Vous commenterez librement, à la lumière de votre expérience personnelle et de vos connaissances, cette réflexion d'un ancien : «Les ennemis ont leur utilité. Ils vous montrent vos défauts ; ils vous disent des vérités. Ce sont des maîtres que l'on ne pa
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Introduction. Il est difficile de se connaître soi-même. Mais cette connaissance est peut-être encore plus difficile du point de vue moral que du point de vue psychologique. Nous avons en effet, souvent sans nous en rendre compte, des complaisances envers nous-même ; nous sommes partiaux en notre faveur. C'est pourquoi il peut nous être utile d'éprouver cette bonne opinion que nous avons de nous, à l'aide des critiques qui nous sont adressées par nos ennemis. I. L'éveil de la conscience morale. A. — Plus encore que la conscience psychologique, la conscience morale a besoin d'être éveillée. Les psychologues ont énoncé une loi, qu'on peut appeler la loi de l'obstacle, d'après laquelle la conscience ne s'éveille qu'en présence d'un obstacle, d'une difficulté. Les moralistes eux aussi ont montré que la conscience morale ne commence à se poser des problèmes qu'à l'occasion d'un conflit, qu'elle a besoin d'être inquiétée pour juger de façon plus avertie.
«
Vous commenterez librement, à la lumière de votre expérience personnelle et de vos connaissances,
cette réflexion d'un ancien : «Les ennemis ont leur utilité.
Ils vous montrent vos défauts ; ils vous disent
des vérités.
Ce sont des maîtres que l'on ne paie pas ».
Introduction.
Il est difficile de se connaître soi-même.
Mais cette connaissance est peut-être encore plus difficile
du point de vue moral que du point de vue psychologique.
Nous avons en effet, souvent sans nous en rendre
compte, des complaisances envers nous-même ; nous sommes partiaux en notre faveur.
C'est pourquoi il peut nous
être utile d'éprouver cette bonne opinion que nous avons de nous, à l'aide des critiques qui nous sont adressées par
nos ennemis.
I.
L'éveil de la conscience morale.
A.
— Plus encore que la conscience psychologique, la conscience morale a besoin d'être éveillée.
Les psychologues
ont énoncé une loi, qu'on peut appeler la loi de l'obstacle, d'après laquelle la conscience ne s'éveille qu'en présence
d'un obstacle, d'une difficulté.
Les moralistes eux aussi ont montré que la conscience morale ne commence à se
poser des problèmes qu'à l'occasion d'un conflit, qu'elle a besoin d'être inquiétée pour juger de façon plus avertie.
B.
— Or les critiques, que nous recevons de l'extérieur, constituent précisément cet obstacle, ce conflit
indispensable à l'éveil de la conscience.
Elles brisent cet écran que forme la représentation idéalisée que nous nous
faisons de nous-même, pour y substituer l'image, moins complaisante, que les autres se font de nous.
Un psychosociologue américain a dit que le passage de la conscience spontanée et instinctive à la véritable conscience de soi
s'effectue par le processus du « soi en miroir » : l'individu se représente comment il apparaît à une autre personne ;
il imagine le jugement que celle-ci porte sur lui-même, et il éprouve alors, selon le cas, un sentiment de fierté ou un
sentiment de honte.
Ainsi, « nous avons honte de sembler user de faux-fuyants en présence d'un homme loyal, de
paraître lâche en présence d'un homme courageux, ou grossier aux yeux d'un homme distingué » (Ch.
Cooley).
A
plus forte raison en est-il ainsi quand nous nous voyons dans ce miroir grossissant que sont les critiques d'un
ennemi.
Nous pouvons ainsi mieux prendre conscience de nos défauts et nous rendre compte de nos erreurs et de
nos fautes.
II.
Ennemis et amis.
A.
— Une réserve nous semble cependant s'imposer ici.
Est-il nécessaire que ces critiques, qui nous ouvrent les
yeux sur nous-même, émanent de nos ennemis ? Certes, ceux-ci, mieux que quiconque, sont sensibles à nos
défaillances.
Mais leurs critiques risquent d'être sans aménité et même sans bonne foi ; elles sont parfois fielleuses
et inspirées par tout autre chose que le désir de nous être utiles.
Si nous sommes partiaux envers nous-même, nos
ennemis le sont souvent en sens inverse, contre nous.
— Il est à craindre alors que ces critiques, loin de nous
éclairer, nous aveuglent encore davantage, parce que nous en sentons l'injustice ou l'exagération, et qu'ainsi elles
nous endurcissent dans nos défauts au lieu de nous en corriger.
B.
— Beaucoup plus profitables pour nous peuvent être les critiques de nos amis.
Le véritable ami n'est pas celui qui
nous flatte ou qui nous loue sans cesse.
C'est au contraire celui qui sait, le cas échéant attirer notre attention sur
nos défauts et nos faiblesses morales.
Mais il sait le faire discrètement, affectueusement, sans blesser notre orgueil,
et avec le sincère désir de nous rendre service.
Bien mieux que notre ennemi, il nous dira la vérité.
Et nous-même,
nous la recevrons beaucoup plus facilement que si elle venait, plus ou moins déformée, de quelqu'un qui nous est
hostile : car l'amitié vraie réalise une fusion des consciences telle qu'elle nous dispose à accepter d'un ami ce que
nous n'acceptons pas d'un autre.
Conclusion.
Les critiques de nos ennemis peuvent nous être utiles pour éveiller notre conscience et nous révéler
nos défauts.
Mais celles de nos amis nous sont encore plus profitables..
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