Y a t-il une logique de la découverte scientifique ?
Extrait du document
«
Analyse.
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Le sujet qui nous est présenté ici nous pose une question en relation directe avec un auteur : Karl Popper.
En effet, ce philosophe est à l'origine de l'ouvrage intitulé logique de la découverte scientifique.
Aussi, nous devrons interroger tant l'ouvrage que son auteur pour déterminer, selon lui, comment se présente une telle logique.
De plus, nous pourrons aussi nous pencher sur ses détracteurs, qui peuvent
éventuellement lui opposer une autre réflexion.
Mais, avant de commencer, et pour mieux comprendre en quoi nous sommes en droit de nous poser cette question, nous devrions définir le terme de science.
o La science se définit comme étant une connaissance exacte et approfondie.
Les sciences sont généralement ce que l'on sait pour l'avoir appris.
Une connaissance scientifique se veut universelle et vérifiable,
exprimée par des lois.
Nous le voyons, la science se pose comme étant ferme et définitive.
Fondée sur une loi, elle est à prendre comme la connaissance la plus sure que l'on puisse avoir.
Or, nous allons le voir, l'ouvrage intitulé logique de la découverte scientifique de Popper, remet en cause, en permanence les découvertes scientifiques.
Pour autant, leur remis en question ne leur ôte pas le statut de
science, pour la durée durant laquelle elles sont validées par l'expérience.
Nous comprenons la difficulté posée par Popper : mettre en évidence le fait que l'expérience puisse, à terme, remettre en cause une découverte scientifique, alors qu'il s'agit normalement d'une chose ferme et assurée.
Mais l'ouvrage dont nous parlons ici est au centre d'une des grandes polémiques autour de l'épistémologie du XXème siècle.
Car Popper à eu à débattre, directement ou non de ses principes avec d'autre sauteurs, tels
Carnap, Kuhn, Feyerabend.
La question posée ici méritera donc que l'on comprenne d'une part la signification pour Popper d'une logique de la découverte scientifique et, d'autre part, les oppositions qu'une telle logique a pu rencontrer.
Problématisation.
La logique de la découverte scientifique est le titre d'un ouvrage de Karl Popper, philosophe américain du siècle dernier.
Cet ouvrage met en avant le processus de la découverte dans le domaine des sciences.
Mais il fut aussi à
l'origine d'un vif débat.
Aussi, allons-nous nous demander ce qu'est la logique de la découverte scientifique ? En ce sens, nous rechercherons en quoi il est utile d'en avoir une ? Ensuite, nous chercherons à la définir.
Enfin, nous
interrogerons les détracteurs de cette idée.
Proposition de plan.
1.
Pourquoi faut-il une logique scientifique ?
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Pour Karl Popper, la logique de la découverte scientifique correspond à une tentative de trouver l'équilibre que doit apporter toute science.
En effet, pour l'auteur, la science rencontre des problèmes.
Un problème est une attente déçue par des faits contraires.
Et la science est source de problèmes, puisque les théories peuvent à tout instant
rencontrer un fait qui les contredise.
« Certaines théories, qui se prêtent véritablement à être testées, continuent, après qu'elles se sont révélées fausses, d'être soutenues par leurs partisans - ceux-ci leur adjoignent une quelconque hypothèse auxiliaire,
à caractère ad hoc, ou bien en donnent une nouvelle interprétation ad hoc permettant de soustraire la théorie à la réfutation.
Une telle démarche demeure toujours possible, mais cette opération de sauvetage a pour
contrepartie de ruiner ou, dans le meilleur des cas, d'oblitérer partiellement la scientificité de la théorie (...).
On pourrait considérer ces considérations ainsi : le critère de la scientificité d'une théorie réside dans la
possibilité de l'invalider, de la réfuter ou encore de la tester.
» Popper
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Pour Popper, il ne s'agit pas de tenter de sauver absolument une théorie qui a pu être invalidée par l'expérience, au contraire.
L'invalidité due à l'expérience prouve que la théorie était scientifique.
Pour notre auteur, seules les théories qui sont falsifiables peuvent prétendre à ce titre.
Dans la méthode scientifique, les étapes sont problèmes, théories, critiques.
Les scientifiques cherchent à résoudre des problèmes en posant des théories.
Une logique de la découverte scientifique consistera
alors en une succession d'étapes mettant en évidence la possibilité d'une théorie à être invalidée.
Pour mieux le comprendre, prenons un exemple.
