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Un dogme religieux peut-il tenir lieu de règle morale ?

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« Termes du sujet: TENIR LIEU: remplacer, servir de. RÈGLE: Proposition indiquant la manière de se conduite (prescription morale) ou la démarche à suivre pour obtenir un certain résultat (règles de l'art). MORAL(E): Moral: 1) qui concerne la morale.

2) qui est conforme aux règles de la morale; opposé à immoral. Morale: ensemble des règles d e conduite -concernant les actions permises ou défenduesinconditionnellement valables. tenues pour universellement et Dogme, Dogmatisme Du grec et du latin dogma, « opinion », « doctrine », « décret ». a) Opinion qui se donne comme incontestable et qui prétend échapper à l'examen critique ou à la remise en question.

b) En religion, article de foi incontestable.

c) Dogmatisme : par opposition au scepticisme, doctrine qui soutient la possibilité, pour la raison humaine, d'atteindre et de démontrer des vérités assurées. • Le dogme catholique de l'Immaculée Conception, par exemple, affirme que la Vierge Marie, mère de Jésus, a été préservée du péché originel. • La philosophie critique de Kant, parce qu'elle s'interroge sur les limites de la raison humaine, s'oppose au dogmatisme métaphysique qui prétend atteindre la connaissance des choses en soi (Dieu, âme, monde). Introduction Ce sujet questionne la liaison entre règles religieuses et règles morales.

L'expression « tenir lieu » avance une hypothèse : une règle religieuse pourrait jouer le rôle de règle morale ou bien en suppléer l'absence.

Au fond, l'énoncé postule que règles religieuses et règles morales sont distinctes mais comparables.

Jusqu'à quel point ? Les règles religieuses se caractérisent-elles plutôt par le caractère sacré qu'elles transmettent à la morale, ou par leur dogmatisme qui les y rend au contraire nuisibles ? Les prescriptions éthiques contenues dans toutes les religions nous permettent-elles d'accéder authentiquement à la morale ? Certes, les miracles comme les mythes, dans la mesure où ils frappent l'imagination (que l'on songe aux lois mosaïques), peuvent servir utilement à donner force et créance aux discours d'exhortation morale.

Ainsi, la religion pourrait servir la morale en donnant un fondement sacré et transcendant à un ensemble de prescriptions utiles à la vie immanente.

Mais, la morale n'est-elle pas fondamentalement de source profane et rationnelle ? L'homme ne trouve-t-il pas en sa raison, des impératifs valant en-soi et pour-soi ? Faut-il nécessairement en passer par le croire alors que le savoir nous est suffisant pour édifier une morale a priori et absolue ? Toutefois, la morale ne peut-elle nous conduire à la religion ? C'est une thèse soutenue, notamment, par Kant. I - L'interdit, point de convergence du moral et du religieux a) En soutenant que « presque toutes les grandes institutions sociales sont nées de la religion » (op.

Cit.

p.

697), Durkheim paraît faire de l'interdit religieux le modèle de l'interdit moral.

En réalité, les choses sont moins simples, car la relation peut se comprendre dans le sens inverse : « les intérêts religieux ne sont que la forme symbolique d'intérêts sociaux et moraux » (p.

537).

L'ascétisme religieux veut que la distinction du sacré et du profane reste absolue, ce qui donne à l'interdit religieux une double facette.

D'un côté, cet interdit porte en lui la stricte limite de sa validité (« rien de qui concerne la vie profane ne doit se mêler à la vie religieuse », p.

520), et de l'autre, l'interdit religieux, dans ce qu'il a de sacré et d'absolu, devient le modèle de référence de tout interdit. b) Ainsi la loi religieuse comme droit moral ou droit naturel est souvent perçue comme une règle capable de transcender le droit positif, un refuge d e la morale face à l'instrumentalisation du droit.

C'est que « la morale purement laïque est plus froide, plus proche de l'équanimité » (Alberoni, La Morale, XIII), comme si la revendication morale continuait de jaillir d'une source essentiellement religieuse. De par sa personnalisation divine, la règle religieuse a le don d e susciter davantage d'élan moral qu'une règle laïque froidement rationnelle. II — La nécessaire limitation du rôle séculier des églises a) Cette dernière idée ouvre une réflexion sur la séparation des églises et des États : celle-ci procède de l'appropriation par ces derniers du lien social et l'« irrésistible dessaisie des anciens îlots de socialité de leur dimension publique » (Gauchet, op.

cit., p.

285).

Il en résulte une déperdition de la fonction symbolique de ce qui est laïc, alors même que les prérogatives de ce domaine augmentent.

Ce qu'elle perd en mystique, la morale laïcisée ne le perd pas pour autant en légitimité ; mais le phénomène explique, sans la justifier, la nostalgie des valeurs religieuses. b) La nécessité de prémunir les morales laïques contre l'influence religieuse ne s'en trouve pas atténuée mais au contraire renforcée. Ainsi, s'appuyant sur le postulat selon lequel « philosophie et religion doivent être maintenues distinctes », Newton explique par exemple, dans ses Écrits sur la religion, que de même, « la religion et l'ordre politique, ou encore les lois de Dieu et les lois des hommes, doivent être maintenus distincts.

Nous ne devons pas faire des commandements des hommes une partie des lois de Dieu » (Tel, p.

89).

Ainsi, malgré son caractère sacré, le dogme religieux ne saurait tenir lieu de règle morale. III - Le dogmatisme religieux comme refuge de l'intolérance a) C'est sur le mot « dogme » qu'il faut faire porter l'interrogation.

Une théorie religieuse devient dogmatique lorsqu'elle prétend posséder une vérité absolue et exclusive, lorsqu'il faudrait, comme le dit Spinoza, soumettre la raison aux écritures.

« La Religion et la Foi, demande-t-il, ne peuvent-elles se maintenir que si les hommes s'appliquent laborieusement à tout ignorer et donnent à la Raison un congé définitif ? En vérité, si telle est leur croyance, c'est donc crainte que l'Écriture leur inspire plutôt que confiance ».

Laisser les écritures décider de la morale en lieu et place de la raison, c'est donc prêter le flanc à l'obscurantisme et à l'intolérance de la religion.

L'écriture, quand elle ne commandait pas elle-même les massacres (que l'on songe à l'extermination des Égyptiens dans l'Exode ou des Quarayza par Mahomet), ne garantit pas la moralité.

Freud peut ainsi dire que « de tous temps, l'immoralité n'a pas trouvé dans la religion moins d'appui que la moralité » (op.

cit., p.

39). b) L'intolérance religieuse est-elle un pléonasme ? Lévinas le redoute quand il analyse une certitude religieuse soustraite à l'histoire, qui ne tolère aucune limitation.

Ce serait ainsi parce qu'une règle religieuse est dogmatique et intolérante par définition qu'elle ne saurait avoir en morale, puisque « la vérité religieuse la plus douce est déjà croisade » (Difficile Liberté).

Aussi Lévinas veut-il exhorter la pensée juive à une intolérance qui « ne vise pas les doctrines, mais l'immoralité qui peut défigurer jusqu'au visage humain du prochain » (p.

243). Conclusion Religion et société sont l'une et l'autre des phénomènes historiques : la religion n'est pas transcendante à l'histoire et ne recèle rien, même dans ses ambitions morales, qui puisse prétendre à une validité éternelle et universelle.. »

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