Une connaissance scientifique du vivant est-elle possible ?
Extrait du document
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La connaissance scientifique repose sur des critères de vérification.
Cela permet une objectivité des résultats.
Le
modèle de cette connaissance est par exemple la science physique.
Celle-ci repose sur
l'expérimentation : il est possible de contrôler la théorie ou l'hypothèse physique par des faits.
La question est ici de
savoir si le vivant peut être connu dans le cadre d'une science rigoureuse.
La biologie par exemple s'apparente-telle dans sa méthode et dans sa démarche, dans ses résultats, à une science au même titre que la physique ? Le
vivant peut-il être objet de science ? Et de quelle science, de quel genre de connaissance alors s'agit-il ? En quoi
une connaissance scientifique du vivant n'est-elle pas possible ou du moins est-elle loin d'être évidente ? Quelle est
la spécificité du vivant qui fait qu'il peut se refuser à la connaissance scientifique ? Un être vivant est un organisme,
c'est-à-dire un organisme existant par soi et dont toutes les parties sont interdépendantes et ont des fonctions qui
concourent à la conservation du tout.
Une de ses caractéristiques essentielles est qu'il est création : il se nourrit et
se développe grâce à une relation constante avec le milieu extérieur ; il se reproduit ; il peut dans une certaine
mesure s'autoréguler.
Il n'est pas figé dans des caractéristiques une fois pour toutes.
C'est parce qu'il est en
évolution constante qu'il est difficile de le connaître au même titre qu'on peut déterminer un objet en physique.
Le
vivant est un objet scientifique ayant un statut particulier.
Pendant longtemps on s'est complu dans des théories
vitalistes.
Le vitalisme n'est pas une connaissance scientifique du vivant.
On peut l'opposer à la démarche
mécaniste cartésienne par exemple.
Mais garde-t-elle tout ce qui caractérise le vivant ?
I - QUELLE ANALYSE POUR CE SUJET ?
Problème classique d'épistémologie.
Il s'agit de savoir dans quelle mesure il est nécessaire de faire du vivant un
objet pour l'étudier.
C'est la question de l'objectivation du vivant, et de ce qu'elle implique relativement à l'analyse
mécanique du vivant.
Objectiver le vivant, est-ce considérer qu'il est régi par les lois ordinaires de la physique et de la chimie ? Est-ce
nécessairement le considérer comme une machine ?
Enfin, il faut bien souligner la distinction entre le vivant, être organisé remplissant certaines fonctions, et la vie,
principe métaphysique permettant de distinguer l'inertie du vivant.
II - UNE DÉMARCHE POSSIBLE.
A - CONNAÎTRE LE VIVANT APPELLE SON ÉTUDE DU POINT DE VUE DE LA SCIENCE.
Connaître quelque chose, c'est toujours le connaître scientifiquement.
Et cela exige qu'on en fasse un objet de
science.
Qu'est-ce à dire pour le vivant ? Comment faire du vivant un objet ? Réponse : en considérant qu'il ne fonctionne
pas selon des lois différentes de celles qui régissent la matière inerte.
Les mêmes lois physico-chimiques qui règlent la matière inerte règlent aussi le vivant.
Cela a pour conséquence de
faire pièce à toute idée métaphysique de principe vital.
C'est cette rupture épistémologique qui fait qu'on n'étudie plus la vie dans les laboratoires, mais uniquement le
fonctionnement du vivant.
B - CONSIDÉRER LE VIVANT COMME UNE MACHINE.
C'est la position mécaniste, celle de Descartes notamment.
Elle est induite de la séparation métaphysique de l'âme
et du corps, de la substance sensible et de la vie.
Il faut donc considérer le vivant comme une espèce de machine
dont le fonctionnement procède de la disposition de ses parties.
Le corps humain, comme le corps de l'animal, est une machine perfectionnée créée par Dieu.
Bien qu'infiniment plus
complexe que nos machines, son fonctionnement se laisse expliquer de la même manière.
Les corps sont composés
de nerfs et de muscles, comparables à des petits tuyaux, dans lesquels circule une matière subtile : les esprits
animaux.
Lorsque nous touchons un objet par exemple, nous en prenons une conscience tactile par l'effet de ces
esprits animaux qui remontent jusqu'au cerveau par l'entremise des nerfs, et viennent heurter la "glande pinéale",
siège de l'âme.
Il en est ainsi de tout le système sensorimoteur.
Si je veux me mouvoir, un grand nombre d'esprits
animaux seront canalisés vers les muscles qui seront sollicités pour accomplir ce mouvement.
La lumière, les odeurs,
les sons, les goûts, la chaleur se propagent jusqu'à notre esprit par l'intermédiaire de nos nerfs qui canalisent ces
particules.
La faim, la soif, le sommeil, la veille, le rêve se produisent de la même manière : un déplacement d'esprits
animaux à l'intérieur des canalisations de la machinerie complexe de notre corps.
Il existe cependant une différence
de mille entre un corps humain et un corps animal.
Aucun animal n'use jamais de signes, ou d'un quelconque langage
pour exprimer une pensée.
On peut concevoir un automate qui réponde par la parole à certains messages simples :
crier si on le touche, ou prononcer quelques phrases simples, mais aucun automate ne sera jamais en mesure
d'agencer une parole qui réponde au sens de ce qu'on lui dit.
Enfin, si un corps animal ou un automate peut
accomplir un nombre limité de tâches, parfois même mieux que nous, il ne peut aller au-delà.
Ce qui montre qu'ils
agissent par la disposition de leurs organes, et non par connaissance.
Ils sont dépourvus de pensée ou d'esprit.
Il
n'y a que l'homme à disposer de cet instrument universel qu'est la raison et qui lui sert en toute occurrence afin
d'agir comme il convient.
Chaque organe de la machinerie animale, tout au contraire, est spécialisé.
Il lui faudrait ce qui est impossible - un nombre infini d'organes pour faire autant de choses que notre raison nous le permet..
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