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Spinoza - Politique

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S'il était aussi facile de commander aux esprits qu'aux langues, aucun gouvernement ne se trouverait jamais en péril et aucune autorité n'aurait besoin de s'exercer par des moyens violents. Car les sujets orienteraient tous leur vie selon le bon plaisir des gouvernants et nul ne porterait jamais de jugement sur le vrai et le faux, ni sur le juste et l'injuste, que conformément au vouloir de ceux-ci. Mais [...] les choses sont bien loin de se passer de la sorte, car jamais l'esprit d'un homme ne saurait tomber sous l'absolue dépendance de qui que ce soit. Nul ne saurait, de son propre chef, non plus que contraint, transférer à qui que ce soit la totalité de son droit naturel, ni son aptitude à raisonner et juger librement en toute circonstance. Par suite, une autorité politique qui prétend s'exercer jusque sur les esprits est qualifiée de violente; une majesté souveraine, d'autre part, commet une violation de droit et se rend coupable d'usurpation à l'égard de ses sujets, quand elle tente de leur imposer les notions qu'il leur faudra accepter pour vraies ou rejeter pour fausses, ainsi que les croyances dont devra s'inspirer leur vénération pour Dieu. En effet, tout homme jouit d'une pleine indépendance en matière de pensée et de croyance ; jamais, fût-ce de bon gré, il ne saurait aliéner ce droit individuel. SPINOZA

« S'il était aussi facile de commander aux esprits qu'aux langues, aucun gouvernement ne se trouverait jamais en péril et aucune autorité n'aurait besoin de s'exercer par des moyens violents.

Car les sujets orienteraient tous leur vie selon le bon plaisir des gouvernants et nul ne porterait jamais de jugement sur le vrai et le faux, ni sur le juste et l'injuste, que conformément au vouloir de ceux-ci.

Mais [...] les choses sont bien loin de se passer de la sorte, car jamais l'esprit d'un homme ne saurait tomber sous l'absolue dépendance de qui que ce soit.

Nul ne saurait, de son propre chef, non plus que contraint, transférer à qui que ce soit la totalité de son droit naturel, ni son aptitude à raisonner et juger librement en toute circonstance.

Par suite, une autorité politique qui prétend s'exercer jusque sur les esprits est qualifiée de violente; une majesté souveraine, d'autre part, commet une violation de droit et se rend coupable d'usurpation à l'égard de ses sujets, quand elle tente de leur imposer les notions qu'il leur faudra accepter pour vraies ou rejeter pour fausses, ainsi que les croyances dont devra s'inspirer leur vénération pour Dieu.

En effet, tout homme jouit d'une pleine indépendance en matière de pensée et de croyance ; jamais, fût-ce de bon gré, il ne saurait aliéner ce droit individuel.

SPINOZA QUESTIONS 1.

Dégagez l'idée principale de ce texte et les étapes de son argumentation. 2.

a.

Quelle différence faites-vous entre « commander aux esprits » et commander « aux langues » ? b.

Expliquez : « Nul ne saurait, de son propre chef non plus que contraint, transférer à qui que ce soit la totalité de son droit naturel, ni son aptitude à raisonner et juger librement en toute circonstance ». c.

Expliquez : « Une autorité qui prétend s'exercer jusque sur les esprits est qualifiée de violente ». 3.

L'autorité politique peut-elle limiter la liberté de pensée ? QUESTION 1 • La dernière phrase du texte : « En effet, tout homme jouit d'une pleine indépendance en matière de pensée et de croyance ; jamais, fût-ce de bon gré, il ne saurait aliéner ce droit naturel », résume la thèse défendue par Spinoza. Pour lui, la liberté de penser et d'exprimer son opinion est sans limites si elle est fondée sur la raison.

Comment procède-t-il pour démontrer sa thèse ? • Tout d'abord, il s'interroge sur la possibilité de diriger aussi bien les paroles que les pensées des hommes.

Il déduit rapidement que cela est impossible puisque, par essence, par nature, l'homme est un être de raison.

La nature même de l'homme l'oblige à raisonner, à penser.

L'homme peut renoncer, par choix ou par contrainte, à son droit d'agir, il ne peut jamais renoncer à son droit naturel qu'est la pensée, et de ce fait il ne peut non plus céder sa liberté de penser et de s'exprimer.

Aucune autorité politique ne parviendra jamais à déposséder l'homme de ce qui le fait homme : elle peut le manipuler, l'assujettir, le violenter, rien n'ôtera à l'homme son essence rationnelle.

La puissance de l'autorité politique ne s'exerce pas au-delà de sa puissance à se faire obéir.

Elle est impuissante à changer la nature de l'homme. QUESTION 2 a.

Quelle différence faites-vous entre « commander aux esprits » et commander « aux langues » ? On peut toujours mentir, proférer des paroles auxquelles on n'adhère pas, pour ne pas être inquiété, pour sauver sa vie, comme le fit Galilée lorsqu'il finit par dire que la terre ne tournait pas, ou comme le font des hommes soumis à la torture.

Mais il est beaucoup plus difficile de contrôler les pensées.

Connaître les pensées est impossible. Bien sûr, on peut manipuler les hommes en leur imposant une seule vision du monde, les laisser dans l'ignorance : par exemple, dans les dictatures, on interdit, voire on brûle les livres, et le nombre d'analphabètes est considérable.

Pour Spinoza, il en est de même pour la religion qui encourage la superstition, la croyance aux miracles, au lieu de faire appel à la raison et d'élever l'homme à la véritable connaissance. b.

Expliquez: « Nul ne saurait, de son propre chef, non plus que contraint, transférer à qui que ce soit la totalité de son droit naturel, ni son aptitude à raisonner et juger librement en toute circonstance » Personne ne peut céder à un autre son droit naturel, sa nature raisonnable.

L'individu qui obéit par choix, par contrainte, par indifférence, à l'autorité politique, qui est donc en partie dessaisi de sa liberté d'action, conserve néanmoins intégralement sa liberté de penser et de s'exprimer. Personne ne peut transmettre sa raison à un autre, à une autorité politique, sans se déposséder de sa qualité d'homme.

La liberté de penser est incoercible, et de ce fait hors de portée de l'autorité politique, quelle qu'elle soit. c.

Expliquez: « Une autorité qui prétend s'exercer jusque sur les esprits est qualifiée de violente » Une autorité politique qui obligerait les hommes à se conformer, en paroles du moins, à tous les décrets – en fait, qui obligerait les hommes à émettre les mêmes opinions, comme dans une dictature – irait vite vers le chaos.

Mais si en plus cette autorité refusait le droit de penser, elle ne pourrait le faire que sous le règne d'une violence extrême.

Les. »

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