Suis-je dans mon corps comme "un pilote en son navire" ?
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«
DIFFICULTÉS ET REMARQUES
Le sujet met en jeu une comparaison.
Cette comparaison porte sur mon rapport au corps.
La relation du sujet à son
corps serait semblable à celle du pilote à son navire.
Cette comparaison est une citation de Descartes (Méditations
métaphysiques) que l'on peut bien ne pas avoir identifiée pour traiter le sujet.
Cependant, une réflexion même
sommaire sur le sujet conduira à analyser les raisons du dualisme et à les discuter.
La difficulté du sujet réside donc
dans une juste compréhension et conceptualisation de la comparaison qu'il propose.
Les deux seules notions qui
doivent être prises au sens propre sont « je » et le « corps » : ce n'est pas tant en elles-mêmes qu'elles doivent
être définies et analysées que dans leurs rapports.
Il faut absolument éviter de consacrer une partie du devoir au
corps et une autre au «je», à l'âme ou au sujet.
Nous passerons néanmoins en revue les différentes notions qui se
trouvent impliquées dans la problématique du sujet, étant entendu que la comparaison renvoie à l'existence d'une
hiérarchie de l'âme sur le corps qui doit être soumis à sa juridiction et à sa volonté.
La conscience
Les relations de l'âme et du corps engagent la conscience : conscience de pouvoir agir sur lui et par lui, ou au
contraire conscience de le subir, de le souffrir.
Traditionnellement, l'âme est le principe qui donne vie, qui anime le
corps : elle est peut-être supérieure au corps, mais elle n'est pas dotée d'un pouvoir libre ci absolu.
Descartes
donne un tout autre sens A la notion d'âme : l'âme est pour lui cette substance pensante qui, comme toute
substance « n'a besoin que de soi-même pour exister».
Elle doit, par sa libre volonté, pouvoir exercer un pouvoir
absolu sur le corps (qui n'est qu'étendue) tout en étant totalement indépendante de lui.
La conscience, qui
accompagne toute pensée, manifeste et accompagne ce pouvoir libre et infini de l'âme sur le corps : elle assure le
commandement du corps comme le pilote dans son navire.
Au contraire, pour celui qui, comme Spinoza, affirme que
le corps est doté d'une puissance propre dont l'âme est la forme ou l'idée, la conscience surgit là où la puissance du
corps change de degré ou se trouve affectée.
La volonté, la liberté
Le point de vue dualiste suppose une toute puissance de la volonté et une absolue liberté du sujet pensant.
C'est
ce qu'affirme Descartes lorsqu'il met en doute, contre l'évidence sensible, l'existence même du corps du sujet
pensant (cf.
Méditations 1 et 2).
Les passions
Les passions sont l'expérience même qui devrait conduire les cartésiens à renoncer au dualisme : l'âme y subit
l'emprise du corps.
C'est justement pour cela que Descartes montre qu'on peut « acquérir un empire très absolu sur
toutes ses passions ».
Problématique: Alors que le capitaine d'un navire le commande sans lui être physiquement lié, mon esprit dépend
de mon corps, même s'il prétend s'en servir comme d'un instrument.
Dois-je dire que j'ai un corps, ou que je suis
mon corps? L'homme est-il d'abord chair ou esprit?
Que suis-je ? Même si l'on est immédiatement tenté de répondre que je suis tout simplement cette personne qui est
là, ce corps dont je vois le reflet dans un miroir, je n'aurai pas encore expliqué pourquoi je suis moi, ce corps-ci, et
pris un autre corps, par exemple celui de mon ami, qui se tient à côté de moi devant le miroir.
En vérité, c'est dans
mon esprit que je me saisis comme un moi : la conscience que j'ai de moi-même m'est d'abord donnée comme une
pensée.
Mais si je m'identifie toujours également à ce corps particulier, n'est-ce pas précisément par la puissance
qu'a mon esprit d'agir sur mon corps, de le faire se mouvoir ? Suis-je alors dans mon corps comme un pilote en son
navire » ? Cette métaphore permet-elle de penser avec pertinence l'union de l'âme et du corps
• L'expression entre guillemets est une citation très connue d'une oeuvre philosophique classique, ici donnée sans
référence.
Il s'agit des Méditations métaphysiques, VI, de Descartes.
La question que pose le sujet se présente sous la forme d'une analogie, c'est-à-dire un rapport unissant quatre
termes chacun deux à deux, comme dans le rapport mathématique a/b = c/d : le pilote est par rapport au navire ce
que l'esprit est par rapport au corps.
Si l'un des quatre termes (ici, l'esprit) est inconnu ou obscur, on peut arriver à
le connaître par analogie, en le rapportant aux trois autres termes, comme on résout l'équation mathématique en
appliquant la règle de trois : a = bc/d.
Cette analogie semble s'imposer tout naturellement, dès lors que l'homme se pense comme un esprit, essentiellement
actif; déposé dans un corps composé de matière, et comme tel essentiellement passif.
On appelle âme ce moi qui
est d'abord un esprit, lié au corps de manière accidentelle et peut-être passagère.
En effet, cette analogie semble
rendre compte de la spécificité de l'homme en tant qu'il est doué d'une intelligence active animant un corps passif.
Sans cet esprit, ce corps ne serait plus moi, mais un cadavre (ce que l'on appelle justement et simplement un corps,
et non plus un homme).
La métaphore du pilotage semble fournir une solution judicieuse aux problèmes du rapport que l'âme immatérielle
entretient avec le corps matériel.
Dans la philosophie platonicienne, comme dans la théologie chrétienne, l'âme/esprit, réalité séparée mais incarnée,
est conçue comme un être immortel, principe de vie et de mouvement.
Ainsi, dans Le Timée, Platon envisage, en ce
sens, le problème de la formation de l'âme et du corps de l'homme.
Les dieux « façonnèrent autour de l'âme un corps.
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