Y a-t-il une vérité des apparences ?
Extrait du document
«
[Les choses se donnent dans leur apparence.
Ce que nous savons des choses, ce sont les sens qui nous le
livrent.]
Connaissance et expérience
La connaissance débute cependant avec l'expérience, même si elle s'élève à l'universel.
La connaissance est
en effet cette tentative de dépasser la singularité du fait, tel qu'il est donné dans l'apparence, pour accéder à
l'universel.
En ce sens, la connaissance a affaire aux apparences.
La vérité ne peut être une vérité qui néglige
les apparences, qui sont la seule matière sur laquelle la connaissance peut s'exercer.
Nul ne peut nier que l'on
ne peut concevoir la réalité autrement qu'en se fondant sur les données de ses sens.
Les objets de la connaissance ne nous sont en effet donnés que pour autant qu'ils nous apparaissent.
Nous
n'avons pas accès à une quelconque chose en soi mais seulement à des apparences avec lesquelles il nous
faut composer.
Nous ne savons en ce sens rien de ce que peut être la chose qui nous apparaît, mais
seulement qu'elle nous apparaît et comment elle nous apparaît.
L'empirisme affirme qu'il n'y a rien dans l'entendement qui n'ait été auparavant dans les sens, cad que
l'expérience est la source de toutes nos connaissances.
Toutes nos idées ne sont jamais, comme dit Hume,
que des « copies de nos impressions sensibles ».
Non seulement l'expérience est la source de nos idées mais
encore elle explique l'association de ces idées entre elles, cad le fonctionnement de notre esprit.
Qu'il s'agisse
d'association par ressemblance (deux idées s'appellent l'une l'autre quand leurs objets ont été donnés de
nombreuses fois soit l'un à côté de l'autre, soit l'un après l'autre).
C'est toujours dans des expériences
antérieures et répétées que se trouve la raison de ces associations.
Le phénomène comme matière de la connaissance.
La distinction kantienne entre le phénomène et le noumène permet de penser l'apparence dans sa positivité :
soumise aux formes a priori de la sensibilité (l'espace et le temps), les apparences ne nous apparaissent pas
n'importe comment mais ordonnées par notre entendement et notre sensibilité.
L'application des catégories de
l'entendement au phénomène permet de faire de celui-ci un objet de science, et le seul objet possible de
science.
La chose en soi est, par définition, inconnaissable.
En effet, que savons-nous des choses en ellesmêmes, cad en dehors de notre perception ? Rien.
Derrière les apparences, il n'y a rien
Nietzsche a toujours ni violemment critiqué la métaphysique et les
penseurs qui ont cru qu'il fallait chercher la vérité au-delà des
apparences, dans un "arrière-monde".
Cette dévaluation du sensible
est, pour lui, la marque de la décadence dont le platonisme et la religion
judéo-chrétienne sont les grands représentants.
En fait, la religion chrétienne porte à son comble un mouvement déjà
présent chez Socrate : l'idée que la vie doit être justifiée, jugée,
évaluée par une idée.
Tout « idéalisme » est un symptôme de manque
de force.
Or, c'est face à ces symptômes qu'il faut comprendre le projet de
Nietzsche..
Il n'agit pas que d'une critique des « arrières-mondes » et
de la religion.
Il s'agit aussi de « transmuer les valeurs », d'effacer le
mouvement chrétien qui fait de toute valeur une non valeur, de
favoriser les forces actives, la puissance, l'expansion de la vie.
En ce
sens le « surhomme » n‘est pas la caricature qu'on en a fait, mais ce
qui doit dépasser l'homme moderne, fatigué et décadent, créer d'autres
valeurs, non pas « négatrices » de la vie ou dévalorisantes, mais
servant l'acceptation de l'existence.
C'est l'artiste qui symbolise le
mieux cette défense des apparences.
En fait, l'art est un mensonge.
Il
est pourtant une illusion nécessaire car on ne peut vivre avec la vérité.
Puisque nous avons besoin d'illusion, il est nécessaire de falsifier le réel.
L'art est un mensonge qui se donne comme tel.
L'artiste ne prétend pas
dire la vérité, au contraire, car il place l'apparence plus haut que la réalité : l'apparence signifie, pour l'artiste,
la réalité affirmée dans sa totalité..
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