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Y a-t-il une force du droit ?

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« Définition des termes du sujet: FORCE / FORT: a) Principe de puissance ou d'action.

b) Par opposition au droit: recours à la contrainte pour faire respect un pouvoir illégitime.

c) Droit du plus fort: conception qui fait reposer l'autorité du chef sur sa supériorité physique.

d) Fort: qui possède la force au sens fort ou au figuré.

Opposé à faible. DROIT: a° Un droit: liberté d'accomplir une action (droit de vote); possibilité d'y prétendre ou de l'exiger (droit au travail, droit de grève). b° Le droit: ce qui est légitime ou légal, ce qui devrait être, opposé au fait, ce qui est. c° Ce qui est permis par des règles non écrites (droit naturel) ou par des règles dûment codifiées (droit positif). Le droit positif est l'ensemble des règles qui régissent les rapports entre les hommes dans une société donnée.

Le droit naturel est l'ensemble des prérogatives que tout homme est en droit de revendiquer, du fait même de son appartenance à l'espèce humaine (droit au respect). Le droit fait le partage entre ce qu'il est autorisé de faire et ce qui ne l'est pas.

Tout en interdisant, le droit pose une liberté.

Avoir le droit de commercer signifie que l'on a la liberté de le faire.

Ainsi le droit garantit le domaine de tout ce qu'il détermine. Il importe dès lors que le droit soit respecté et suivi.

Toute la question est alors de savoir, ce qui, dans le droit, fonde son pouvoir d'obligation.

Il est indéniable que le droit recourt à la force lorsqu'il est violé ou transgressé.

Mais cette force constitue-t-elle la force du droit? N'est-elle pas plutôt une force dont se sert le droit, mais qui lui est adjointe de l'extérieur? Il convient donc de démêler ce qui tient à la force (d'obligation) qui découle de la nature même du droit, d'avec la force (matérielle) qui sanctionne le droit. Si le droit n'a de valeur que par la force qui le fait s'exercer, le droit n'a pas de force à lui.

C'est la force qui fonde le droit.

Si nous accordons au contraire qu'il y a une force du droit, il nous faut savoir ce qui peut fonder le droit en dehors de la force. D'où vient donc le pouvoir d'obliger propre au droit, et qui n'est pas celui de la force? 1.

Le droit de la force 1.

On peut d'abord estimer que n'existe que le seul droit de la nature, lequel coïncide avec le droit du plus fort.

C'est l'idée que tente de faire prévaloir le personnage de Calliclès dans le Gorgias de Platon.

Calliclès pose d'emblée la différence entre un droit qui se réclame des lois instituées par convention entre les hommes, et un droit selon la nature.

La justice selon la loi souffre, d'après lui, de deux critiques. Puisque les lois émanent de la volonté des hommes, chaque cité aura ses propres lois, ce qui conduit au relativisme du droit.

Au nom de quoi un droit serait-il meilleur qu'un autre, s'il n'existe aucune norme universelle du droit? Calliclès critique en second lieu la loi, en l'interprétant comme étant l'effet du ressentiment des faibles contre les forts. Voici ce qu'il dit : «La loi, au contraire, est faite par les faibles et par le grand nombre, c'est donc par rapport à eux-mêmes et en vue de leur intérêt personnel qu'ils font la loi» (483 b). Le droit selon la nature a l'avantage, lui, d'être universel, car c'est en tout lieu et en tout temps que le plus fort l'emporte sur le plus faible.

L'universalité de cette norme n'est pas contestable.

En outre, il est inadmissible que le plus faible triomphe de celui que la nature a choisi pour être le plus fort. La force fait droit, et c'est à ce titre que Platon fait dire à Calliclès : «De quel droit Xerxès vint-il porter la guerre dans la Grèce, ou son père chez les Scythes?...

Mais tous ces gens-là agissent, à mon avis, selon la vraie nature du droit» (483 e).

La force, selon Calliclès, détermine le droit, ce qui implique que j'ai le droit de faire tout ce qu'autorise ma force.

Ce qui est, l'actualité de ma puissance, justifie ce qui doit être, c'est-à-dire tout ce qui est obtenu par ma seule force. Dans cette optique, la force du droit serait la force même. 2.

Mais on peut douter que la force fonde un quelconque droit.

La force, comme l'écrit Rousseau dans le Contrat social (livre I, chap.

3), «est une puissance physique» et y céder «est un acte de nécessité non de volonté».

On ne choisit pas de se soumettre à une force supérieure à la nôtre.

On la subit par un effet de contrainte.

Dès lors que le droit s'impose par la force, il n'est plus le droit.

Si l'on exige quelque chose par force, il est redondant de faire appel au droit. Le droit exclut la force, car il interdit précisément le règne du plus fort.

Il repose sur un consentement libre.

La force contraint, en instaurant un rapport de force, là où le droit oblige.

On doit se soumettre au droit par volonté, car il est le droit. Bref, la force ne pose aucune valeur.

Elle épouse le contour des faits.

La force définit ce qui est.

Le droit a trait à ce qui doit être, c'est-à-dire au juste.

Or le devoir-être ne saurait se déduire de l'être.

De ce que ma force me permet de dérober la bourse d'un plus faible que moi, je ne puis en conclure que c'est là un droit.

La force n'a donc aucun droit. Le droit devient un masque derrière lequel se réfugie la force, qui ne peut jamais apparaître nue.

La faiblesse de la force, c'est qu'elle ne vit que de son moment présent, et qu'il existe toujours une autre force supérieure susceptible de la remplacer.

Le plus fort n'est fort que de sa force actuelle.

Et le droit qu'elle prétend incarner n'est en réalité. »

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