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Texte du Monde comme volonté et comme représentation de Schopenhauer

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Texte du Monde comme volonté et comme représentation de Schopenhauer Si la morale ne considère que l'action juste ou injuste, si tout son rôle est de tracer nettement à quiconque a résolu de ne pas faire d'injustice, les bornes où se doit contenir son activité, il en est tout autrement de la théorie de l'État. La science de l'État, la science de la législation n'a en vue que la victime de l'injustice ; quant à l'auteur, elle n'en aurait cure, s'il n'était le corrélatif forcé de la victime ; l'acte injuste, pour elle, n'est que l'adversaire à rencontre de qui elle déploie ses efforts ; c'est à ce titre qu'il devient son objectif. Si l'on pouvait concevoir une injustice commise qui n'eût pas pour corrélatif une injustice soufferte, l'État n'aurait logiquement pas à l'interdire. Aux yeux de la morale, l'objet à considérer, c'est la volonté, l'intention ; il n'y a pour elle que cela de réel ; selon elle, la volonté bien déterminée de commettre l'injustice, fût-elle arrêtée et mise à néant, si elle ne l'est que par une puissance extérieure, équivaut entièrement à l'injustice consommée ; celui qui l'a conçue, la morale le condamne du haut de son tribunal comme un être injuste. Au contraire, l'État n'a ement à se soucier de la volonté, ni de l'intention en elle-même ; il n'a affaire qu'au fait (soit accompli, soit tenté), et il le considère chez l'autre terme de la corrélation, chez la victime ; pour lui donc il n'y a de réel que le fait, l'événement. Si parfois il s'enquiert de l'intention, du but, c'est uniquement pour expliquer la signification du fait. Aussi l'État ne nous interdit pas de nourrir contre un homme des projets incessants d'assassinat, d'empoisonnement, pourvu que la peur du glaive et de la roue nous retienne non moins incessamment et tout à fait sûrement de passer à l'exécution. L'État n'a pas non plus la folle prétention de détruire le penchant des gens à l'injustice, ni les pensées malfaisantes ; il se borne à placer, à côté de chaque tentation possible, propre à nous entraîner vers l'injustice, un motif plus fort encore, propre à nous en détourner ; et ce second motif, c'est un châtiment inévitable. A. Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation.

« Si la morale ne considère que l'action juste ou injuste, si tout son rôle est de tracer nettement à quiconque a résolu de ne pas faire d'injustice, les bornes où se doit contenir son activité, il en est tout autrement de la théorie de l'État.

La science de l'État, la science de la législation n'a en vue que la victime de l'injustice ; quant à l'auteur, elle n'en aurait cure, s'il n'était le corrélatif forcé de la victime ; l'acte injuste, pour elle, n'est que l'adversaire à rencontre de qui elle déploie ses efforts ; c'est à ce titre qu'il devient son objectif.

Si l'on pouvait concevoir une injustice commise qui n'eût pas pour corrélatif une injustice soufferte, l'État n'aurait logiquement pas à l'interdire. Aux yeux de la morale, l'objet à considérer, c'est la volonté, l'intention ; il n'y a pour elle que cela de réel ; selon elle, la volonté bien déterminée de commettre l'injustice, fût-elle arrêtée et mise à néant, si elle ne l'est que par une puissance extérieure, équivaut entièrement à l'injustice consommée ; celui qui l'a conçue, la morale le condamne du haut de son tribunal comme un être injuste.

Au contraire, l'État n'a nullement à se soucier de la volonté, ni de l'intention en elle-même ; il n'a affaire qu'au fait (soit accompli, soit tenté), et il le considère chez l'autre terme de la corrélation, chez la victime ; pour lui donc il n'y a de réel que le fait, l'événement.

Si parfois il s'enquiert de l'intention, du but, c'est uniquement pour expliquer la signification du fait. Aussi l'État ne nous interdit pas de nourrir contre un homme des projets incessants d'assassinat, d'empoisonnement, pourvu que la peur du glaive et de la roue nous retienne non moins incessamment et tout à fait sûrement de passer à l'exécution.

