Toute vérité est-elle défintive?
Publié le 20/05/2023
Extrait du document
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Toute vérité est-elle définitive ? Mais qu’est-ce que la vérité ? La vérité relève de
l’intelligible et non du sensible.
Saint Thomas d’Aquin la définit ainsi : veritas est
adequatio intellectus et rei, la vérité est l’adéquation entre la réalité et l’intellect.
Autrement dit, c’est dire ce qui est.
La vérité s’oppose donc à l’erreur qui manque
involontairement la vérité, mais également à l’illusion et au mensonge.
Or, la vérité est
toujours vraie.
L’expression “définitive” confirme l’aspect irrévocable de la vérité, elle
ne peut être modifiée.
Deux et deux feront toujours quatre, et ce de manière
universelle et intemporelle.
Dans ces conditions comment ne pourrait-elle pas être
définitive ? Une vérité qui pourrait ne pas être définitive reviendrait à dire qu’elle n’est
plus vraie.
Existe-t-il des vérités fausses ? Cela impliquerait-il qu’avec le temps
certaines vérités sont réfutables ? Le déterminant indéfini “toute” présuppose qu’il
existe plusieurs vérités et que toutes ne sont pas définitives.
Donc, si nous nous basons
sur la définition donnée par Augustinien et que la vérité est un accord avec le réel,
comment garantir son aspect définitif dans la mesure où le réel change, évolue.
Devrions-nous alors faire la différence entre des vérités constantes et des vérités
provisoires ? N’y aurait-il rien d’absolu dans la vérité, et de fait, serait-elle
nécessairement dépendante d’autre chose telle que la connaissance ? Afin de
répondre à cette question, nous verrons tout d’abord qu’il existe des vérités
définitives, puis nous étudierons en quoi certaines vérités peuvent-être réfutées, et
enfin nous nous demanderons si la vérité n’est pas liée au langage.
Selon Platon, la vérité est définitive et tout le monde y a accès car notre âme a pu la
contempler lors de ce qu’il appelle la Réminiscence.
En d’autres termes, avant de venir
au monde, notre esprit a accès au monde des Idées et s’imprègnent de toutes les Idées
parfaites.
De fait, tout ce que nous percevons dans notre réalité matérielle ne serait
qu’une copie de ces Idées parfaites.
La vérité serait alors une valeur absolue, à l’instar
du Bien et du Beau.
On peut alors se demander ce qu’est la vérité et comment on
pourrait y accéder sans la confondre avec la réalité qui, elle, est perceptible grâce à
nos sens, et ne relève donc que du simple constat ? Selon le philosophe grec, la vérité
se trouve dans le monde des Idées, et non pas dans celui du sensible, de la Doxa, dans
lequel nous évoluons.
Cette vérité est cachée et nous avons besoin de la connaissance
pour y accéder.
En effet, celle-ci ne relève ni des sens ni de l’opinion, mais au contraire
elle doit déterminer ce qu’on peut concevoir de manière logique et pas simplement
sur l’observation.
C’est ce que Platon nous démontre avec son Allégorie de la caverne.
Il nous révèle qu’il est possible d’atteindre la connaissance, les Idées, en changeant
notre rapport au monde sensible et en entreprenant un long cheminement vers la
vraie connaissance.
À l’issue de ce cheminement, à la sortie du prisonnier, nous
pouvons contempler la vérité car nous aurons pris le seul chemin pour y arriver : celui
de la raison.
On peut d’ailleurs affirmer que cette allégorie est tout à fait d’actualité
dans un monde où l’apparence est reine car elle nous enjoint de prendre de la distance
avec ce qui nous entoure, à aller au fond des choses sans se limiter à examiner la
surface.
C’est d’ailleurs ce que se propose de faire Descartes, philosophe, mathématicien et
physicien, dans ses Méditations Métaphysiques.
Alors certes, le procédé change mais
la raison reste la seule qualité capable de nous faire parvenir à la vérité.
En effet,
Descartes se demande s’il est possible de trouver une vérité initiale par soi-même, de
manière totalement indépendante.
Pour ce faire, il va utiliser la méthode du doute
radical qui lui permet de réexaminer tout ce qu’il a appris jusque-là.
En effet, ayant
suivi une éducation scolastique, ses connaissances lui ont été transmises comme
autant de vérités indubitables.
Mais, avec le temps il va réaliser que certaines
s’avèrent fausses.
Il va donc se mettre à douter de tout dans le but de trouver la vérité,
et surtout pouvoir prouver qu’elle est vraie.
Dès lors le doute est posé par Descartes
comme étant un outil pour trouver la vérité.