Au XVII° siècle, un maître puisatier de Florence constate qu'il est impossible de faire monter l'eau du puits au moyen d'une pompe aspirante à une hauteur supérieure à
10,33 m au-dessus de la surface de l'eau.
Galilée, instruit par Torricelli de cette observation, pose l'hypothèse que cette hauteur d'eau est inversement proportionnelle à la densité de ce liquide qu'est l'eau.
Torricelli
se propose de vérifier cette hypothèse par l'expérience suivante : on retournera dans un cristallisoir un long tube contenant du mercure (qui a la particularité d'être beaucoup plus dense que l'eau) et on mesurera à
quelle hauteur se stabilise ce liquide.
Par un calcul simple, à partir de l'hypothèse de Galilée et connaissant la densité respective de l'eau et du mercure, on peut prévoir que le mercure se stabilisera à une hauteur
d'environ 76 cm.
Aux yeux de Popper, nous sommes bien ici dans le domaine de la science car il y a bien falsifiabilité de l'hypothèse.
En effet, si la hauteur de mercure constatée est très différente de celle qu'on
attend, on est assuré que l'hypothèse de Galilée est fausse.
Si, en revanche, la hauteur de mercure est bien de 76 cm (ce qui fut le cas) alors l'hypothèse est probablement vraie.
Les théories scientifiques ont un
caractère hypothétique.
On peut infirmer une thèse mais jamais la confirmer totalement.
« Nous ne savons pas, nous pouvons seulement conjecturer ».
L'attitude scientifique est donc une attitude critique qui ne
cherche pas des vérifications mais tout au contraire des tests qui peuvent réfuter la théorie mais non l'établir définitivement.
L'histoire des sciences physiques est celle de leur révolution permanente.
Les théories n'ont qu'une valeur provisoire.
Des faits « polémiques » surgissent qui les contredisent, qui obligent à des révisions.
Tout succès
scientifique ouvre plus de questions qu'il n'en clôt.
Faut-il pour autant sombrer dans le scepticisme et affirmer qu'il n'y a rien qui vaille vraiment ? Comment distinguer, dès lors, la véritable science de la
métaphysique ou des pseudo-sciences comme l'alchimie ou l'astrologie ? Et que penser des sciences humaines ? La psychanalyse, la théorie de l'histoire de Marx peuvent-elles prétendre légitimement à la
scientificité ? Popper, dans « Logique de la découverte scientifique » propose un critère de démarcation, capable d'établir, de manière concluante, la nature ou le statut scientifique d'une théorie.
Il écrit :
«C'est la falsifiabilité et non la vérifiabilité d'un système qu'il faut prendre comme critère de démarcation.
En d'autres termes, je n'exigerai pas d'un système scientifique qu'il puisse être choisi, une fois pour toutes,
dans une acception positive mais j'exigerai que sa forme logique soit telle qu'il puisse être distingué, au moyen de tests empiriques, dans une acception négative : un système faisant partie de la science empirique
doit pouvoir être réfuté par l'expérience.
»
A l'époque de Popper, on affirmait généralement que ce qui distinguait la science des autres disciplines, c'était le caractère empirique de sa méthode.
Autrement dit, en multipliant les observations et les expériences, le
savant en tirait, en vertu du fameux principe d'induction, des lois qu'il considérait comme nécessaires et universellement valides.
Partant de là, les néopositivistes soutenaient que tout ce qui n'est pas vérifiable est
« métaphysique » et doit être éliminé de la science.
Or, comme le souligne Popper, l'induction, qui consiste à inférer une règle universelle à partir d'une multitude de cas particuliers et donc des théories à partir d'énoncés
singuliers vérifiés par l'expérience, est une démarche logiquement inadmissible : « Peu importe le grand nombre de cygnes blancs que nous puissions avoir observé, il ne justifie pas la conclusion que tous les cygnes sont blancs.
»
Aussi Popper affirme-t-il qu'aucune théorie n'est jamais vérifiable empiriquement et il distingue trois exigences auxquelles devra satisfaire ce qu'il appelle un « système empirique » ou scientifique : « Il devra, tout
d'abord, être synthétique, de manière à pouvoir représenter un monde possible, non contradictoire.
En deuxième lieu, il devra satisfaire au critère de démarcation, c'est-à-dire qu'il ne devra pas être métaphysique mais devra
représenter un monde de l'expérience possible.
