Suis-je l'esclave de mon corps ?
Extrait du document
«
Définition des termes du sujet :
Un esclave est un être humain entièrement soumis à la volonté d'un autre : c'est une notion économique – l'esclave
est celui qui travaille pour un maître, sans rémunération et sans liberté d'initiative sur son travail, mais c'est aussi,
et c'est ce qui nous intéresse essentiellement pour ce sujet, une notion éthique : l'esclave est forcé de renoncer à
sa liberté, à sa volonté, au profit d'un maître qui a tous les droits sur lui, y compris parfois celui de le mettre à mort.
Le corps, c'est-à-dire la réalité physique, matérielle, de tout être vivant, peut se concevoir dans deux directions
distinctes : comme une source de besoins physiques primaires (manger, boire, etc.) et soumis à des événements
inévitables (la mort, la maladie) d'une part, comme un objet dont on peut soigner l'apparence, que l'on peut aimer et
agrémenter, d'autre part.
Il s'agit de définir le rapport de l'être humain au corps, de déterminer ce qui, en moi, joue le rôle du maître : le
corps est-il le maître de ma personne ? Est-ce lui qui dirige ma vie ? Ou existe-t-il autre chose qui puisse prétendre
au rôle de maître ?
L'importance du rôle du corps dans notre vie semble indiscutable, précisément parce que notre corps est
indissociable de notre vie physique, et que la fin de la vie du corps signifie, a priori, la fin de la vie tout court.
Cette
importance a été et est toujours, dans de très nombreuses sociétés, exacerbée par des soins particuliers apportés
au corps en vue de le rendre plus fort, plus beau, etc.
Que l'on songe ici au diktat de la mode et à la tyrannie de la
beauté dans notre culture...
Alors on peut penser que c'est le corps qui nous gouverne, que nous en sommes esclaves.
Pourtant, ne peut-on pas envisager des instances supérieures au corps ? De nombreuses traditions philosophiques
et religieuses envisagent une existence séparée de l'âme et du corps, et même, pour certaines, une survie de l'âme
indépendamment du corps.
Que penser de cette âme ? Quel est son rapport au corps, et, surtout, ce rapport peut-il
être envisagé comme une supériorité ? Et si l'on refuse de concevoir une existence séparée de l'âme et du corps, ne
peut-on toujours trouver en l'homme des puissances susceptibles de dominer le corps ? L'homme est un être doué
de raison : n'est-ce pas justement cette raison qui lui permet de dépasser sa simple dimension corporelle, et de le
différencier de la vie animale, qui, elle, est purement physique et gouvernée par les besoins du corps ?
Ainsi, si le corps exerce une influence indiscutable sur notre vie, nous pouvons, par l'usage de la raison, dépasser
cette influence, refuser d'être l'esclave de notre corps, et, au lieu de cela, avoir une conscience de notre être
complet, âme et corps, nous efforcer de connaître ces deux parties sans perdre de vue que notre corps n'est pas
notre maître, mais que nous devons nous rendre maîtres de notre corps.
Références utiles :
Platon, Phédon.
(le corps, « prison de l'âme »)
Spinoza, Ethique, III.
Un esclave se caractérise par deux aspects : - l'absence de liberté et la dépendance absolue d'un maître dont il
est la propriété ; - une liberté dans un état de dépendance totale vis-à-vis de quelqu'un ou de quelque chose et ne
dispose pas librement de soi.
Mais parler en ces termes reviendrait à caractériser l'âme et le corps, ou l'esprit et le
corps, comme deux entités indépendantes ou autonomes, et dont l'une serait la propriété de l'autre.
Si le corps
gouverne entièrement seul, ce n'est là la preuve de l'existence du monisme.
Cela traduit plutôt des troubles
neurologiques : une personne souffrant de la maladie neuro-dégénérative de Parkinson est l'esclave de son corps.
À
l'opposé, si l'esprit seul gouverne, son unique terrain d'action entièrement indépendant par rapport au corps est le
domaine des idées.
Mais penser requiert le corps.
Il peut aussi y avoir des raisons médicales : une personne atteinte
de la maladie de Charcot est l'esclave de son esprit.
Problématique : Caractériser le rapport au corps comme un asservissement, cela décrit-il la domination néfaste du
corps indépendant de l'esprit, qui semble difficilement efficiente, ou au contraire traduit-il implicitement une haine
originaire du corps ?
1 – La tyrannie du corps reflète-t-elle une haine du corps ?.
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