions inconscientes qui par accumulation deviennent conscientes.
Il y a une
continuité entre ce qui est conscient et ce qui est inconscients.
L’idée de Freud est de
concevoir un Inconscient regroupant ces aperceptions.
B.
L’hypothèse freudienne de l’existence d’un Inconscient psychique
1.
Origine
o Cinq leçons sur la psychanalyse, Freud
Tout en montrant d'abord le rôle important de Breuer dans la découverte de la
psychanalyse, Sigmund Freud reprend le cas d'Anna O, patiente atteinte d'une hystérie de
conversion et traitée par Breuer : la réminiscence sous hypnose d'événements
traumatiques, débarrasse Anna O.
de ses symptômes.
Freud rapporte qu'il abandonna vite
cette technique de l'hypnose et que ce sont les recherches sur l'hystérie menées par Charcot
et Janet.
Il comprend alors comment un symptôme déguise un conflit psychique entre le
conscient et l'inconscient que provoquent des désirs inconciliables ; il découvre ce qu'il en
est de la résistance et du refoulement.
Puis Freud expose la base de la technique
psychanalytique : associations libres, interprétation des lapsus et surtout des rêves, « voie
royale de la connaissance de l'inconscient », rêves pour lesquels il explique les notions de
contenu latent caché derrière le contenu manifeste du rêve, les processus de condensation et
de déplacement.
Il évoque ensuite la question centrale de la sexualité infantile, du
complexe d'Œdipe et de l'origine sexuelle des névroses, en expliquant le phénomène du
transfert.
o L’Inconscient, Freud, page 166
Selon Freud, l’hypothèse de l’existence Inconscient est légitime.
En effet, elle
permettrait d’expliquer certains actes incompréhensibles de notre vie ordinaire et soigner
un grand nombre de pathologies mentales.
Il faut supposer l’existence de l’Inconscient
pour mieux comprendre et soigner certains états de névrose.
« L’hypothèse de l’Inconscient est nécessaire et légitime »
2.
La cure psychanalytique
A la fin du 19ème siècle Freud, médecin psychiatre viennois, met en place une nouvelle
thérapie psychologique: la cure « psychanalytique ».
Cette nouvelle méthode de soins
permet de soulager la détresse des êtres humains éprouvant des souffrances psychologiques.
Elle n’utilise pas les procédés habituels de la psychiatrie classique : le psychanalyste, à la
différence du psychiatre, ne délivre aucun médicament, il se met à l’écoute du patient et
engage avec lui une relation particulière, absolument privée, mettant au premier plan la
confidence parlée.
Freud utilise la méthode dite « des associations libres » : le patient doit
dire à l’analyste toutes les pensées qui lui viennent à l’esprit, sans tri, sans jugement, sans
discrimination.
Freud est convaincu que tous les faits psychiques sont liés les uns aux autres,
et peuvent donc s’expliquer les symptômes.
Il s’appuie sur le déterminisme psychique.
Deux autres procédés pour accéder à l’inconscient : l’interprétation des rêves, et celle
des erreurs et des lapsus.
« wo es war, soll ich werden »
C.
Les critiques de l’hypothèse freudienne d’un Inconscient psychique
1.
La critique épistémologique
o Pages 354 à 357 Conjectures et réfutations, Popper
Il faut avoir la possibilité de réfuter un énoncé scientifique pour que ce soit vraiment
de la science selon Popper.
Or, la psychanalyse freudienne, selon lui, était irréfutable, il
était a priori impossible de tester l'une de ses hypothèses.
C'est ainsi que l'interprétation des
rêves s'élaborait à partir d'une conception de l'Inconscient, qui était absolument
inaccessible à toute forme de test.
Donc pour Popper ce type de démarche n'était pas
testable, donc pas scientifique.
o Echec du cas d’Anna O, page 178
Le cas d’Anna O est un échec, elle a rechuté « un fiasco total et Breuer le savait
pertinemment.
»
2.
Sartre et la mauvaise foi
o L’Etre et le Néant, Sartre, p.
169Selon Sartre, la théorie freudienne de l’inconscient, en
cherchant les causes dans une partie de nous-mêmes qui est censée nous échapper, a
pour effet de nous déresponsabiliser face à nos désirs et actions.
Elle nous encourage à
être mauvaise foi en rejetant nos erreurs sur notre Inconscient.
3.
Alain
III.
L’expérience du temps
Nous sommes des êtres tributaires d’un ici et d’un maintenant, soumis au temps
qui passe mais aussi conscients de son....
»
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