Valeur des passions
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
VALEUR: Du latin valor, « mérite », « qualités ».
(1) Propriété de ce qui est jugé désirable ou utile (exemple : la valeur de l'expérience).
(2) En morale, norme ou idéal
orientant nos choix et nos actions (exemple : le bien, la justice, l'égalité).
(3) En économie politique, on distingue la
valeur d'usage d'un objet, qui est relative au degré d'utilité que chacun lui attribue, et sa valeur d'échange (son
prix), qui résulte du rapport de l'offre et de la demande.
PASSION:
* Ce que l'âme subit, ce qu'elle reçoit passivement.
Chez Descartes, le mot désigne tout état affectif, tout ce que
le corps fait subir à l'âme.
Son origine n'est pas rationnelle ni volontaire.
* Inclination irrésistible et exclusive qui finit par dominer la volonté et la raison du sujet (la passion amoureuse).
HISTOIRE: Ce mot désigne soit le devenir, l'évolution des individus et des sociétés (allemand Geschichte), soit
l'étude scientifique de ce devenir (allemand Historie).
A.
Les grandes passions font les grandes actions
L'état de passion a souvent été exalté, par les romantiques notamment.
La passion rompt avec la monotonie de la
vie quotidienne, donne du prix à l'existence, inspire de vastes projets.
« Rien de grand ne s'est accompli dans le
monde sans passion », affirme Hegel dans l'Introduction à ses Leçons sur la philosophie de l'histoire (1837).
En effet,
les individus, en poursuivant leurs passions particulières, réalisent à leur insu les grands desseins de la Raison
universelle qui gouverne le monde.
Autrement dit, la Raison fait avancer l'histoire en se servant des passions et des
intérêts individuels.
C'est ce que Hegel appelle la « ruse de la Raison ».
Descartes lui-même reconnaît que les hommes que les passions « peuvent le plus émouvoir sont capables de goûter
le plus de douceur en cette vie ».
Car, pour lui, les passions ne sont en elles-mêmes ni bonnes ni mauvaises.
Elles
sont ce qu'en fait notre volonté : dangereuses pour les âmes faibles qui se laisseront dominer par elles ; utiles aux
âmes fortes et généreuses qui sauront les « dresser ».
"Rien de grand ne s'est accompli dans le monde sans
passion..." HEGEL
La passion a souvent été méprisée comme une chose qui est plus
ou moins mauvaise.
Le romantisme allemand et, en particulier,
Hegel restituent à la passion toute sa grandeur.
Dans une
Introduction fameuse (« La Raison dans l'histoire ») à ses « Leçons
sur la philosophie de l'histoire » - publiées après sa mort à partir de
manuscrits de l'auteur et de notes prises par ses auditeurs -, on
peut lire (trad.
Kostas Papaioannou, coll.
10118):
« Rien ne s'est fait sans être soutenu par l'intérêt de ceux qui y
ont participé.
Cet intérêt nous l'appelons passion lorsque, écartant
tous les autres intérêts ou buts, l'individualité tout entière se
projette sur un objectif avec toutes les fibres intérieures de son
vouloir et concentre dans ce but ses forces et tous ses besoins.
En ce sens, nous devons dire que rien de grand ne s'est accompli
dans le monde sans passion.
»
L'histoire est en apparence chaos et désordre.
Tout semble voué à
la disparition, rien ne demeure : « Qui a contemplé les ruines de
Carthage, de Palmyre, Persépolis, Rome, sans réfléchir sur la
caducité des empires et des hommes, sans porter le deuil de cette vie passée puissante et riche ? Ce
n'est pas comme devant la tombe des êtres qui nous furent chers, un deuil qui s'attarde aux pertes
personnelles et à la caducité des fins particulières: c'est le deuil désintéressé d'une vie humaine brillante
et civilisée.
»
L'histoire apparaît comme cette « vallée des ossements » où nous voyons les réalisations «les plus
grandes et les plus élevées rabougries et détruites par les passions humaines », «l'autel sur lequel ont été
sacrifiés le bonheur des peuples, la sagesse des Etats et la vertu des individus ».
Elle nous montre les
hommes livrés à la frénésie des passions, poursuivant de manière opiniâtre des petits buts égoïstes,
davantage mus par leurs intérêts personnels que par l'esprit du bien.
S'il y a de quoi être triste devant un
tel spectacle, faut-il, pour autant, se résigner, y voir l'oeuvre du destin ? Non, car derrière l'apparence
bariolée des événements se dévoile au philosophe une finalité rationnelle : l'histoire ne va pas au hasard,
elle est la marche graduelle par laquelle l'Esprit parvient à sa vérité.
La Raison divine, l'Absolu doit s'aliéner
dans le monde que font et défont les passions, pour s'accomplir.
Telle est: « la tragédie que l'absolu joue
éternellement avec lui-même: il s'engendre éternellement dans l'objectivité, se livre sous cette figure qui
est la sienne propre, à la passion et à la mort, et s'élève de ses cendres à la majesté».
Ainsi, l'histoire du devenir des hommes coïncide avec l'histoire du devenir de Dieu.
Etats, peuples, héros
ou grands hommes, formes politiques et organisations économiques, arts et religions, passions et intérêts,
figurent la réalité de l'Esprit et constituent la vie même de l'absolu ..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Triompher des passions en les opposant
- Spinoza: passions, lois et politique.
- Jean-Jacques Rousseau: La raison peut-elle vaincre les passions ?
- Hegel: Les passions font-elles la grandeur de l'homme ?
- Hume: Les passions