Un acte humain peut-il être insensé ?
Extrait du document
«
Le mot insensé doit être analysé avec attention.
Insensé veut dire à la fois privé de signification ou absurde
mais également irrationnel (pensez à l'idée de " bon sens " qui est synonyme aussi de raison).
Un acte insensé,
qui soit absurde ou irrationnel n'est pas pour autant un acte sans cause.
Il convient peut-être d'examiner cet
aspect du sujet.
Trouvez des exemples d'actes que l'on pourrait qualifier d'insensés.
Peut être que la violence,
la guerre, le vandalisme sont insensés.
Par ailleurs, le sujet ne donne-t-il pas l'impression que tous les actes de
l'homme sont nécessairement sensés ? Peut-être que au contraire, faire quelque chose d'insensé est le
privilège de l'homme là où l'animal ne fait qu'obéir à son instinct et ne peut faire autre chose que de poursuivre
ce qui lui est utile.
Enfin, ce qui est insensé pour les uns ne l'est peut-être pas pour les autres.
Pourquoi à
votre avis ?
[L'homme n'a pas une totale emprise sur lui-même.
Il peut accomplir des actes qui échappent à sa
volonté, qui n'ont pas d'explication, qui peuvent mettre en péril sa vie ainsi que celle d'autrui.
L'homme a
conscience de lui-même, mais il ne maîtrise pas toutes les forces inconscientes qui l'animent.
Sous
l'emprise de la passion, de la folie, il peut agir de manière insensée, c'est-à-dire irrationnelle.]
Nous ne sommes pas maîtres de nous-mêmes
La psychanalyse a montré que la plus grande partie de notre vie
psychique demeure inconsciente.
Nous pouvons être le jouet de
pulsions, de désirs nous conduisant à commettre des actes insensés.
Si, heureusement, cela se passe rarement dans la réalité, il nous arrive
fréquemment de vivre, en rêve, des situations qui n'ont aucun sens.
Freud va être amené à concevoir que bon nombre de
maladies, mais aussi d'actes quotidiens s'expliquent si l'on admet
l'hypothèse de l'inconscient.
Il y aurait en nous u « réservoir » de
forces et de désirs (ou pulsions) dont nous n'aurions pas conscience,
mais qui agiraient sur nous..
Pour le dire brutalement, en ce sens,
l'homme n'agirait pas (ne choisirait pas ses actes e toute connaissance
de cause, dans la clarté), mais serait agi (c'est-à-dire subirait, malgré
lui, des forces le contraignant à agir) : il ne serait pas « maître dans sa
propre maison », il ne serait pas maître de lui.
Empruntons à Freud un exemple simple.
Un président de séance, à
l'ouverture dit « Je déclare la séance fermée » au lieu de dire « Je
déclare la séance ouverte ».
Personne ne peut se méprendre sur ses
sentiments ; il préférerait ne pas être là.
Mais ce désir (ne pas assister
au colloque) ne peut s'exprimer directement, car il heurterait la
politesse, les obligations sociales, professionnelles, morales du sujet.
Notre président subit donc deux forces
contraires : l'une parfaitement en accord avec les obligations conscientes, l'autre qui ne l'est pas et qui ne
peut s'exprimer directement, ouvertement.
Il y a donc conflit, au sein du même homme, entre un désir
conscient, conforme aux normes morales et un autre désir plus « gênant ».
Or, dans notre exemple, ce
second désir, malgré la volonté de politesse du président, parvient à s'exprimer, mais de façon détournée,
anodine : on dira que « sa langue a fourché ».
Ici, l'exemple est simple dans la mesure où le président a sans doute parfaitement conscience qu'il ne veut
pas être là.
Mais dans bon nombre de cas, quand ma langue fourche, je ne sais pas pourquoi, c'est-à-dire que
j'ignore moi-même ce qui me pousse à dire tel mot plutôt qu'un autre.
Or pour Freud le cas est exactement
identique et s'interprète de même, comme le conflit entre deux désirs dont l'un est gênant et peut être ignoré
par le sujet.
Il n'y a pas d'actes innocents ou anodins.
Tous sont révélateurs d'un affrontement en moi de
deux forces.
L'hypothèse Freudienne de l'inconscient revient à dire que bon nombre d'actes « normaux » (oubli, actes
manqués, rêves), mais aussi « maladifs », pathologiques (névroses, psychoses, obsessions) s'expliquent en
gros selon le même schéma.
L'individu subirait un conflit psychique (dans son âme), conflit parfois
extrêmement violent entre les normes conscientes (morales, esthétiques, sociales) et des désirs qui
bousculent et négligent ces règles.
Ce second groupe de désirs, le sujet les trouverait, s'il en avait
conscience, tellement monstrueux, qu'ils ne peuvent parvenir à la conscience que sous une forme voilée,
déformée, indirecte : le lapsus, le rêve, ou le symptôme maladif..
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