Travailler, est-ce un devoir ?
Publié le 09/05/2023
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INTRO
Le débat actuel sur la réforme des retraites questionne, plus ou moins directement,
le rapport de l’être humain au travail.
Comment perçoit-il le travail ? Est-ce pour lui
une activité de transformation de la nature à des fins utiles ? Un simple effort qu’il
produit dans le but de percevoir une rémunération en échange ? Ou bien
l’importance de travailler ne va-t-elle pas encore plus loin en l’assimilant peut-être
même à un devoir ? C’est cette conception que choisit Kant.
Il l’évoque d’ailleurs
dans son œuvre Réflexions sur l’éducation (1803) : “L’homme est le seul animal qui
doit travailler”, explique-t-il.
Il associe donc le travail à la marque d’une nécessité,
ce qui doit arriver : c'est une obligation morale, une règle qui prescrit un
comportement ou dans un sens plus large : une obligation définie et souvent propre
à une fonction.
Nous nous intéresserons donc au sujet suivant : Travailler est-ce un devoir ?
Le travail, un devoir ? Mais envers qui et à quel niveau ? Collectif ? Individuel ?
Sinon, ne travaillons-nous pas plutôt pour vivre ? Ce dernier serait alors qu’une
finalité inévitable.
Ou a contrario, n’est-il pas question de volonté ? Le vouloir de s’y
soumettre chaque jour qui passe dans l’espoir peut-être de l’atteinte d’un statut de
prestige, d’une reconnaissance par la société.
Néanmoins, en aucun cas l’Homme
n’est toujours contraint au travail.
Pourquoi donc travaille-t-il au-delà de l'aspect
pénible ? Ne serait ce pas approprié de parler ici d’une forme de souhait ? D’un désir
du travail dans ce et pour ce qui nous aspire ?
Nous nous questionnerons alors sur si la nature du travail relève-t-elle uniquement
du devoir ou n’est-elle pas l'émanation d’une contrainte, d’une obligation, d’un désir
?
Pour répondre à cette problématique nous allons voir que le travail n’est vu, non
comme un devoir, mais avant tout comme une contrainte, puis que si on ne peut pas
à proprement parler de “devoir”, on y voit cependant une obligation et qu’enfin c’est
un désir qui peut persister au-delà de toutes règles sociales ou morale universelle.
PARTIE 1
Le travail est souvent perçu comme une contrainte plutôt qu'un choix volontaire.
Cette vision est profondément ancrée dans notre culture et remonte à l'époque
antique où le travail était considéré comme une malédiction ou une punition infligée
par les dieux.
Cette perception a été transmise de génération en génération et est
encore présente aujourd'hui.
La Genèse, premier livre de la Bible, illustre bien cette conception du travail comme
une malédiction.
Selon le récit biblique, Dieu créa Adam et Ève et les plaça dans le
jardin d'Eden.
Dans ce lieu idyllique, où tous leurs besoins étaient satisfaits, ils
n'avaient pas à travailler.
Cependant, leur désobéissance envers Dieu les fait bannir
du doux paradis et le couple doit alors travailler pour sa subsistance.
À ce moment,
travailler devient une imposition pour les êtres humains.
Cette conception du travail comme châtiment se retrouve également dans les
cultures antiques.
Les Égyptiens considéraient le labeur tel une malédiction imposée
par les dieux pour punir les humains.
Les Grecs, quant à eux, apportent une vision
plus nuancée.
Celui-ci est pour eux nécessaire pour subvenir à ses besoins, mais
reste également vu comme une punition pour ceux commettant des crimes.
Enfin, cette vision contraignante du travail est aussi présente dans la culture
occidentale.
Durant la Rome antique, le terme "tripalium" était utilisé pour décrire
un instrument de torture et est à l'origine du mot "travail" en français.
Il est
révélateur de l’idée du travail telle une forme de supplice ou d'oppression.
La
nécessité vitale de travailler pour subvenir à ses besoins est une source de
contrainte pour les travailleurs.