L'État n'a pas non plus la folle prétention de détruire le penchant des gens à l'injustice, ni les pensées malfaisantes ; il se borne à placer, à côté de chaque tentation possible, propre à nous entraîner vers l'injustice, un motif plus fort encore, propre à nous en détourner ; et ce second motif, c'est un châtiment inévitable. A.

Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation. Schopenhauer est un philosophe allemand du XIXème siècle surtout connu pour ses théories pessimistes sur la vie. C'est d'ailleurs pour cela qu'il est rangé sous l'étiquette des philosophes pessimistes.

On connaît donc plus sa conception de l'existence comme un pendule qui oscille entre la douleur et l'ennui que son idée de la morale.

S'il est vrai que Schopenhauer prône la négation de la volonté, à la base de vie humaine, la morale est une des étapes vers le nirvana et la béatitude du sage.

Le livre quatrième de son ouvrage principal Le monde comme volonté et comme représentation est d'ailleurs consacré à la morale.

La réflexion sur la morale de la part de Schopenhauer peut pourtant étonner.

Il affirme en effet que chacun cherche à satisfaire en priorité ses besoins et chaque être vivant tend à s'affirmer aux dépends des autres.

Comment alors empêcher les hommes de se faire du mal et d'être injustes vis-à-vis des autres ? Le philosophe, dans ce texte, s'interroge dans ce texte sur les différences entre la morale et la justice, considérée comme une institution de l'état.

Il s'agit de savoir de quoi doit s'occuper l'état.

La justice comme institution a pour charge dans une société, de faire que les rapports entre les individus soient pacifiques et ne nuisent pas à la bonne marche de l'état et de la société.

Elle produit ainsi des lois qui n'ont pas une valeur absolue mais prescrivent des règles d'actions en vue de la vie en commun qu'il faut respecter sous peine de sanction.

Quelle différence entre la morale et la justice étatique ? La morale doit-elle s'occuper de la conséquence des actes ou de l'intention ? Comment permettre aux hommes de devenir moraux ? La morale et la science législative n'ont pas le même objet - Schopenhauer construit son texte sur une opposition très nette.

La première phrase en est la preuve.

Elle est construite sur une subordonnée introduite en « si , qui donne l'objet de la morale, à quoi la deuxième partie s'oppose en affirmant que « la théorie de l'état » est à l'inverse.

Il est difficile de découper des parties nettes dans le texte : Schopenhauer mélange les deux domaines.

Il s'emploie à définir les objets de la morale et de la justice étatique. - La première différence que Schopenhauer introduit réside dans la préoccupation de l'agent d'une injustice.

L'état, nous dit-il, ne se soucie que de la victime d'un crime, de la personne lésée.

S'il n'avait en effet personne qui souffre d'un acte injuste, l'Etat n'aurait nullement à s'occuper de l'injustice.

En effet, pour qu'une société puisse fonctionner, il faut que les personnes qui la composent ne puissent pas se faire du mal mutuellement.

Les philosophes précédents Schopenhauer, tel Hobbes, ont compris l'avènement d'une société comme le besoin de sécurité des sujets.

Hobbes explique en effet, qu'avant que la société soit instituée, régnait un état de nature où chacun pouvait agresser l'autre pour obtenir l'objet de son désir.

Cet état était une guerre perpétuelle et chaque homme ne pouvait pas réellement faire ce qu'il voulait par crainte de se faire tuer.

C'est pour se protéger contre les agressions des autres qu'ils sont entrés en société et c'est à ce prix qu'ils ont renoncé à l'indépendance primitive. Pour Schopenhauer, d'ailleurs le fondement de l'existence humaine, c'est l'égoïsme.

Chaque homme se considère comme le centre du monde et ses actions sont toujours entreprises en vue de sa propre conservation.

Dès lors, le principe de l'état est d'assurer la perpétuation de la société et donc d'assurer la sécurité de tous.

L'existence de loi est donc là pour assurer la sécurité et de tracer les limites légales de chaque action.

C'est d'ailleurs pour cela que Schopenhauer appelle la justice comme institution, une « science législative ».

De fait, si une injustice ne touchait personne, elle ne mettrait pas à mal la société et l'état ne s'en soucierait pas.

C'est donc simplement parce qu'il a une victime que l'état vient à considérer l'auteur de l'injustice.. »

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