Après avoir écumé moult hypothèses, les
sens trompeurs, le rêve, le malin génie, il va découvrir qu’au cœur de cette dernière
hypothèse, celle du malin génie, se cache une vérité certaine : il est puisqu’il se
trompe.
C’est ainsi que la formule « Cogito ergo sum », « je pense donc je suis »
implique que la pensée et l’être coexistent nécessairement.
En d’autres termes, douter
c’est penser, et pour penser il faut bien que je sois un être pensant.
Le cogito est de ce
fait une vérité définitive qui permettra de fonder le savoir objectif sur le sujet à
l’instant où il est conscient de lui-même et non sur la seule contemplation du monde.
Descartes crée alors le doute cartésien en s’appuyant sur sa raison et sur l’évidence
pour atteindre la vérité, et ainsi il acquiert cette première certitude du cogito.
En outre, lorsqu’on veut montrer une vérité indiscutable on a tendance à dire
« C’est mathématique » comme si cette discipline détenait la vérité absolue.
Les
mathématiques ne seraient-elles pas une voie qui permettrait à l’esprit humain
d’accéder aux vérités absolues ? C’est en tout cas ce que pensait Platon pour qui le
modèle de la vérité est celui des mathématiques d’où la devise de son Académie « Nul
ne rentre ici s’il n’est géomètre ».
Ici le terme géomètre est assez éloquent car il ne
réduit pas l’univers des mathématiques aux seules quantités, mais également aux
formes pures afin que l’on puisse juger correctement la réalité.
En effet, les
mathématiques étudient les nombres et les figures, et pour en conclure les propriétés
elles utilisent des règles de logique ainsi qu’un raisonnement déductif irréfutables.
Même si les maths évoluent dans un univers abstrait elles concernent également notre
monde réel.
La vérité en mathématiques est formelle, à savoir un enchainement
logique des propositions, et matérielle, c’est à dire que le contenu des propositions est
conforme à la réalité.
Nous pouvons donc affirmer que les vérités mathématiques sont
définitives, telles que deux plus deux font quatre ou le théorème de Thalès.
La notion de vérité définitive se rencontre très souvent dans la science, et le
philosophe mathématicien allemand Husserl affirme qu’« elle veut des vérités valables
une fois pour toutes et pour tous, définitives ».
Selon lui, la recherche de vérités
définitives est le but principal de la science.
Cependant, en sciences comme dans
d’autres domaines, tout ne peut être démontré et il nous faut parfois admettre
certaines propositions comme vraies car ces mêmes propositions serviront de base aux
démonstrations d’autres propositions.
A partir du moment où on accepte ces
propositions comme base, elles sont automatiquement considérées comme vraies et
définitives car si on modifie la base d’une démonstration, celle-ci est faussée.
D’où
l’utilisation de postulats qui sont des propositions qui ne sont pas démontrables mais
qui sont toutefois admises.
Mais l’existence de vérités définitives se ressent également dans la grammaire
française.
Il n’est pas rare d’utiliser le présent de vérité général pour certains cas afin
de montrer le caractère permanent de la vérité dont il est question.
On le retrouve
d’ailleurs dans de nombreux énoncés scientifiques et dans des proverbes dont la
morale est universelle.
Le présent de vérité générale définit qu’un fait est vrai quel que
soit le moment où on le considère.
Par exemple, si on prend la définition du théorème
de Pythagore, mathématicien et philosophe de la Grèce Antique il est clairement dit :
le carré de la longueur de l'hypoténuse, qui est le côté opposé à l'angle droit, est égal à
la somme des carrés des longueurs des deux autres côtés.
On retrouve l’emploi du
présent de vérité général car cet énoncé a été démontré de manière rigoureuse à
l’instar des théories scientifiques.
Enfin, une vérité de fait est une vérité définitive.
En effet, l’eau bout à cent degrés,
la Terre est ronde, tous les êtres humains ont un cerveau, sont autant de faits qui ont
été expérimentés, prouvés et démontrés scientifiquement.
Ce sont donc des vérités
définitives.
D’autres vérités de faits sont également immuables, comme par exemple
celles qui touchent à l’histoire.
De fait, l’Allemagne nazi a exterminé des millions de
juifs, c’est un fait que nous ne pouvons contredire, et qui, dans ce cas précis, nie toute
subjectivité de l’historien.
Les faits historiques peuvent donc être considérés comme
des vérités définitives car ils se déroulent de manière précise : l’histoire a pour objet
des faits, datés, localisés, distincts et singuliers, comme par exemple la nuit de la Saint
Barthélémy ou encore l’explosion de la bombe Hiroshima en 1945.
Wittgenstein nous
dit dans De la certitude que « tous ces faits ont été confirmés des centaines de fois ».
Dans ce cas nous pouvons donc affirmer que ces vérités sont définitives....
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