Sigmund Freud: Le moi s'identifie-t-il à la conscience ?
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«
"L'hypothèse de l'inconscient est nécessaire parce que les données de la conscience sont extrêmement lacunaires : aussi bien chez
l'homme sain que chez le malade, il se produit fréquemment des actes psychiques qui, pour être expliqués, présupposent d'autres
actes qui, eux, ne bénéficient pas du témoignage de la conscience.
Ces actes ne sont pas seulement les actes manqués et les
rêves, chez l'homme sain, et tout ce qu'on appelle symptômes psychiques et phénomènes compulsionnels chez le malade, [...]
notre expérience quotidienne la plus personnelle nous met en présence d'idées qui nous viennent sans que nous en connaissions
l'origine et de résultats de pensée,,.
dont l'élaboration nous est demeurée cachée.
Tous ces actes conscients demeurent
incohérents et incompréhensibles si nous nous obstinons à prétendre qu'il faut bien percevoir par la conscience tout ce qui se
passe en nous en fait d'actes psychiques : mais ils s'ordonnent dans un ensemble dont on peut montrer la cohérence, si nous
interpolons les actes inconscients inférés."
Sigmund Freud, Métapsychologie (1915), trad.
Laplanche, Pontalis, Gallimard
Ce que défend ce texte:
Freud a cependant déjà eu l'occasion de présenter divers «signes» indirects de l'inconscient dans son oeuvre : les lapsus, les
actes manqués et les rêves qui traduisent, selon lui, des désirs refoulés.
Ces désirs sont devenus inconscients précisément parce qu'ils ont été rejetés hors de la conscience et réapparaissent sous une forme déguisée dans le
rêve, alors que leur expression triomphe directement dans «l'erreur » apparente que constitue le lapsus ou l'acte manqué.
Freud ne veut pas revenir ici sur ces exemples qui ont donné matière à critique.
En effet, le reproche lui a été fait d'avoir donné trop d'importance à des faits
en réalité anodins et absurdes, dus souvent à la simple fatigue.
A insi, lorsque nous commettons un lapsus et que nous disons un mot à la place d'un autre,
devons-nous réellement prêter attention à cette erreur si commune ? La même question se pose pour les actes manqués, ces actions que l'on rate
systématiquement.
La psychanalyse n'a-t-elle pas cherché à introduire du sens là où il n'y en avait pas, en particulier parmi l'incohérence manifeste de la
plupart de nos rêves ? Enfin les interprétations que l'on peut donner de ces prétendues expressions de l'inconscient ne sont-elles pas toujours abusives,
impossibles à vérifier comme à réfuter?
Freud ne parlera donc pas ici de ces phénomènes ordinaires, pas plus qu'il n'évoquera les symptômes névrotiques pour lesquels il a adopté la même
interprétation générale (expression déguisée d'un désir inconscient dont le trouble constitue précisément le déguisement) et ce, pour les mêmes raisons.
La
critique qui s'est abattue sur lui n'a pas manqué de l'accuser d'introduire du sens dans les symptômes, là où leur examen aurait dû, disait-on, se limiter à la
description du trouble.
Aussi c'est sous un autre angle que Freud aborde la nécessité de recourir à l'hypothèse de l'inconscient.
En dehors des faits précédents, nous dit-il, «aussi
bien chez l'homme sain que chez le malade, il se produit fréquemment des actes psychiques qui, pour être expliqués, présupposent d'autres actes, qui, eux,
ne bénéficient pas du témoignage de la conscience».
Nous admettons sans problème que nous pouvons tous avoir des idées qui nous viennent «sans que nous en connaissions l'origine» parce qu'elles sont, par
exemple, déterminées par des souvenirs ou des influences dont nous avons oublié la source.
Nous reconnaissons alors implicitement dans ce cas l'origine
inconsciente de ces idées sans crier au scandale d'avoir affirmé une telle origine.
Pourquoi alors résister à une telle hypothèse quand il s'agit de la formuler
pour expliquer l'origine et le sens des symptômes névrotiques ?
La reconnaissance en nous-mêmes du déterminisme psychique par lequel nous constatons que nous ne connaissons pas, dans bien des cas, tous les motifs
qui déterminent nos pensées, doit pouvoir aussi s'appliquer à ce que cherche à montrer la psychanalyse.
Seul en effet ce déterminisme est en mesure de
rendre raison de certaines de nos idées, de «certains résultats de pensée», comme nos opinions ou nos préjugés dont nous avons oublié la source
d'influence, et sans laquelle leur présence en nous demeurerait incompréhensible.
L'inconscient, en donnant du sens à ce qui semble inexpliqué et arbitraire, ordonne nos représentations dans un ensemble cohérent dont nos idées
conscientes, telles un iceberg, ne sont que la partie visible.
Ce à quoi s'oppose cet extrait:
Freud était un médecin autrichien qui s'est intéressé r dès la fin du siècle dernier au problème des névroses, ces troubles qui se signalaient par des
perturbations du comportement et par des symptômes qui résistaient à la médecine traditionnelle.
Les sujets atteints d'hystérie, en particulier, prétendaient souffrir de troubles (de l'alimentation, paralysies partielles, troubles de la vue, etc.) que les
médecins finissaient par considérer comme imaginaires, car on ne décelait à l'examen aucune lésion physique correspondant à ces souffrances.
Au lieu de les juger comme tels, Freud à la suite du médecin français Charcot, décida d'écouter ces malades et fit, pour expliquer la cause des névroses,
l'hypothèse de l'existence de l'inconscient.
Cette hypothèse se heurta très vite à de nombreuses difficultés théoriques et à l'hostilité quasi générale du
corps médical de son temps.
Comment pouvait-on affirmer l'existence de «quelque chose» (l'inconscient) auquel on ne pouvait, par définition, avoir accès ? C'est pour défendre
cette hypothèse et s'oppos er à s es détracteurs que Freud écrit i c i.
FREUD (Sigmund).
Né à Freiberg (Moravie), en 1856, mort à Londres en 1939.
Agrégé de neuropathologie en 1885, il suivit à Paris les cours de Charcot et s'intéressa à l'étude de l'hystérie.
Il fonda en 1 9 1 0 l'Association
Psychanalytique Internationale.
Il fit une série de cours aux États-Unis, devint professeur et, en 1920, professeur extraordinaire à l'Université de V ienne.
Il
dut quitter l'Autriche en 1938.
- L'apport incalculable de Freud à l'histoire de la pensée consiste dans la création de la psychanalyse, qui est à la fois une
psychothérapeutique, une « psychologie abyssale» exploratrice de l'inconscient et une théorie psychologique.
- Les composants psychiques de la
personnalité sont : le moi, le ça et le surmoi.
L'inconscient est un système structuré, qui se révèle par les rêves, les actes manqués.
Freud a insisté sur le
rôle de la sexualité dans les conflits de l'inconscient, les refoulements et les complexes.
Freud a eu l'immense mérite d'écarter« la dangereuse psychose de
la dissimulation ».
Oeuvres principales : Etudes sur l'hystérie (en coll.
avec Breuer, 1895), La science des rêves (1900), Psychopathologie de la vie quotidienne (1904), Trois
essais sur la théorie de la sexualité (1905), Totem et Tabou (1913), A u-delà du principe du plaisir (1920), Psychologie des masses et analyse du Moi
(1921), Le Moi et le Soi (1923), Inhibitions, symptômes et angoisses (1926), Le malaise de la civilisation (1930), Leçons d'introduction à la psychanalyse
(1932), Moïse et le monothéisme (1939)..
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