En troisième lieu, il devra constituer un système qui se distingue de quelque autre manière des autres systèmes du même type dans la mesure où il est le seul à représenter notre
monde de l'expérience.
»
La troisième exigence est la plus décisive.
Comment, en effet, reconnaître le système qui représente notre monde de l'expérience ? La réponde de Popper est la suivante : par le fait qu'il a été soumis à des tests et qu'il y a
résisté.
Cela signifie qu'il faut appliquer une méthode déductive.
En d'autres termes, si nous ne pouvons exiger des théories scientifiques qu'elles soient vérifiables, nous pouvons exiger d'elles qu'elles soient mises à l'épreuve.
Il
s'agit pour cela de déduire de la théorie examinée des énoncés singuliers ou « prédictions » susceptibles d'être facilement testés dans l'expérimentation.
Une théorie qui ne résiste pas aux tests sera dite « falsifiée » ou
« réfutée » par l'expérience.
Si elle passe l'épreuve des tests, elle sera considérée comme provisoirement valide jusqu'à ce qu'elle échoue à des tests ultérieurs ou qu'une théorie plus avantageuse apparaisse.
Ainsi alors que, jusqu'ici, une théorie était considérée comme vraie parce qu'elle était confirmée par de nombreuses observations et expérimentations, c'est aux yeux de Popper la « falsifiabilité » ou la possibilité d'être
falsifié par l'expérience, qui permettra de faire le tri entre les énoncés scientifiques et ceux qui ne le sont pas : « Un système faisant partie de la science empirique doit pouvoir être réfuté par l'expérience.
»
Ainsi l'énoncé « Il pleuvra ou il ne pleuvra pas ici demain », étant infalsifiable, sera considéré comme non empirique, puisqu'aucune expérience ne peut l'invalider et comme non scientifique.
Autrement dit, l'irréfutabilité
n'est pas vertu mais défaut.
Et c'est au nom de ce critère de falsifiabilité que Popper peut exclure de la science des théories comme le marxisme et la psychanalyse, théories qui sont totalisantes, qui couvrent la totalité des
phénomènes qui se produisent dans leur domaine d'attribution, qu'aucun fait ne pourra jamais contredire.
Prenons l'exemple de la psychanalyse.
N'est-ce pas une théorie qui échappe à toute épreuve qui pourrait la réfuter ? Le refus de la réalité de l'inconscient ou encore de la sexualité infantile n'est-il pas, au fond, pour le
psychanalyste, une manifestation même de résistance ? Quelle que soit la critique qu'on adresse à la psychanalyse, ne peut-elle pas être interprétée par le médecin en termes de résistance ? C'est précisément parce qu'elle
n'exclut aucun fait de son domaine, même ceux qui pourraient la contredire, que Popper relègue la psychanalyse au rang de fausse science, aux côtés de la cartomancie ou encore de l'astrologie.
Il est donc possible de décider de la vérité ou de la fausseté d'une théorie ou d'un énoncé, et ce de manière concluante.
Dire qu' « un système faisant partie de la science empirique doit pouvoir être réfuté par l'expérience »,
cela signifie bien que, paradoxalement, « c'est la falsifiabilité et non la vérifiabilité d'un système qu'il faut prendre comme critère de démarcation ».
Est vrai ce qui peut être falsifié.
On accordera à Popper que dans le domaine des sciences physiques ou plus généralement des sciences de la nature, démontrer une théorie, c'est tenter de la falsifier, autrement dit, élaborer les conditions de la
découverte des faits capables de l'infirmer.
L'histoire de ces sciences nous montre qu'aucune théorie, même parfaitement établie dans la communauté scientifique, n'est jamais définitive.
Les progrès se font par erreurs, par
conjectures et réfutations.
On ne peut jamais souscrire à une théorie que provisoirement, c'est-à-dire tant qu'elle survit aux tests destinés à l'invalider.
On constate aussi qu'une nouvelle théorie n'annule pas toujours
complètement l'ancienne.
Elle peut, tout en la contredisant, la contenir comme bonne approximation, lorsqu'un paramètre tend vers une valeur limite.
Par exemple, la théorie de l'attraction universelle de Newton est englobée
dans la théorie de la relativité généralisée de Einstein.
On peut même conjecturer que, sans être vraies, les théories nouvelles sont plus proches du vrai que celles qu'elles ont dépassées.
Autrement dit, les rapports polémiques
entre les constructions théoriques et les faits nouveaux sont à la source d'une plus grande rationalisation du réel et de progrès de la raison elle-même.
