Y a-t-il une méthode en métaphysique ?
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«
S'il y a une suspicion de la métaphysique parmi les esprits positivistes, du fait qu'elle ne se contente pas de
l'expérience scientifique et de l'étude des phénomènes, il y en a une bien plus sévère encore du fait qu'elle n'a pas
de méthode universelle.
Pour ces deux raisons, la métaphysique n'est pas une science.
En effet, il y a autant de
méthodes que de métaphysiciens.
Une philosophie générale implique une conception du réel, une méthode de
découverte, et souvent une méthode d'exposition, tout au moins une manière de poser les problèmes.
L'expérience métaphysique, l'intuition de son idée, implique pour le philosophe l'intuition de sa méthode.
Prenons-en des exemples :
— La philosophie cartésienne est née de cette épreuve déterminante de l'inconsistance de tout ce qu'on croit vrai
et de l'intuition métaphysique du « cogito ».
Du même coup la « méthode » cartésienne est née : elle consistera
dans « le doute méthodique », c'est-à-dire la mise en question méthodique de tout ce que nous savons, croyons ou
éprouvons, en vue de découvrir « ce qui résiste au doute », c'est-à-dire la première évidence (l'indubitâble) à partir
de laquelle on pourra penser réellement.
— La philosophie de Hegel (1770-1832) est l'intuition métaphysique selon
laquelle il faut chercher à travers l'Histoire, la réalisation de l'Esprit, réalisation
que Fichte, par exemple, voyait comme l'acquisition individuelle du savoir
universel.
De là, une dynamisation, une sorte d'insufflation de la logique dans
l'Histoire.
Mais cette idée implique sa méthode : le refus de chercher à définir l'esprit
d'une manière ponctuelle ou statique, et au contraire la transposition de
cette étude dans l'Histoire qui nous montre l'esprit en devenir.
La réalité se
construit ; et cette construction simultanée et corrélative du réel et de
l'esprit donne un sens à l'Histoire.
Au lieu de « faire de la Logique », si l'on
veut définir l'esprit en acte, il faut « faire de l'Histoire ».
La méthode est donc
bien impliquée dans l'intuition philosophique.
— La philosophie bergsonienne est animée, on l'a vu, par l'intuition
métaphysique d'une « vie » de l'univers, .rythmée par un mouvement singulier
de tension créatrice et de détente matérialisante.
La méthode pour arriver à
cette conception ne peut être que l'intuition, c'est-à-dire la « sympathie »
par laquelle nous cessons de voir le monde comme un ensemble d'objets, pour
pénétrer dans le secret de son élan vital.
Torsion de l'impulsion naturelle qui
nous porte à agir sur la matière, la méthode bergsonienne sera
l'approfondissement et l'élargissement de l'introspection, pour atteindre en
nous le « moi profond », et, à travers lui, l'élan vital.
On pourrait de même dégager la méthode de Kant qui consiste, pour faire apparaître l'activité de la raison, à
chercher « les condition de possibilité » de la science et de la morale, etc.
Toujours méthode et intuition métaphysiques sont liées tout simplement, parce que la méthode est la logique de
l'intuition métaphysique.
En philosophie, contrairement à ce qui se passe en science, la méthode n'est pas première
; éclairée par son but, elle est en quelque sorte téléologique.
Celui qui étudierait méthodiquement les problèmes métaphysiques en pensant avoir ainsi une « méthode
métaphysique », prendrait sa méthode de travail pour une philosophie et si, un jour, une intuition métaphysique
jaillissait, il s'apercevrait que son travail antérieur était tâtonnement, que les problèmes se posent d'une autre façon
et qu'il faut donc les aborder par une autre méthode..
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