Les emplois mal rémunérés ou pénibles sont souvent
perçus comme une forme d'aliénation car les salariés n'ont souvent pas d’autres
choix que de travailler pour survivre, une situation pouvant entraîner l’exploitation
des ces derniers.
Le travail imposé par d'autres est une autre forme de contrainte associée au travail.
Les esclaves et les prisonniers étaient souvent contraints de travailler pour leurs
“maîtres” ou geôliers.
Un exemple tristement connu est celui du commerce
triangulaire s'étant déroulé entre le 16e et le 19e siècle.
Cette forme de commerce
impliquait l'achat et la vente de personnes originaires du continent africain
transportées en Amérique pour y travailler dans les plantations de canne à sucre, de
coton, de tabac et d'autres cultures lucratives.
Ces gens, fait esclave, étaient
arrachés à leur patrie et contraints de travailler dans des conditions brutales et
inhumaines pour le bénéfice de ceux qui se pensaient leurs maîtres.
Soumis aux
travaux forcés, châtiments corporels et aux conditions de vie insalubres, leur travail
était entièrement imposé par d'autres et leur vie entière sous l’influence des
caprices de leurs oppresseurs.
Si le commerce triangulaire a pris fin, il est important de noter que des formes
d'exploitation similaires existent encore aujourd'hui.
Les travailleurs en situation
irrégulière, les travailleurs domestiques et les travailleurs du secteur de l'industrie
textile sont souvent victimes d'une forme moderne d'esclavage par laquelle il sont
contraints à travailler dans des conditions dangereuses et soumis à des abus
physiques et émotionnels.
En effet, les employeurs peuvent imposer le travail aux
employés, les exploitant pour leur propre profit soit sous la forme d’un salaire
insuffisant, de longues heures de travail ou d'un environnement de travail
dangereux.
TRANSITION
Ainsi le travail apparaît tel une tâche pénible fatigante et contraignante voir même
comme une malédiction imposée par d’autres.
nous empêchant alors d'accéder à un
plus grand bien.
Le travail ne peut donc être considéré comme un devoir car un devoir présuppose
qu'on ait le choix de ne pas travailler, que l'on puisse échapper à cette nécessité.
L'obéissance à une nécessité n'est pas un devoir, selon Rousseau dans le Contrat
social.
Or, le devoir n'a de sens que si je suis libre de m'y refuser.
PARTIE 2
Dans la recherche du bien vivre, le travail devient une obligation sociale.
L’Homme
veut survivre mais surtout vivre dignement.
Pour cela, il doit répondre efficacement
à ses besoins vitaux mais également à ceux entrant dans l’ordre du culturel.
Ainsi,
les êtres humains s'assemblent et par leurs échanges régulés de services et de biens,
se construisent une société.
L’individu appartenant à cette société est alors un être
social.
Selon Platon dans le livre II de La République qui est un dialogue développant une
conception originale de la vie sociale à l’intérieur d’une Cité idéale, cette société
s’organise justement par la division du travail comme trame des relations sociales
constitutives de la Cité.
Cette division du travail est d’une nécessité pratique permettant d’organiser
l’accomplissement des divers travaux en les répartissant entre les citoyens et de les
réaliser de façon efficace.
Surtout, elle répond à une nécessité sociale favorisant la
solidarité entre les citoyens, développant les échanges et appartenant à un
phénomène qui en droit peut se poursuivre indéfiniment.
Cependant, cette division
comporte des dangers puisqu'elle emprisonne le travailleur dans des tâches de plus
en plus parcellisées et répétitives menant à sa déshumanisation ou à un
reproduction des inégalités sociales.
Platon et l'émergence d'une réflexion autour de la division du travail ~ SILO
Vous avez ici un extrait de La République de Platon (Livre II, 369b-370a) où se
déroule un dialogue entre Socrate et Adimante.
Socrate soutient que la cité naît de la nécessité pour les individus de s'associer pour
satisfaire leurs besoins, tels que la nourriture, le logement et les vêtements (rpl 1 à
12).
Il argumente que pour que la cité puisse fournir ces besoins, il est nécessaire
que chaque individu exerce un métier spécifique,....
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