S'affirmer soi-même revient-t-il nécessairement a dénigrer l'autre ?
Extrait du document
«
Définition et problématique :
Autrui semble s'opposer à moi dans mon affirmation dans le monde et dans la société.
Mais sommes-nous
vraiment en lutte permanente avec les autres pour s'affirmer ? N'est-il pas possible d'exister avec les autres, tout
en les acceptant ?
I – La distance indépassable entre autrui et moi
1) On n'atteint jamais l'autre
Pascal explique qu'on ne connaît ni n'aime le moi mais seulement ses qualités.
Ainsi, le moi qu'est autrui n'est
jamais vraiment connu par un autre que lui-même.
Pascal, Pensées, Fragment 323-688 :
« Qu'est-ce que le moi ?
Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants, si je passe par là, puis-je dire qu'il s'est mis là
pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier ; mais celui qui aime quelqu'un à cause de sa beauté,
l'aime-t-il ? Non : car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu'il ne l'aimera plus ? »
2) Exister, c'est s'affirmer contre et face à autrui
Pour Hegel, l'affirmation de chacun passe par l'opposition à autrui.
Hegel, Phénoménologie de l'Esprit :
« Ce qui pour elle [la conscience de soi] est autre chose, est, en
tant qu'objet inessentiel, marqué du caractère négatif.
Mais l'autre est aussi
une conscience de soi ; un individu se présente face à un autre individu.
Et
se présentant face à face ainsi immédiatement, ils sont l'un pour l'autre à la
manière d'objets communs ; figures, personnages autonomes, consciences
abîmées dans l'être de la vie – car c'est en tant que vie ici que l'objet qui est
s'est déterminé – qui n'ont pas encore accompli l'une pour l'autre le
mouvement de l'abstraction absolue, qui consiste à anéantir tout être
immédiat.
»
Qu'autrui existe semble être pour la pensée contemporaine une
évidence.
Pourtant, l'idée d'un isolement de la conscience a longtemps
persisté.
C ‘est, sans doute, parce que l'esprit des philosophes était obsédé
par le problème de la recherche de la vérité.
D'où l'opposition entre, d'un
côté, le sujet connaissant et, de l'autre, le monde à connaître.
Dans cette
confrontation, la présence d'un tiers, à l'exception de Dieu, était exclue.
Le thème de l'altérité apparaît chez Kant dans ses considérations sur
la moralité, mais surtout chez Hegel dans « La phénoménologie de
l'esprit ».
C'est dans cet ouvrage – où Hegel décrit le mouvement
dialectique de la conscience, depuis la naïveté première de la « certitude sensible » jusqu'à l'universalité du « savoir
absolu », ultime moment où la conscience prend conscience de sa liberté – que se trouve la fameuse dialectique du
maître & de l'esclave.
On peut y lire : « La conscience de soi est certaine de soi-même, seulement par la
suppression de cet Autre qui se présente à elle comme vie indépendante ; elle est désir.
»
La conscience, dans son rapport immédiat avec elle-même, n'est que l'identité vide du Je = Je, une
tautologie sans contenu.
Toute conscience rencontre autrui, l'Autre, une autre conscience de soi.
Il n'y a, en fait,
de véritable conscience de soi que moyennant le retour à soi à partir de cet « être-autre ».
Autrement dit, la
conscience de soi serait impossible dans un monde où autrui n'existerait pas.
Si la conscience est mouvement et retour à soi-même à partir de l'être autre, elle ne peut d'abord l'être que
par la négation de l'autre.
Autrement dit, la relation à autrui se présente d'emblée comme une affaire de conflit.
Le
« moi » de l'enfant, par exemple, ne se forme-t-il pas en s'opposant au non-moi ? N'est-ce pas dans l'opposition à
ses parents que l'enfant forge sa personnalité ? Toute conscience est désir de reconnaissance de soi et la
satisfaction de ce désir ne peut advenir que moyennant la suppression de l'autre, en tant qu'être indépendant.
Le premier mouvement du désir serait de détruire et de consommer l'objet.
mais, dans cette expérience, je
découvre que mon désir est conditionné par cet objet et que je suis donc dépendant de cet objet que j'avais,
pourtant nié : « Le désir et la certitude de soi atteinte dans la satisfaction du désir sont conditionnés par l'objet ;
en effet la satisfaction a lieu par la suppression de cet autre.
Pour que cette suppression soit, cet autre aussi doit
être.
»
Loin d'atteindre la satisfaction complète et définitive, je découvre que, la satisfaction obtenue, le désir.
»
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