Une théorie n'est-elle qu'une manière logique d'ordonner des idées ? ?
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POUR DÉMARRER
Un énoncé universel synthétique, un système intégrant un très grand nombre de faits ne désignent-ils qu'un énoncé formel, allant du simple au complexe,
organisant des notions abstraites ? Un sujet qui vous interroge sur le rapport de la formalisation logico-mathématique et des données.
CONSEILS PRATIQUES
Distinguez bien la théorie physique (qui ordonne les champs phénoménaux) et la théorie logico-mathématique, beaucoup plus formalisée.
On ne saurait
répondre de manière univoque à la question posée.
II n'y a pas une théorie, mais des théories, physique, logico-mathématique, philosophique, etc.
Dans
l'ensemble, la voie de la formalisation intégrale est souvent réduite.
BIBLIOGRAPHIE
BA C HELARD, Le rationalisme appliqué, Quadrige-PUF.
R.
BLA NC HE, L'axiomatique, PUF.
Introduction.
-La notion de "théorie" a une double signification qui pourrait apparaître, de prime abord, contradictoire : elle désigne, dans son acception scientifique, un
ensemble de propositions logiquement liées les unes aux autres, et destinées à rendre compte d'un aspect du réel ; mais dans son acception
éthymologique, elle renvoie à une activité particulière de l'âme, la contemplation (theoria).
-Une théorie peut ainsi avoir une signification tant dialogique ou dianoétique (un raisonnement se déroulant dans le temps), que purement intuitive (une
connaissance directe).
-O r, ces deux sens s'opposent complètement, dans le rôle que l'on entend donner aux "idées" ou propositions logiquement articulées entre elles : soit elles
expriment précisément cette théorie, soit elles constituent comme les conséquences logiques de la théorie, alors conçue comme contemplation.
-C omment donc concevoir l'articulation de la théorie et des idées ? Une théorie fait-elle corps à celles-ci, ou bien les précède-t-elle logiquement ?
C omment concevoir le lien entre la théorie et la logique ?
I.
Conception scientifique de la théorie, comme ensemble de propositions articulées les unes par rapport aux autres.
Une théorie, c'est un ensemble de propositions qui, dérivant de propositions fondamentales, visent à rendre compte d'un aspect déterminé du réel.
Une
théorie a donc un aspect nécessairement systématique, en ce qu'il y a un enchaînement tant logique qu'organique des propositions entre elles : elles
s'engendrent mutuellement.
Une théorie peut ainsi prendre soit la forme d'un théorême mathématique (par exemple le théorême de Thalès, pour pouvoir
rendre compte de certaines propriétés d'une figure géométrique donnée), soit, par exemple, d'un doctrine philosophique (par exemple la doctrine de Fichte,
qui entend restituer de façon généalogico-dialectique tous les concepts purs de la philosophie critique dans leur légitimité fondamentale.
Une théorie
ordonne ainsi des propositions, qui s'enchaînent logiquement pour pouvoir rendre compte de la nécessaire connexion d'un "état de fait" donné.
II.
Conception grecque de la théorie, comme contemplation des propositions premières (Platon / Aristote).
La théorie, c'est avant tout la theoria, la contemplation, c'est-à-dire la saisie intuitive des premiers principes et des premières causes, qui sont l'objet
propre de la Métaphysique, selon A ristote.
T oute théorie scientifique doit donc s'édifier à partir de propositions premières ou "axiomes", qui ne peuvent être
saisis par le raisonnement, mais par l'intuition.
T oute théorie suppose donc une axiomatique, et la théorie fondamentale est une axiomatique.
Par ailleurs,
c'est moins la théorie qui constitue une manière logique d'ordonner des idées, que l es I dé es elles-mêmes qui, dans une perspective platonicienne,
constituent l'objet propre de la theoria.
La théorie, c'est ce qui dépasse et fonde à la fois toute théorie possible : car les concepts ou "idées" de la science
s'élaborent rationnellement, c'est-à-dire discursivement au sein de raisonnements, à partir de la saisie intuitive des Idées logiques fondamentales.
La
théorie métaphysique, en ce sens, fonde la théorie scientifique, en ce que les propositions premières (axiomes) ou les concepts absolus (Idées) sont
présupposés dans tout ordonnancement scientifique des idées.
III.
Une théorie recoupe l'intuition des essences et leur organisation logique (Husserl).
C hez Husserl, le projet phénoménologique prend naissance dans les Recherches logiques, dont le dessein est de préparer
un programme fondamental à réaliser, et dont l'objet est le fondement ultime des sciences.
Une théorie, chez Husserl,
consiste en un enchaînement logique de propositions, étant entendu que ces propositions elles-mêmes sont composées
de concepts saisis intuitivement.
La tâche de la "logique pure" doit être 1/ d'élucider l'essence des concepts utilisés par
les sciences (tâche de la phénoménologie) 2/ de rendre compte des schémas logiques qui constituent les enchaînements
de propositions au sein des théories (tâche de la grammaire pure et de la théorie des multiplicités).
Une théorie, c'est
donc ce par quoi une science particulière va tâcher de rendre compte d'un état de fait donné ; et la tâche de la "logique
pure", véritable épistémologie métaphysique fondamentale, sera de pouvoir rendre compte des structures logiques et
phénoménologiques qui sont présupposées dans cette théorie scientifique même.
Une théorie est donc une manière
logique d'ordonner des "idées", et cette logique doit être l'objet de la métaphysique ; mais cette logique ne constitue que
le second temps du processus de la théorisation, au s e n s où cette dernière s'établit d'abord sur un donné vécu,
phénoménologique.
Conclusion.
-Une théorie doit d'abord être envisagée sous son aspect scientifique : elle n'est alors qu'une manière logique d'ordonner
des idées, au sein du projet scientifique global de rendre compte d'états de fait donnés.
-O r, la théorie se fonde sur des intuitions particulières, qui requièrent une activité spirituelle distincte de l'activité
discursive ou dianoétique : c'est précisément la theoria, la contemplation, qui excède et fonde toute théorisation objective
possible.
-Il faut donc une science pour pouvoir rendre compte de cela même qui doit rendre compte de l'état de fait : il faut une
théorie (au sens de la contemplation, mais qui s'organise sur le monde d'un enchaînement de propositions logiquement déterminé) pour pouvoir rendre
compte de toute théorie donnée possible (au sens de la théorie scientifique particulière).
Cette théorie, seule la "logique pure" husserlienne la rend possible,
car elle recoupe en son sein la double exigence phénoménologique (l'intuition des essences) et logique (la théorie des théories) : une théorie n'est donc pas
seulement une manière logique d'ordonner des idées, mais constitue cela même qui peut rendre compte, en en dépassant précisément les conditions
propres, de toute théorie scientifique possible ; la possibilité d'une théorie fondatrice de la théorie, c'est donc en même temps celle de la métaphysique ellemême, perçue selon un paradigme logico-phénoménologique..
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