Une oeuvre d'art est-elle un objet d'échange ?
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Il s'agit de se demander non pas si l'œuvre d'art peut être un simple objet de troc, mais en somme si l'œuvre d'art
est un objet comme les autres qui peut s'insérer sans problème dans le circuit d'échange capitaliste.
On trouve
parfois déplacé ou immoral que les œuvres d'art soient l'objet de tractations financières.
Il s'agit pour nous ici, de se
demander pourquoi, est-ce que cela teint au caractère sacré des œuvres d'art, à son caractère culturel, à notre
volonté de conserver les œuvres d'art car elles ont une valeur sentimentale pour tout un peuple ou pour des
individus, et qu'il est déplacé de vendre des choses à valeurs sentimentales.
1) L'art comme valeur d'échange à l'époque du capitalisme.
De Ricardo à Marx, en passant par Stuart Mill, les économistes ont reconnu le statut économique particulier de
l'œuvre d'art, en relation étroite avec le caractère unique de l'œuvre.
Son prix n'a pas d'autre limite que celle du
désir et du pouvoir d'achat des acquéreurs potentiels.
Il s'agit, dans l'acception marxiste du terme, d'un prix de
monopole.
Le produit ne devient réellement produit (l'ouvrage de l'artiste ne devient réellement œuvre d'art, le
producteur ne devient réellement artiste) que dans et par la consommation, laquelle anime en outre la production en
reproduisant le besoin et en posant idéalement l'objet de la production sous forme, comme l'écrit Marx, d'image
préalable, de mobile, de but.
Et c'est la distribution, encore, qui investirait l'objet, par-delà sa valeur d'échange, et
par le moyen de l'achat, de la spéculation, de l'enchère, de la mise en réserve, d'une valeur de signe dont il
emprunterait son prestige, sa légitimité.
Dans le marché de la peinture ancienne, où dominent les éléments
monopolistiques, on atteint, dans le cas idéal, typique de la limitation absolue de l'offre, des sortes de sommets
économiques.
La rareté du chef-d'œuvre unique du génie unique est la rareté la plus rare, et la plus chère, parmi les
raretés socialement désignées comme artistiques.
Elle est aussi la plus résistante aux aléas de la conjoncture.
La
notion de valeur refuge l'emporte, dans le marché de l'art ancien, sur celle de valeur spéculative – même si la tenue
des prix, dans les zones marginales, n'est pas indépendante de la révision périodique de la hiérarchie des valeurs
artistiques et des caprices du goût.
2) La critique de l'art comme valeur d'échange.
Le jeu dadaïste qui, sous couvert de critique, s'est voué à l'exploitation, parfois spectaculaire, d'une situation où
l'art, ayant perdu la « nécessité » que lui conférait son appartenance à un ordre plus ou moins sacralisé, emprunte
un semblant de légitimité de mécanismes sinon de gestes apparemment dérisoires.
Marcel Duchamp par exemple
signera un objet du commerce, le plus souvent connoté comme ressortissant à l'ordre du rebut, de la déjection, pour
le soustraire à son registre propre et l'introduire au musée ce jeu et la surenchère à laquelle il prête par définition
auront contribué à isoler l'opération constitutive de la valeur d'art comme telle, en tant qu'elle se distingue de toute
valeur d'usage et de toute valeur d'échange au sens strict.
Opération, comme on voit, qui n'a rien d'innocent, mais
qui n'aura pu aboutir, dans toute sa pureté, que sous l'effet du bouleversement continu de la production, de
l'ébranlement ininterrompu de tout le système social, et de l'érosion accélérée des rapports et des valeurs sociales
traditionnelles qui caractérise l'époque bourgeoise et qui est la conséquence du mode de production capitaliste.
Aussi, on comprend par cet exemple qu'on ne peut réduire l'œuvre d'art à une marchandise comme les autres, qu'elle
a une valeur qui dépasse largement l'utilité, qu'elle ne peut s'insérer par sa spécificité dans le jeu ordinaire des
échanges économiques capitalistes.
3) Ce qui fait que l'œuvre d'art n'est pas un objet d'échange comme les autres.
a) L'art à une signification spirituelle qui le démarque des objets ordinaires.
On reconnaîtra l'art du reste des objets par les procédés qui ont été mis en place pour réaliser cet objet.
Il y a
aura une création à l'origine de cet objet, une intention artistique visant à créer une émotion.
L'objet artistique sera
bien souvent en dehors du circuit d'utilité des objets ordinaires.
On reconnaîtra une certaine facture, un savoirfaire, une certaine patine que ne possèdent pas les objets ordinaires.
L'art a une visée plus haute que la simple
satisfaction des désirs, il a un but qui intéresse l'esprit.
Pour Hegel dans son Esthétique, L'art dégage la vérité des
apparences et la doté d'une réalité plus haute crée par l'esprit lui-même.
L'objet existe pour lui-même.
La
contemplation esthétique ne satisfait que des intérêts spirituels.
L'art est au milieu du sensible immédiat et de la
pensée pure.
Le sensible de l'art n'intéresse que nos sens intellectuels.
Nos sens intellectualisés sont la vue et
l'ouïe, tandis que le goût, le toucher, l'odorat s'occupent des choses plus matériels.
Donc dans l'art, le sensible est
spiritualisé.
On reconnaîtra un objet d'art à ce qu'il ne sert pas à satisfaire les besoins humains.
L'objet artistique,
culturel se démarque des autres objets dans la mesure où il a une signification qui dépasse le milieu parfois étroit qui
l'a vu naître.
b) l'œuvre d'art a un caractère sacré qui la distingue des autres objets.
On ne peut ramener tout le sacré à l'être en tant que tel.
L'expression de l'intelligible dans le sensible ne peut suffire.
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