Toute volonté de croire est-elle une raison de douter
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Toute volonté de croire est-elle une raison de douter ?
Introduction.
— Discerner le vrai d'avec le faux est affaire d'intelligence ; toute intervention d'une puissance
étrangère venant gauchir les démarches spontanées de l'esprit ne peut être, semble-t-il, que cause d'erreur.
C'est pourquoi, lorsque les arguments ne suffisent pas à emporter la conviction, inutile de chercher à faire agir
d'autres ressorts : ce besoin même d'une force autre que celle de l'évidence montre que l'affirmation serait
hasardée et que la sagesse demande qu'on réserve son assentiment : un trop grand désir ou même la volonté
de croire est une raison de douter.
Mais cela est-il vrai de toute volonté ?
I.
Au sens large, on entend par volonté la force avec laquelle l'homme se porte vers un objet et surmonte les
obstacles qui s'opposent à la réalisation de ses projets.
La passion augmente la volonté ainsi comprise.
Inutile de le dire, cette volonté de croire ne fournit aucune raison de croire.
La passion, en effet, n'est pas
déterminée par des considérations intellectuelles et le désir ne se porte pas spontanément vers le vrai.
Elle
constitue même une raison de douter, car cette tendance à croire peut : 1° lui faire négliger l'examen des
raisons ; 2° river son esprit à l'examen des seules raisons qui justifient la croyance déjà virtuellement
acceptée.
II.
Mais, au sens strict, on entend par volonté la faculté d'agir suivant les indications de la raison.
La volonté de croire n'est pas, alors, une raison de douter : cette volonté, en effet, est subordonnée à la
rationalité de la croyance ; elle porte donc sur les moyens de vérifier les fondements de la croyance plus que
sur la croyance elle-même : celui qui veut croire fixe son esprit à la considération des motifs de croire, mais il
ne croit que lorsqu'il voit des raisons de croire.
On pourrait même dire que la volonté rationnelle de croire est une raison de croire.
Cette volonté résulte, en
effet, du travail de l'esprit ; on peut y voir un résumé synthétique de raisonnements antérieurs et une
anticipation intuitive de recherches ultérieures.
III.
Réunissant les deux acceptions du mot « volonté », nous pouvons dire : toute volonté passionnelle de ne
pas voire constitue une raison de volonté rationnelle de croire.
Bien souvent, en effet, l'homme est détourné de certaines pensées parce qu'elles le gênent, parce qu'elles
contrarient ses habitudes, s'opposent à ses intérêts ou à ses passions : c'est ce qui se passe pour les vérités
morales.
Dans ces cas, s'il est raisonnable, il lui suffit de prendre conscience de la résistance de son être sensible pour
réagir, contre cette force irrationnelle et provoquer en lui la volonté de croire : 1° en fixant son esprit sur les
raisons de croire ; 2° en prenant l'attitude extérieure de celui qui croit.
Conclusion.
— Toutes nos pensées doivent, autant que possible, être contrôlées par la raison.
Les influences
perturbatrices du sentiment et de la passion doivent être contrebattues ; mais le seul contrepoids possible à
ces forces irrationnelles, qui sont une raison de douter, ne peut être qu'une véritable volonté de croire, qui
devient une raison de ne pas douter..
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