Si Dieu n'existait pas, tout serait-il permis?
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«
Corrigé envoyé par Laure Lauriston.
Corrigé désiré en échange: La matière pense-t-elle ?
[Introduction]
Dans la Bible, les lois, qu'elles soient morales ou de simples règles de droit, indiquent aux hommes leur devoir.
Elles
déterminent ce qu'ils peuvent faire et ce qui leur est défendu.
C'est Dieu lui-même qui les conçoit et les donne aux
hommes par l'intermédiaire des prophètes, scellant ainsi pour longtemps le sort de la morale à celui de la religion.
Pour autant, peut-on aller jusqu'à conclure que, «si Dieu n'existait pas, tout serait permis»? C'est ce que semble
croire le personnage d'un roman de Dostoïevski, Ivan Karamazov: « Pas d'immortalité de l'âme, donc pad de vertu,
ce qui veut dire que tout est permis.
»
Pour répondre à cette question, nous allons examiner le rapport de la morale et de la religion.
Les hommes sont-ils
capables d'eux-mêmes de se donner et de respecter des lois morales ? Le fondement de la morale doit-il être
transcendant ? Une morale purement terrestre, immanente, est-elle possible ?
[Partie I.
La morale comme loi divine.]
Dans la Bible, Dieu donne ses règles au peuple hébreu sur le mont Sinaï.
Ce sont des règles de droit, comme par
exemple : « Quand vous achèterez un serviteur hébreu, il sera serviteur pour six ans ; la septième année, il pourra
s'en aller librement...
» (Exode, 21).
Mais ce sont aussi, et surtout, des prescriptions morales, celles qui répondent à
la question « que dois-je faire ? » : les fameux : « Tu ne commettras pas de meurtre » ; « Tu ne commettras pas
d'adultère » ; « Tu ne commettras pas de vol » ; « Tu ne prononceras pas de faux témoignage contre ton prochain
» (Exode, 20, les Dix Commandements).
Le livre suivant, le Lévitique, poursuit renonciation des lois, fixant les devoirs et les interdits dans les conduites des
hommes, notamment en matière de sexualité.
Dieu n'est donc pas seulement le Créateur du monde et des hommes.
Il est surtout le Législateur, celui qui demande
aux hommes d'obéir à ses commandements.
Il promulgue prescriptions, devoirs et défenses.
Pour leur donner force
de loi, sa justice sanctionne le respect ou le non-respect de ses ordres.
Le Législateur est aussi le maître des
châtiments.
Ainsi, certaines fautes méritent la peine de mort.
« Celui qui frappe son père ou sa mère doit être mis à
mort » ; « Celui qui enlève une personne doit être mis à mort, qu 'il ait vendu sa victime ou qu 'on la trouve encore
chez lui.
» (Exode, 20.)
Le respect des lois morales est donc suspendu à la justice des hommes et à ses sanctions.
Mais derrière la justice
des hommes se profile celle de Dieu.
Dieu juge ; il punit et récompense.
La moralité dépend de Dieu comme de celui
qui détient les clés du salut.
[Partie II] La religion comme aliénation de la liberté humaine à devenir authentiquement morale
La moralité est donc suspendue, au début de l'ère historique de l'humanité, à la loi divine, par conséquent à Dieu.
Cela ressort nettement de l'Ancien Testament, et se retrouve dans la plupart des civilisations.
L'origine divine de la morale ne va pas sans poser des problèmes.
D'abord, que penser d'un homme qui n'obéirait aux
commandements divins que par crainte d'un châtiment ? Ne mérite vraiment d'être appelée morale que l'action qui
procède de soi, non celle que l'on accomplit sous la dépendance d'autrui ou d'autre chose.
Spinoza, lecteur et
commentateur de la Bible, écrit ceci :
« Qui fait le bien...
par connaissance vraie et amour du bien, agit librement et
d'une âme constante ; qui au contraire le fait par crainte du mal, agit
contraint par le mal qu'il redoute et, en esclave, vit sous le commandement
d'autrui.
» (Traité théologico-politique, chapitre 4).
La moralité véritable ne peut donc pas procéder de la seule crainte de faire le
mal ou de transgresser les interdits divins, encore moins de la seule peur du
châtiment.
D'autre part, tant que les hommes considèrent les prescriptions morales
comme de simples lois, ou commandements de Dieu (comme ceux que pourrait
donner un roi à ses sujets), ils ne comprennent pas la nécessité de les
observer, mais ne voient en elles que des contraintes pesantes qu'ils
s'empressent de transgresser.
Ainsi, faute de connaître toutes les
conséquences de son acte, et parce qu'il ne comprenait pas la parole de Dieu
mais ne voyait en elle qu'une loi, Adam a mangé le fruit en dépit de
l'interdiction divine.
Ainsi les Juifs, après l'interdiction faite par la bouche de
Moïse d'adorer tout autre que Dieu, adorèrent-ils une idole païenne.
Spinoza en conclut : « Dieu ne peut être qualifié de législateur, de prince, et
n'est appelé juste, miséricordieux, etc., que suivant la façon de comprendre
du vulgaire et par un défaut de connaissance.
» Ses décrets ne sont pas des
lois, mais des vérités éternelles que chacun peut comprendre par le seul secours de sa raison, comme la nécessité
d'aimer son prochain comme soi-même.
Le commentaire biblique de Spinoza nous apprend donc que la morale se distingue du droit : les règles de celui-ci
relèvent de la loi humaine, celle-là de la loi divine :
« Par loi humaine, j'entends une règle de vie servant seulement à la sécurité de la vie et de l'État ; par loi divine,.
»
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