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Y a-t-il de meilleurs maîtres que l'ennui ?

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« L'ennui se définit comme une absence d'excitation de la volonté, une inaction souvent due à une absence de motifs ou de but.

Se demander si l'ennui est le meilleur maître, c'est s'interroger sur les leçons que nous donne l'ennui, sur ce qu'il nous apprend.

Or en premier lieu, l'ennui ne semble rien pouvoir nous apporter puisqu'il est vide de toute activité, de tout but.

Mais cette vacuité même ne peut-elle pas nous rendre à une liberté jusqu'à là inconnue ? Ne peut-elle pas permettre à l'homme de se trouver ? L'ennui comme inaction est un piteux maître L'ennui est souvent considéré comme un « rhume de l'âme », un état où rien n'a d'éclat et ne nous ravit, bref une disposition intérieure qui ne trouve courage ni motivation à aucune activité.

Ainsi Jean de La Bruyère rapprochait ennui et paresse : « l'ennui est entré dans ce monde par la paresse » (Caractères) - L'ennui peut ainsi apparaître comme un privilège dont bénéficieraient les nantis, ceux qui n'ont pas besoin de travailler pour gagner leur vie.

Pour Schopenhauer, l'ennui est réservé effectivement à la classe bourgeoise alors que la souffrance est dévolue aux prolétaires. - De plus, l'ennui pousse à des actions insensées et mauvaises.

Pour Pascal, c'est parce que l'ennui menace l'homme que l'homme se diriger vers le divertissement et l'ennui est la cause de « querelles, de passions, d'entreprises hardies et souvent mauvaises, etc.

» L'ennui comme voyage intérieur Pourtant l'ennui aurait aussi à voir avec la relation de soi à soi-même.

Schopenhauer affirmait par suite que les hommes aux qualités intellectuelles très développées ne pouvaient souffrir de l'ennui, leurs pensées leur suffisant amplement. De même, Érasme affirmait que « celui qui connaît l'art de vivre avec soi-même ne connaît pas l'ennui.

L'ennui naîtrait donc par l'incapacité qu'ont les individus à rester seul et à vivre en harmonie avec leur être.

C'est pour cela que les personnes soumises à l'ennui cherchent toujours un nouvel objet d'occupation, le jeu de cartes étant pour Schopenhauer le sommet de la bêtise humaine, cherchant à se créer des motifs artificiels pour la volonté, incapable d'en trouver à l'intérieur d'eux-mêmes. - L'ennui stimulerait la réflexion et entraînerait la clairvoyance quant à la réalité de la nature humaine.

Ainsi, pour Pascal, l'homme soumis à l'ennui en viendrait à remarquer et à comprendre « la condition faible et mortelle, et misérable » de l'homme. Dès lors, l'ennui pourrait nous apprendre à nous connaître, à développer les potentialités intérieures et encore inexploitées. L'ennui est hautement insupportable à l'homme, parce qu'alors, l'absence de tout désir fait place à la considération de soi-même et à la conscience de sa vanité.

Dès lors, on comprend que tout homme cherche à se divertir, c'est-àdire à se détourner de la pensée affligeante de sa misère.

Nos désirs, pour autant qu'ils nous portent à croire que leur réalisation nous rendrait heureux, sont l'instrument majeur de cette stratégie.

L'imagination, qui institue des biens comme désirables, en est l'auxiliaire indispensable.

La vérité du désir n'est donc pas dans son objet mais dans l'agitation qu'il excite : « nous ne recherchons jamais les choses mais la recherche des choses » (773).

Mais le divertissement n'est qu'un cache-misère.

Préférable à l'accablement de l'ennui, il s'avère sur le fond tout aussi nuisible.

Faire obstacle à la considération de sa misère, c'est se priver des moyens de la dépasser. L'ennui comme nouvelle liberté L'écrivain Milan Kundera affirme dans L'identité que : « la quantité d'ennui, si l'ennui est mesurable, est aujourd'hui beaucoup plus élevée qu'autrefois.

» C'est dans ce sens que le philosophe Lars Svendsen, auteur d'un livre intitulé Petite philosophie de l'ennui, tend à faire de l'ennui un phénomène social actuel. Pour lui, l'ennui est une situation de limite existentielle dans laquelle le sujet se pose la question du sens de son existence et de ses actions.

L'ennui serait un symptôme de disparition des structures traditionnelles de pensée qui donnaient du sens, une crise dans le système de référence social et traditionnel. L'ennui serait alors une nouvelle liberté où l'individu tente de trouver du sens à ces pratiques, de réfléchir à son système de pensée et plus généralement à ses habitudes qui, dans l'état d'ennui et d'absence d'excitation, ont perdu leur attrait, leur sens. L'ennui est alors le meilleur des maîtres pour nous permettre de nous arrêter dans cette vie, où nous courons après le temps et de réfléchir à nos valeurs. L'ennui semble dans un premier temps ne rien pouvoir nous apprendre, caractérisé par une certaine paresse et par un désintérêt pour toute activité.

Pourtant l'ennui est en rapport avec la relation de soi à soi-même.

Celui qui s'ennuie cherche à trouver une activité pour se fuir.

L'ennui est un moment qui nous permet de nous retrouver face à nous-mêmes et à partir à l'exploration et la connaissance de nous.

De plus, l'ennui fait montre d'une crise des valeurs, dans laquelle nos actions habituelles et nos modes de pensée perdent leur sens et il s'agit bien dans l'ennui de s'interroger et de créer une nouvelle ligne de vie, de pensée et d'action.

L'ennui est donc sûrement le meilleur maître pour nous apprendre à nous retrouver et à ne pas agir n'importe comment si on sait bien sûr l'accueillir et le vivre pleinement.. »

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