Une théorie scientifique doit-elle se prémunir contre toute critique ?
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«
Introduction
- Théories de l'évolution en biologie (Darwin, 1809-1882), encore fortement contestées par les religieux: les
biologistes doivent continuellement défendre leurs découvertes.
– « Une théorie scientifique doit-elle se prémunir contre toute critique? »
– Nécessité des preuves expérimentales et de la démonstration; mais danger de vouloir répondre par avance à toute
critique; d'où faire des distinctions entre les critiques destructrices, qui visent à remettre en cause les principes
mêmes de la science, et les critiques constructives qui lui permettent d'avancer.
– Différence entre anticiper raisonnablement les objections possibles (et assumer par là la possibilité de l'erreur) et
vouloir à tout prix défendre une théorie comme une place forte imprenable, une citadelle.
I.
Une théorie scientifique solide doit pouvoir répondre aux objections
1.
Importance de la preuve
– Une théorie est une construction intellectuelle qui a besoin de s'appuyer sur des arguments rationnellement
fondés: ce n'est pas une construction fantaisiste ni métaphysique (ce qu'on nomme parfois une « vision du monde
»).
– Il importe donc qu'elle soit cohérente et logique, d'une part, et qu'elle s'appuie sur des expérimentations et des
raisonnements mathématiques.
– "Une théorie physique est un système de propositions mathématiques, déduite d'un petit nombre de principes, qui
ont pour but de représenter aussi simplement, aussi complètement que possible, un ensemble de lois
expérimentales." Duhem, La Théorie physique, 1906
Dans la physique contemporaine, l'expérimentation elle-même est de plus en plus théorique, à tel point que Duhem
parle de "lois expérimentales".
Les mathématiques en sont l'instrument essentiel, du fait même de la complexité de
l'objet physique, les particules élémentaires.
Ce caractère de plus en plus abstrait de la physique contemporaine
conduit à se poser la question de la nature de ses connaissances.
Dans quelle mesure l'application d'un système
pour comprendre la nature ne nous voile-t-il pas le réel ? Cette réflexion des scientifiques eux-mêmes conduit à
reposer sous un nouveau jour le problème métaphysique de la nature de l'Être.
2.
Nécessité de répondre aux objections internes
– Dans le cadre même des activités scientifiques, une théorie s'appuie sur des expériences et une démarche
hypothético-déductive qui doivent rester ouvertes à la possibilité d'être contredites par des expérimentations et
découvertes ultérieures, sinon il ne s'agit plus de science.
– Référence : K.
Popper et le principe de « falsifiabilité » ou « réfutabilité », énoncé notamment dans La Logique de
la découverte scientifique.
L'histoire des sciences physiques est celle de leur révolution permanente.
Les théories n'ont qu'une valeur
provisoire.
Des faits « polémiques » surgissent qui les contredisent, qui obligent à des révisions.
Tout succès
scientifique ouvre plus de questions qu'il n'en clôt.
Faut-il pour autant sombrer dans le scepticisme et affirmer qu'il
n'y a rien qui vaille vraiment ? Comment distinguer, dès lors, la véritable science de la métaphysique ou des pseudosciences comme l'alchimie ou l'astrologie ? Et que penser des sciences humaines ? La psychanalyse, la théorie de
l'histoire de Marx peuvent-elles prétendre légitimement à la scientificité ? Popper, dans « Logique de la
découverte scientifique » propose un critère de démarcation, capable d'établir, de manière concluante, la nature
ou le statut scientifique d'une théorie.
Il écrit : «C'est la falsifiabilité et non la vérifiabilité d'un système qu'il faut
prendre comme critère de démarcation.
En d'autres termes, je n'exigerai pas d'un système scientifique qu'il puisse
être choisi, une fois pour toutes, dans une acception positive mais j'exigerai que sa forme logique soit telle qu'il
puisse être distingué, au moyen de tests empiriques, dans une acception négative : un système faisant partie de la
science empirique doit pouvoir être réfuté par l'expérience.
»
A l'époque de Popper, on affirmait généralement que ce qui distinguait la science des autres disciplines,
c'était le caractère empirique de sa méthode.
Autrement dit, en multipliant les observations et les expériences, le
savant en tirait, en vertu du fameux principe d'induction, des lois qu'il considérait comme nécessaires et
universellement valides.
Partant de là, les néopositivistes soutenaient que tout ce qui n'est pas vérifiable est
« métaphysique » et doit être éliminé de la science.
Or, comme le souligne Popper, l'induction, qui consiste à inférer
une règle universelle à partir d'une multitude de cas particuliers et donc des théories à partir d'énoncés singuliers
vérifiés par l'expérience, est une démarche logiquement inadmissible : « Peu importe le grand nombre de cygnes
blancs que nous puissions avoir observé, il ne justifie pas la conclusion que tous les cygnes sont blancs.
»
Aussi Popper affirme-t-il qu'aucune théorie n'est jamais vérifiable empiriquement et il distingue trois
exigences auxquelles devra satisfaire ce qu'il appelle un « système empirique » ou scientifique : « Il devra, tout
d'abord, être synthétique, de manière à pouvoir représenter un monde possible, non contradictoire.
En deuxième
lieu, il devra satisfaire au critère de démarcation, c'est-à-dire qu'il ne devra pas être métaphysique mais devra
représenter un monde de l'expérience possible.
En troisième lieu, il devra constituer un système qui se distingue de
quelque autre manière des autres systèmes du même type dans la mesure où il est le seul à représenter notre
monde de l'expérience.
».
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