Suffit-il d'avoir bonne conscience pour agir moralement ?
Extrait du document
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Analyse du sujet
●
Le sujet pose ici une question fermée : il faudra, en conclusion, répondre affirmativement ou négativement.
Plus précisément, c'est un lien logique que le sujet interroge.
S'il suffit d'avoir bonne conscience pour agir
moralement, alors le fait d'avoir bonne conscience implique la moralité de l'action visée par la conscience.
Cette implication peut avoir des fondements formels (comme le serait, par exemple, un argument visant à
établir que seule une action morale peut permettre la bonne conscience) ou non (par exemple, montrer que
la bonne conscience a telles ou telles propriétés, permettant tels ou tels moments de l'action morale).
Dans cette analyse logique du sujet, la notion de suffisance soulève des difficultés supplémentaires.
A
première vue, la bonne conscience est introduite comme moment de l'action morale.
Cependant, le
présupposer reviendrait à formuler ainsi le sujet : avoir bonne conscience, est-ce assez pour agir
moralement? Une telle formulation, si elle ne doit pas être laissée de côté, envisage que la bonne conscience
soit corrélée à d'autres moments éventuels pour constituer l'action morale.
Mais, d'un point de vue logique,
une condition suffisante n'en est pas pour autant nécessaire.
En d'autres termes, il n'y a pas de
contradiction à répondre affirmativement à la question et à montrer que l'on peut agir moralement sans pour
autant avoir bonne conscience.
●
La dissertation ne devra donc pas seulement examiner les rapports entre une bonne conscience et une
action morale définies au préalable, mais tâcher de comprendre en retour comment leur éventuelle
coappartenance, au sein de l'action morale, les redéfinit.
Pour démarrer la réflexion, il faut cependant donner
une première esquisse de définition des deux termes du sujet, « avoir bonne conscience » et « agir
moralement ».
« Avoir bonne conscience » définit un état de la conscience.
Il se rapporte en premier lieu à la conscience
morale, qui juge en fonction du bien et du mal.
La bonne conscience est celle qui s'estime bonne.
Cependant,
loin de se cantonner à l'acte de jugement d'une telle conscience, le sujet suggère l'état durable, le viviers
psychologique dans lequel la conscience qui ne se reproche rien vit et s'accommode des actions entreprises
par le sujet.
Il faudra interroger la passivité d'une telle détermination.
De plus, c'est sous la forme d'une voix
nous parlant que l'on se représente souvent la conscience morale, il y a en elle une certaine extériorité par
rapport à nous et à la maxime de nos actions.
Enfin, l'entièreté de la bonne conscience pose problème.
Beaucoup de situations morales provoquent l'indécision, la difficulté à trancher.
La bonne conscience exclutelle le doute? Rien n'est moins sûr : on peut penser ne pas mal faire sans pour autant être sûr de faire le
meilleur choix.
Cette obscurité de la bonne conscience nous empêche d'en faire dès l'abord une notion
précisément morale : il arrive qu'on évite de se poser même la question de savoir si ce que l'on s'apprête à
faire est moral ou non justement parce qu'on a bonne conscience.
Avoir bonne conscience, ce n'est ainsi pas tant édicter un jugement positif de moralité que ne pas entendre
la voix qui juge et reproche.
Cette voix, se manifeste de plus depuis un ailleurs relatif, qu'il faudra interroger.
Il faudra être très prudent avec le groupe « agir moralement ».
Il ne s'agit pas, ou, du moins, on ne peut le
présupposer avec évidence, d'un équivalent de la forme substantivée que serait l'action morale.
L'adverbe
donne ici une couleur de l'agir, une de ses propriétés possibles.
C'est encore le sujet entier, et non
seulement le sujet moral, qui est en question.
Il faudra donc chercher à fonder et décrire au cours de la
dissertation ce que c'est qu'agir moralement.
Comme point de départ, on peut dire qu'agir moralement, c'est
agir en conformité avec la morale, selon le Bien.
Problématisation du sujet
●
Le sujet prend à contre-pied les opinions reçues : à première vue, une bonne conscience est quelque
chose que l'on peut fort bien se donner et qui, surtout, se manifeste de manière très variable selon les
individus : du cynique au scrupuleux, la bonne conscience semble bien trop multiple et arrangeante pour
fonder un agir moral.
Bien plus, on peut être enclin à penser que les criminels sont justement ceux-là qui, peu
tourmentés par leur conscience morale, n'ont pas à s'embarrasser pour commettre leurs forfaits.
L'expression
de remords peut entraîner, au tribunal, des remises de peine, et non la revendication insolente de sa bonne
conscience pour soi.
Si au contraire la bonne conscience peut être, comme le suggère le sujet, un symptôme de moralité, c'est
que, malgré son aspect infinitif, universel, la question doit être posée en première personne.
C'est le moment
de la décision et de l'action, au sein de la conscience, que le sujet scrute.
Il ne s'agit pas d'interroger aprèscoup, de l'extérieur, la bonne conscience, mais d'en écouter la voix propre au sein d'un agent,
éventuellement tiraillé.
●
Revenons à présent à la notion de suffisance.
Compris comme un est-ce assez ? le suffit-il ? interroge le
rapport du sujet à ses actions : le sujet possède des connaissances, en particulier un savoir éthique, et des
intentions.
Or, on peut savoir qu'en général telle action est mauvaise, mais se dire que pour nous, dans ce
cas, elle ne l'est pas : c'est justement avoir bonne conscience.
La situation, les intentions, le projet d'action.
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