UNE RELIGION SANS CROYANCE EST-ELLE POSSIBLE ?
Extrait du document
«
Problématique:
Adhérer à une religion, c'est croire à ses dogmes.
Pourtant, on peut pratiquer une religion par habitude, conformisme
social.
Il est même des religions où la participation aux rites communs est plus importante que la sincérité de la foi.
Mais s'agit-il encore de religion?
uand on demande à une personne si elle est croyante, on pense à une croyance religieuse.
Mais on peut aussi se
croire plus malin qu'on n'est, ou croire ce que l'on nous dit, par exemple.
Une personne sans religion, qui n'en
pratique aucune, ou qui est athée - qui affirme qu'il n'y a pas de dieu - pourrait-elle avoir des croyances autres que
les croyances quotidiennes mentionnées plus haut?
1.
Omniprésence des croyances
Hume a montré que la croyance est omniprésente dans notre vie mentale.
Si je pense que le soleil se lèvera demain,
comme il l'a fait chaque matin jusqu'à présent, je peux dire que j'ai une croyance : en effet, elle n'est pas le résultat
d'une déduction rationnelle car elle est basée pour Hume sur une tendance de notre esprit qui attend que se
produise dans l'avenir ce qui s'est toujours produit; d'autre part, elle se présente comme une idée vive, à laquelle je
ne peux refuser mon assentiment.
L'argumentation sceptique ne me convaincra pas - si ce n'est d'une manière
abstraite et comme détachée de moi-même qu'il serait possible que la nature change complètement de cours.
Je conclus, par une induction qui me semble très évidente, qu'une
opinion ou une croyance n'est qu'une idée, qui diffère d'une fiction, non
pas en nature ou par l'ordre de ses parties, mais par la manière dont on
la conçoit.
Mais quand je veux expliquer cette manière, je trouve
difficilement un mot qui réponde pleinement à ce dont il s'agit, et suis
obligé de recourir à ce que chacun éprouve pour lui donner une notion
parfaite de cette opération de l'esprit.
Une idée qui reçoit
l'assentiment, nous l'éprouvons comme différente d'une idée fictive
que la fantaisie seule nous présente.
Et cette différence, je m'efforce
de l'expliquer par ce que j'appelle une force, une vivacité, une solidité,
une fermeté ou une stabilité supérieures.
Cette diversité de termes,
qui peut sembler si peu philosophique, n'est employée que dans le but
d'exprimer cet acte de l'esprit qui nous rend les réalités plus présentes
que les fictions, leur donne plus de poids dans la pensée et plus
d'influence sur les passions et l'imagination.
Pourvu que nous soyons
d'accord sur la chose, il n'est pas besoin de discuter sur les termes.
[...] J'avoue qu'il est impossible d'expliquer parfaitement ce que l'on
éprouve alors, cette manière de la conception.
Nous pouvons utiliser
des mots qui expriment quelque chose d'approchant.
Mais son nom
véritable, son nom propre, c'est croyance, terme que chacun comprend
suffisamment dans la vie courante.
L'esprit peut-il vraiment n'être qu'imagination, et ses opérations les plus sûres se rapprocher des fictions les plus
délirantes ? Le pari est tenu d'une philosophie sans a priori, théorie des facultés ou déduction transcendantale.
Ce
que Hume nomme entendement ne doit être entendu que comme « propriétés les plus stables et les mieux établies
de l'imagination' », comparaison d'idées entre elles (ou connaissance démonstrative) et fantaisie réglée, système de
croyances probables.
Au plan de leur contenu, il n'y a rien de plus dans une croyance que dans une fiction ; sinon,
justement, ce ne serait pas une croyance mais une vérité démonstrative, liant les idées par leur matière au lieu de
les lier sans fondement, comme le fait l'entendement dans les inférences causales.
Leur manière seule les distingue :
tandis qu'une association fantaisiste, celle d'une montagne d'or, par exemple, n'a pas d'effet sur les attentes et les
prédictions de l'entendement, ni même sur les passions (sauf pour un avare qui la chercherait, mais cela ne serait
que faux jugement et folie de sa part), les liaisons régulières s'accompagnent d'une tonalité particulière, pour
laquelle Hume emploie le mot feeling : les idées auxquelles on croit affectent l'esprit.
Cette force de conviction
caractérise l'idée vive qui, en raison de la coutume, reçoit de l'impression présente une part de sa vivacité ; tout se
passe comme si la répétition d'événements semblables toujours contigus l'un à l'autre, créait cet effet de vivacité.
Hume donne à un tel phénomène le nom très courant de croyance.
De ce fait, il forge un outil théorique destiné à lui
servir dans l'explication d'autres phénomènes que les inférences savantes, par exemple, la superstition, entretenue
grâce au soutien que les cultes donnent à ce mécanisme naturel, mais aussi la croyance à l'identité personnelle, aux
spectacles ou aux récits.
En dernière analyse, seule l'expérience effectivement constituée de conjonctions
constantes soutient la « certitude morale » (c'est-à-dire expérimentale) de nos croyances les plus probables, que
l'on peut considérer comme prouvées (mais non démontrées) et opposer aux fictions de l'imagination, même quand
ces dernières font l'objet de croyances artificielles et douteuses.
Concept cardinal, la notion de croyance, entendue
comme nommant un mécanisme de transfert de vivacité, est donc une arme contre les superstitions et les folies.
Ces croyances semblent même être le soutien le plus efficace pour la vie pratique : je ne sortirais pas de chez moi si.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- LA RELIGION ET LA CROYANCE (NIETZSCHE)
- Peut-on vivre sans croyance ? Peut-on vivre sans religion ?
- La religion est-elle une croyance privée ou une pratique collective ?
- La religion est-elle une croyance privée ou une pratique collective ?
- Être sans religion, est-ce n'avoir aucune croyance ?