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Vaut-il mieux subir ou commettre l'injustice ?

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« Ce sujet renvoie à une affirmation de Socrate que l'on trouve dans plusieurs textes de Platon (par exemple dans l'Apologie de Socrate).

Celui-ci répète qu'il vaut mieux subir l'injustice que de la commettre, qu'il est préférable du point de vue du devoir moral ou même de notre bonheur d'être victime que bourreau.

Qu'est-ce qui est préférable, entre subir l'injustice (être victime d'une injustice) et commettre l'injustice (être l'auteur/acteur d'une injustice, être bourreau) ? Comment instituer un système de valeurs ? En fonction d'un but, d'une finalité (il est préférable de commettre l'injustice si l'on estime que la fin la plus haute est la vertu, la morale) ? Si, tel Calliclès dans le Gorgias de Platon, on place au-dessus de toute la vie biologique la survie et la domination sur les autres, alors il semble qu'une injustice est préférable (Socrate démontre que cette préférence est non seulement indéfendable moralement, mais en plus illogique, absurde).

Il s'agit donc bien de questionner le sens de cette préférence.

Si la justice n'est que le strict respect des lois (proposition que Socrate combat puisqu'il distingue dans l'Apologie la justice comme institution, relative et discutable, de la justice comme vertu, comme idéal qui doit nous guider dans l'action), alors subir une injustice de manière passive est à proscrire : c'est respecter des lois que l'on sait injustes (lois tyranniques, lois racistes, etc.).

En ce sens, il vaut peut-être mieux se battre que subir etc.

se révolter, même si cela implique de transgresser la loi, autrement dit de commettre une injustice.

Mais il convient de penser la justice aussi comme un idéal que l'on se donne, une idée régulatrice en quelque sorte.

Par rapport à cet idéal qui définit la vie bonne et le bonheur au sens moral, est-il préférable de ne pas commettre l'injustice ? Introduction : L'injustice est le plus simplement possible un défaut de justice, c'est-à-dire une entorse à un horizon d'attente normatif.

L'injustice se comprend à l'aune d'une conception de la justice.

Elle est communément comprise comme l'absence de justice, c'est-à-dire la manifestation d'une déception relativement à des attentes normatives. Or le sujet dans toute sa radicalité nous pose une question impliquant un choix ; une choix quasi existentiel à savoir entre subir une injustice et la commettre quel est le moindre mal ? Autrement dit, si l'on choisissait de répondre à la question par l'adage populaire qui veut qu'entre deux maux il faut choisir le moindre alors il semble qu'une solution à ce dilemme relevant à la fois de la morale et de la politique, du droit et de la morale pourrait trouver une solution. Mais est-ce aussi simple ? En effet, subir une injustice semble la pire des chose : l'expression d'un déni de justice flagrant, d'un manque de sens relevant proprement de l'immérité.

Subir une injustice serait alors pure que de la commettre, surtout que le verbe « subir » insiste bien sur l'involontaire de l'action, sur la position passive de l'agent se faisant déposséder de quelque chose ou réduisant sa puissance d'action.

Commettre l'injustice serait donc volontaire et bénéfique à celui qui la ferait.

Et dans ce cas, on pourrait comprendre l'émergence du droit pour pallier justement ces injustice.

Mais ne faut-il pas prendre en compte le poids de la conscience et du remords dans cette « balance du pire » ? Dès lors la solution ne devient pas évidente. Or si nous envisagerons ces deux points de vues au cours de nos deux premiers moments de réflexion (parties 1&2), il sera peut-être nécessaire de s'interroger sur la possibilité même et le implications d'effectuer un possible choix si l'on peut parler encore ce choix dans un troisième moment (3 ème partie).

En effet, entre Charybde et Scylla y a-t-il un choix possible ou alors cette question ne relève-t-elle pas plus d'une vision que l'on peut avoir de la société et des attentes que l'on peut en avoir, c'est-à-dire d'une réflexion politique plutôt que proprement philosophique.

Radicalement, peut-on répondre à cette question de manière a priori ou alors doit-on entrer dans une casuistique sans fin ? Et dans ce cas, même si nous donnions pas réponse définitive, ne serait-ce pas encore ici faire preuve de sagesse tant pratique que théorique et dès lors bien produire une réponse proprement philosophique (entendue comme sagesse et prudence pratiques et théoriques) ? C'est bien à ce type de problème que nous confronte radicalement ce sujet et c'est en ce sens que nous entendons l'examiner suivant en en cherchant son sens, sa valeur et son fondement. I – L'innocence, non-sens : pâtir de l'injustice a) En prenant l'exemple des Confessions de Rousseau avec le cas du peigne, il semble bien que l'on puisse dire que subir une injustice est pire que de la commettre.

En effet, si la petite servante ressent cette injustice d'être accusée à tort, alors que le jeune Rousseau ne dément pas qu'elle soit à l'origine du forfait, comme un mal absolu c'est bien que l'injustice est une profonde déception.

Ici face aux personnes mais aussi en l'absence de ce que l'on pourrait appeler une justice cosmologique, c'est-à-dire que l'injustice est ressentie comme un non-sens.

Mais surtout, ce qui fait tout le mal de l'injustice et le fait qu'il est bien pire de la subir que de la commettre c'est bien que celui qui la subit est dans un rôle passif : il ne l'a pas choisi tandis que celui qui commet cette injustice le fait bien souvent de manière volontaire.

Et l'exemple même de Rousseau en témoigne, dans une autre situation : « Je n'avais pas encore assez de raison pour sentir combien les apparences me condamnaient, et pour me mettre à la place des autres.

Je me tenais à la mienne, et tout ce que je sentais, c'était la rigueur d'un châtiment effroyable pour un crime que je n'avais pas commis.

La douleur du corps, quoique vive, m'était peu sensible ; je ne sentais que l'indignation, la rage, le désespoir.

[…] mais le souvenir profond de la première injustice que j'ai soufferte y fut trop longtemps et trop fortement lié pour ne l'avoir pas beaucoup renforcé.

Là fut le terme de la sérénité de ma vie enfantine.

Dès ce moment je cessai de jouir d'un bonheur pur, et je sens aujourd'hui même que le souvenir des charmes de mon enfance s'arrête là.

» b) Or justement, l'existence de l'injustice n'est-ce pas aussi ce qui nécessite l'existence du droit comme le note Beccaria dans Des délits et des peines ? En effet, par exemple, le vol est bien le cas d'une injustice puisque c'est bien le fruit d'un travail ou au moins d'une possession que l'on a acquise légitimement dont on nous dépossède.

Or on ne blâme pas celui qui pâtit de l'injustice, celui qui la subit, on le plaint tandis que celui qui commet l'injustice doit. »

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