ROUSSEAU: Le droit de propriété
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Texte exemplaire, extrait du Discours sur l'origine de l'inégalité (deuxième partie), dont les différents thèmes sont aisément saisissables et forment un tout cohérent. La thématique du texte est réglée, dans son fonctionnement, par une problématique très typique de l'opposition entre ce qui est « par nature » et ce qui est « par convention ». On s'attachera à montrer comment fonctionne la thématique du texte, et quelle problématique elle implique.
«
Le droit de propriété n'étant que de convention et d'institution humaine, tout homme peut à son
gré disposer de ce qu'il possède : mais il n'en est pas de même des dons essentiels de la
Nature, tels que la vie et la liberté, dont il est permis à chacun de jouir et dont il est au moins
douteux qu'on ait droit de se dépouiller : en s'ôtant l'une on dégrade son être ; en s'ôtant
l'autre on l'anéantit autant qu'il est en soi ; et comme nul bien temporel ne peut dédommager
de l'une et de l'autre, ce serait offenser à la fois la Nature et la raison que d'y renoncer à
quelque prix que ce fût.
Un texte très caractéristique concernant le fonctionnement conceptuel de l'opposition naturesociété.
Texte exemplaire, extrait du Discours sur l'origine de l'inégalité (deuxième partie), dont les différents thèmes
sont aisément saisissables et forment un tout cohérent.
La thématique du texte est réglée, dans son fonctionnement, par une problématique très typique de
l'opposition entre ce qui est « par nature » et ce qui est « par convention ».
On s'attachera à montrer comment fonctionne la
thématique du texte, et quelle problématique elle implique.
Analyse thématique succincte
• Distinction fondamentale entre ce qui est aliénable (le droit de propriété) et ce qui ne l'est pas (la vie, la liberté).
Aliénable : du latin alienus, « autre », « étranger ».
• Thématisation de cette distinction à travers l'opposition de ce qui est purement conventionnel et de ce qui tient à la nature essentielle
de l'homme.
• Développement du thème de l'inaliénabilité au niveau des conséquences distinctes de la perte d'un bien et de la perte de la vie ou de
la liberté.
• C aractère incommensurable de ce qui est essentiel à l'homme et de ce qui lui est extérieur (le « bien temporel »).
Caractérisation rapide de la problématique attestée par le passage étudié
On a donc une opposition centrale entre ce qui, venant de la nature, ne peut être dissocié de l'essence de l'homme, et ce qui, issu de la
société et de la convention, peut être aliéné sans dommage réel pour celle-ci.
Cette opposition permet de hiérarchiser des valeurs
(nature, société) et rend possible une double critique :
• critique de ceux qui font de la propriété un droit naturel ;
• critique du droit conçu comme codification de rapports de domination dans le cadre desquels des hommes, perdant leur liberté,
perdent leur qualité d'hommes ; les jugements présents dans le texte sont donc sous-tendus par une conception-référence de la nature
humaine.
L'enjeu du texte et sa portée (éléments de réflexion)
La critique du droit comme justification ou apologie d'un rapport de forces est ici particulièrement nette.
La relativisation de la propriété (donnée culturelle, conventionnelle) est assez originale dans le contexte de la philosophie des Lumières.
Rappelons par exemple, la controverse Rousseau-Voltaire à ce sujet.
Rousseau, inspirateur des références philosophiques de la Révolution française, ne semble pas cependant avoir totalement triomphé
dans la formulation des droits de l'homme et du citoyen, déclaration votée le 26 août 1789, dont il faut rappeler qu'elle ne stipule pas
pour la propriété les mêmes limites que pour la liberté (article 4 : La liberté consiste à pouvoir faire ce qui ne nuit pas à autrui ; article
17 : La propriété est inviolable).
C'est Robespierre qui, dans la critique qu'il fera de cette Déclaration des droits de l'homme, apparaît
comme étant dans le droit-fil de la pensée de Rousseau : « En définissant la liberté, le premier des biens de l'homme, le plus sacré des
droits qu'il tient de la nature, vous avez dit avec raison qu'elle avait pour bornes le droit d'autrui ; pourquoi n'avez-vous pas appliqué
ce principe à la propriété, qui est une institution sociale ? Comme si les lois éternelles de la nature étaient moins inviolables que les
conventions des hommes [...] » (Robespierre, discours du 24 avril 1793.)
ROUSSEAU (Jean-Jacques).
Né à Genève en 1712, mort à Ermenonville en 1778.
Il n'est pas dans notre propos de résumer la vie de Rousseau, sou séjour aux Charmettes chez Mme de Warens, à Montmorency chez
Mme d'Épinay, ses travaux de musique, sa persécution par les catholiques comme par les protestants, son voyage en Angleterre après
sa fuite de Suisse ou l'hospitalité du marquis de Girardin à Ermenonville.
Non plus que la mise à l'Assistance Publique des cinq enfants
qu'il eut de Thérèse Levasseur, ou sa brouille avec Grimm et Diderot.
Jean-Jacques Rousseau fut seul, chassé de partout, et c'est en
méditant sur son existence malheureuse, qu'il a pu énoncer sa doctrine de philosophe.
Sa philosophie n'est pas un système, mais une
vision de la condition humaine.
— C ontrairement aux Encyclopédistes, l'homme, pour Rousseau, est naturellement bon et juste.
Il fut
heureux lorsqu'il vivait sans réfléchir, au milieu de la nature, uniquement préoccupé des soins matériels de la vie quotidienne.
Puis, il a
cherché à paraître, à dominer.
Il a inventé la propriété.
Sont venus l'inquiétude d'esprit, le goût du luxe, l'ambition, l'inégalité, les vices,
la philosophie.
La société a corrompu l'homme, en l'élevant à la moralité.
La vie idéale n'est pas le retour à l'état de nature ; mais elle
doit se rapprocher le plus possible de la vie naturelle.
C'est le coeur qui fournit à l'homme la preuve des vérités morales et religieuses,
qui lui permet de goûter aux plaisirs de la générosité, de la bienfaisance, de l'amitié.
L'enfant, naturellement bon, doit être éduqué de
façon« négative».
Il faut laisser libre cours à son propre développement.
Rousseau prône les vertus de l'intuition et de l'émotion.
— Le
fondement de toute société, c'est le contrat social, par lequel chaque contractant renonce à sa propre liberté au profit de la
communauté, et se soumet à la volonté générale.
Rousseau pose ainsi le principe de la souveraineté populaire.
Tant en littérature
qu'en philosophie ou en politique (la Révolution française le revendiqua), l'influence de Rousseau fut considérable.
Il a véritablement
transformé la sensibilité humaine..
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