s'en tenir aux faits, est-ce une garantie d'objectivité ?
Extrait du document
«
APPROCHE: Vous pouvez simplement partir ici de l'expression « s'en tenir aux faits ».
Quand on dit qu'on s'en
tient au fait, ceci signifie qu'on évite d'ajouter une quelconque interprétation de la réalité, qu'on se contente de
restituer ce qui s'est passé.
Ainsi, le juge qui ne s'en tient qu'aux faits est celui qui met de côté des convictions
personnelles et qui refuse également d'écouter les interprétations des autres.
Ainsi, une personne peut soutenir
qu'elle n'est pas coupable, si les faits parlent contre elle, on lui dira simplement qu'on s'en tient aux faits et que les
faits montrent sa culpabilité.
En ce sens, s'en tenir aux faits semble bien être une garantie d'objectivité puisque
l'objectivité se définit en premier lieu comme une forme d'impartialité.
On parlera ainsi d'objectivité lorsqu'une
description, un discours sont impartiaux c'est-à-dire indépendants des intérêts, convictions ou préjugés de ceux qui
les énoncent.
On parlera également d'objectivité pour qualifier le caractère de ce qui est indépendant de l'esprit
humain.
Or, s'en tenir aux faits c'est bien s'en tenir, semble-t-il à ce qui est extérieur à l'esprit, indépendant du
sujet.
Néanmoins, vous pouvez remarquer qu'une telle approche suppose une certaine conception du fait.
Comme
nous venons de l'indiquer, nous supposons ainsi et nous considérons spontanément que les faits sont extérieurs,
indépendants de l'esprit humain.
Or, une telle approche demande réflexion.
En effet, les faits ne sont-ils pas le
produit d'une construction de notre esprit, construction peut-être inconsciente, mais alors d'autant plus insidieuse
et discrète ? Après tout, de nombreux " faits " considérés d'un point de vue scientifique comme irréfutables révèlent
aujourd'hui leur insuffisance.
Pensez ici, par exemple, au travail de l'historien.
Reportez-vous également aux analyses
de Bachelard dans le champ de la connaissance scientifique lorsqu'il montre que « rien n'est donné, tout est
construit ».
Il s'attache ainsi à montrer que les faits sont l'objet d'une construction.
Dès lors, faut-il affirmer qu'il n'y
a pas d'objectivité possible ? Qu'est-ce qui peut garantir l'objectivité ?
DEVELOPPEMENT:
• L'objectivité est une exigence de la mentalité scientifique.
Elle est donc tardive, mais la diversité des disciplines
scientifiques oblige sans doute à la concevoir de manière multiple.
Si d'autre part les sciences prétendent rendre
compte des faits, à quelle réalité ces derniers correspondent-ils ? La science est-elle obligée de « s'en tenir aux
faits » sans rien leur ajouter — et cette attitude garantit-elle définitivement l'objectivité du savoir ?
• Très simplement, l'objectivité implique une différenciation (que ne réalise jamais, par exemple, la mentalité
magique) entre le sujet et l'objet, telle qu'elle se devine dès l'étymologie de ce dernier : il est ce qui est « devant »
ou « en face » d'un sujet, toute intimité entre eux étant supprimée.
L'objet cependant ne suffit pas à constituer un
fait.
Celui-ci suppose l'apparition d'une transformation quelconque de l'objet, sa relation efficace et constatable
avec d'autres objets et événements, qui le modifie (de ce point de vue, le fait apparaît comme l'héritier scientifique
du « mouvement » aristotélicien).
• On doit opérer une distinction (devenue très classique) entre le fait immédiat ou empirique — tel que nous le livre
la perception quotidienne — et le fait scientifique, tel qu'il est fructueusement observé.
Bachelard a notamment
montré comment le second, pour être repéré et productif d'une question nouvelle, doit être construit.
Bachelard a contribué à donner à l'épistémologie française ses lettres de noblesse, en
particulier en déclarant dès les premières pages de « La formation de l'esprit scientifique »
(1938) : « C'est en terme d'obstacle qu'il faut poser le problème de la connaissance scientifique.
»
Bachelard s ‘est battu contre deux idées fausses portant sur les sciences, répandues
dans le public.
D'une part, celle qui veut que le savant arrive pour ainsi dire l'esprit « vierge »
devant les phénomènes à étudier, d'autre part celle qui voit le développement des sciences comme
une simple accumulation de connaissance, un progrès linéaire.
En affirmant cette citation, il souhaite montrer les difficultés
inhérentes à l'acte même de connaître.
Les obstacles à une connaissance
scientifique ne viennent pas d'abord de la complexité des phénomènes à
étudier, mais des préjugés, des habitude de savoir, des héritages non
interrogés.
« Quand il se présente à la culture scientifique, l'esprit n'est
jamais jeune.
Il est même très vieux, car il a l'âge de ses préjugés.
»
La première bataille à livrer pour accéder à la connaissance scientifique est
donc une bataille contre soi-même, contre le sens commun auquel le savant
adhère spontanément.
C'est une bataille contre l'opinion : « L'opinion pense
mal, elle ne pense pas, elle traduit des besoins en connaissance.
» Ainsi les
travaux de Bachelard peuvent-ils être compris comme une « psychanalyse
de la connaissance ».
Mais il va plus loin : « En fait on connaît toujours contre une connaissance antérieure, en détruisant des
connaissances mal faites, en surmontant ce qui, dans l'esprit même fait obstacle à la spiritualisation.
»
Non seulement nous avons à nous défendre des préjugés communs, mais aussi des connaissances
scientifiques antérieures.
Bachelard a su se rendre très attentif aux périodes de crise et de révolution scientifique,
celles où l'on passe d'une théorie à une autre, d'un système à un autre, d'une méthode à une autre.
Si « La
Formation de l'esprit scientifique » est consacrée aux obstacles premiers et naturels de la connaissance
scientifique, « Le Nouvel Esprit Scientifique » s'interroge sur les révolutions scientifiques contemporaines.
La.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- S'en tenir aux faits est-ce une garantie d'objectivité?
- S'en tenir aux faits, est-ce une garantie suffisante d'objectivité ?
- La référence aux faits garantit-elle à elle seule l'objectivité de la connaissance scientifique?
- Les lois sont-elles une garantie pour notre liberté
- Sujet 1 : La culture peut-elle dénaturer l'homme ? Sujet 2 : Peut-on avoir raison contre les faits ?