Toutefois ce n'est pas parce que certaines théories ne répondent pas à ce critère de falsifiabilité qu'il faut nécessairement les ravaler au rang de pseudo-sciences.
Il y a là une affirmation d'autant plus dogmatique que savoir
ce qu'est une science n'est pas décidable scientifiquement.
Il y a là aussi ce préjugé tenace que les sciences physiques sont le modèle de toute science, préjugés qui a freiné l'évolution des sciences humaines.
Voyons la critique de
la psychanalyse : elle est certes séduisante, mais elle oublie le statut particulier de cette théorie qui vise à formuler des « vérités » sur un objet qui est l'inconscient, objet qui ne fait pas sens dans le sens du discours que la
conscience tient sur elle-même.
La théorie freudienne est liée à la découverte, par Freud, de son propre inconscient et de certaines dimensions qui se retrouvent dans l'inconscient de tout homme.
Comme le souligne Laplanche,
« la psychanalyse personnelle est la voie royale pour accéder à quelque part de la vérité psychanalytique.
»
2.
Quelle est la logique de la découverte scientifique ?
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Popper veut mettre en place un moyen de valider, pour un temps, une théorie scientifique.
Ce moyen est une méthode de découverte qui permet à la foi le fondement de la théorie et son éventuel invalidation au cours d'une étape.
La logique de la découverte scientifique doit se suivre ainsi :
« Nous pouvons si nous le voulons distinguer quatre étapes différentes au cours desquelles pourrait être réalisée la mise à l'épreuve d'une théorie.
Il y a, tout d'abord, la comparaison logique des conclusions entre elles
par laquelle on éprouve la cohérence interne du système.
En deuxième lieu s'effectue la recherche de la forme logique de la théorie, qui a pour objet de déterminer si elle constituerait un progrès scientifique au cas où elle
survivrait à nos divers tests.
Enfin, la théorie est mise à l'épreuve en procédant à des applications empiriques des conclusions qui peuvent en être tirées.
[...] Tant qu'une théorie résiste à des tests systématiques et
rigoureux et qu'une autre ne la remplace pas avantageusement dans le cours de la progression scientifique, nous pouvons dire que cette théorie a « fait ses preuves » ou qu'elle est « corroborée ».
» Popper.
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3.
Popper voit dans ce que nous venons de lire le moyen le plus sûr et efficace de démontrer la validité scientifique d'une théorie.
En suivant les quatre étapes du processus de découverte, le scientifique s'assure d'une autorité d'expérience sur sa théorie.
Mais dans el même temps, il admet que sa théorie puisse un jour ou l'autre être remise
en question, voir invalidée.
La logique de al découverte scientifique consiste donc dans une falsifiabilité des théories scientifique qui à la fois les poses comme valides et en propose le possible remplacement, à terme.
Les oppositions à la logique de la découverte scientifique.
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Cette logique de découverte est donc proposée par Popper, dans l'ouvrage du même nom.
Mais Popper eu à débattre de son idée avec certains de ses collègues.
Ainsi, Rudolph Carnap opposera à Popper que les énoncés scientifiques doivent être simples pour être vrais.
Alors que Popper voit dans un énoncé scientifique la possibilité de falsifier une théorie, Carnap pose au
contraire qu'un tel énoncé n'a pas de sens.
Aussi ne peut-il être considéré comme scientifique.
Au titre des débats, nous pouvons aussi parler de Kuhn, auteur des paradigmes et révolutions scientifiques.
Selon lui, la science est universellement valable comme principe, durant un temps ayant pour début et
fin une révolution.
Durant ce temps, la remise en cause des énoncés scientifiques est impossible.
LA NOTION DE PARADIGME SELON KUHN
L'histoire des sciences, pour Kuhn, n'est pas constituée par un progrès continu et cumulatif, mais par des sauts, par des crises qui voient des paradigmes se substituer soudainement à d'autres.
Un paradigme, c'est un modèle
dominant, faits de principes théoriques, de pratiques communes, d'exemples fondateurs qui soudent une communauté de chercheurs, qui orientent leur recherche et sélectionnent les problèmes intéressants à leurs yeux.
Un
paradigme n'est jamais totalement explicite.
C'est pourquoi, selon Kuhn, le questionnement scientifique n'est jamais neutre.
Dans la postface à son livre La Structure des révolutions scientifiques (1 962), Kuhn cherche à classer les différentes significations du concept de paradigme :.
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