Y a-t-il des normes naturelles ?
Extrait du document
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Le problème des « normes » s'inscrit dans celui, plus vaste, concernant les rapports existant entre la nature et la
culture.
Avons-nous une « nature » universelle, un « état brut », ou bien sommes-nous normalisés culturellement?
Et quelle est la valeur de ces normes si elles ne sont que sociales? Cette question demeure depuis longtemps sans
réponse, malgré toutes les recherches dont elle a fait l'objet.
Énigme scientifique, sociologique, philosophique, une
question fondamentale pour la compréhension de l'homme.
Sans prétendre à une étude exhaustive du problème,
nous allons procéder à une confrontation et à une synthèse de diverses opinions et courants de pensée, et dégager
si possible une « conclusion », qui ne pourra d'ailleurs être que subjective.
Avant toute investigation, il convient de s'arrêter à la notion de « norme ».
Qu'est-ce qu'une norme? Les normes
sont omniprésentes, et interviennent à chaque instant dans l'existence.
Elles peuvent concerner des matériaux
concrets, ou encore entrer en rapport avec des concepts moraux, sociaux, philosophiques.
Dans tous ces domaines,
il s'agit de mesures, de limites définies plus ou moins arbitrairement (par la nature ou par la culture?).
Ce cadre est
tracé pour une majorité, dans lequel elle doit s'inscrire.
Nous verrons ultérieurement quels autres facteurs entrent
également dans l'institution d'une norme.
La nature humaine fait donc l'objet de recherches passionnées, et principalement depuis le XVIIle siècle, siècle des
Lumières.
La tendance générale est alors à une croyance en une nature chez l'homme, existant sous les multiples «
revêtements culturels » accumulés depuis des siècles de vie sociale.
Les thèses s'affrontent hardiment, telles celles
de Rousseau et Hobbes, le premier louant le « bon sauvage », et condamnant le progrès comme dégradant et
néfaste pour l'homme, le second affirmant la présence d'une nature fondamentalement égoïste, voire sanguinaire.
Quel que soit leur contenu, toutes ces thèses ne peuvent qu'offrir un caractère arbitraire, en relation d'ailleurs avec
les conceptions politiques personnelles des auteurs.
Ce n'est en fait qu'avec Lucien Malson que les problèmes se posent de façon plus sérieuse et approfondie.
L'analyse
des Enfants sauvages a permis d'arriver à des conclusions très intéressantes et nouvelles.
Par l'étude donc de
divers cas d'enfants dits « sauvages », trouvés dans la nature, et n'ayant eu aucun contact avec un milieu social
quelconque (ou si bref qu'il n'a pu être utile et notable), Maison développe une thèse s'inscrivant dans la lignée
culturaliste : il n'existe aucun « inné » dans l'être humain, aucun caractère universel qui ferait du nouveau-né un
humain à part entière, quelles que soient les conditions extérieures.
Bref, aucune « nature » définie, à l'instar de
l'espèce animale.
Seul le contact social, culturel, peut être le révélateur du potentiel humain, la réalisation d'une
somme de possibilités, à l'état de « nuée ».
Cette fusion avec le milieu culturel est indispensable pour faire d'un
individu un être ayant les caractéristiques d'un humain.
Ce potentiel n'est lui-même défini ni limité, il s'agit d'un
éternel «jaillissement » (Maison).
Toutes les études culturalistes tendent donc à prouver l'absence d'une nature : l'homme n'est rien sans la culture.
Autre courant, relativement neuf, rejoignant sur ce point Malson et les culturalistes : l'existentialisme, philosophie de
l'absurde, concevant l'existence comme un hasard dénué de toute raison profonde et de sens.
Il n'existe pas de
valeurs humaines absolues et précédant l'existence en tant que concept fixe.
L'homme doit (et c'est là le but de son
existence) trouver seul ses « repères », et les considérer comme seuls valables.
« Ma subjectivité, c'est ma vérité »
(Sartre).
L'individu est seul en face de lui-même, sans Dieu transcendant pour le guider.
Enfin, pour ne mentionner
que les courants les plus importants, Freud et la psychanalyse ont fait effectuer à la psychologie un pas
gigantesque en même temps qu'ils réduisaient à néant des préjugés et tabous
séculaires.
Le XIXe siècle a été scandalisé d'entendre dire par Freud et ses
contemporains que le normal » n'existe pas, que les « perversions » sont en
fait purement culturelles et non innées.
La psychanalyse a prouvé l'influence
déterminante et fondamentale du champ social sur le psychisme de l'individu.
Aucun homme n'est semblable à un autre, parce que tous ont subi des
conditions extérieures différentes.
D'une façon générale, la pensée
contemporaine s'oriente vers le culturalisme, et vers une négation de toute
valeur absolue, en même temps qu'elle s'intéresse davantage à l'individu
même..
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