Récrivez la scène décrite par Marivaux sous la forme d'un récit évoquant l'accident arrivé à Marianne. Ce récit sera fait par un narrateur qui a été témoin de la scène qui s'est déroulée. Il devra comprendre au moins une description et un dialogue. (Mari
Extrait du document
« J'étais si rêveuse, que je n'entendis pas le bruit d'un carrosse qui venait derrière moi, et
qui allait me renverser, et dont le cocher s'enrouait à me crier : Gare ! Son dernier cri me tira de ma rêverie ; mais le danger où je me vis m'étourdit si fort que je tombai en voulant fuir, et me blessai le pied en tombant. Les chevaux n'avaient plus qu'un pas à faire pour marcher sur moi : cela alarma tout le monde, on se mit à crier ; mais celui qui cria le plus fut le maître de cet équipage, qui en sortit aussitôt, et qui vint à moi : j'étais encore à terre, d'où malgré mes efforts je n'avais pu me relever. On me releva pourtant, ou plutôt on m'enleva, car on vit bien qu'il m'était impossible de me soutenir. Mais jugez de mon étonnement, quand, parmi ceux qui s'empressaient à me secourir, je reconnus le jeune homme que j'avais laissé à l'église. C'était à lui à qui appartenait le carrosse, sa maison n'était qu'à deux pas plus loin, et ce fut où il voulut qu'on me transportât. Je ne vous dis point avec quel air d'inquiétude il s'y prit, ni combien il parut touché de mon accident. À travers le chagrin qu'il en marqua, je démêlai pourtant que le sort ne l'avait pas tant désobligé en m'arrêtant. Prenez bien garde à mademoiselle, disait-il à ceux qui me tenaient ; portez-la doucement, ne vous pressez point ; car dans ce moment ce ne fut point à moi à qui il parla. Il me sembla qu'il s'en abstenait à cause de mon état et des circonstances, et qu'il ne se permettait d'être tendre que dans ses soins. De mon côte, je parlai aux autres, et ne lui dis rien non plus ; je n'osais même le regarder, ce qui faisait que j'en mourais d'envie : aussi le regardais-je, toujours en n'osant, et je ne sais ce que mes yeux lui dirent ; mais les siens me firent une réponse si tendre qu'il fallait que les miens l'eussent méritée. Cela me fit rougir, et me remua le cœur à un point qu'à peine m'aperçus-je de ce que je devenais. Je n'ai de ma vie été si agitée. Je ne saurais vous définir ce que je sentais. C'était un mélange de trouble, de plaisir et de peur ; oui, de peur, car une fille qui en est là-dessus à son apprentissage ne sait point où tout cela la mène : ce sont des mouvements inconnus qui l'enveloppent, qui disposent d'elle, qu'elle ne possède point, qui la possèdent ; et la nouveauté de cet état l'alarme. Il est vrai qu'elle y trouve du plaisir, mais c'est un plaisir fait comme un danger, sa pudeur même en est effrayée ; il y a là quelque chose qui la menace, qui l'étourdit, et qui prend déjà sur elle. On se demanderait volontiers dans ces instants-là : que vais-je devenir ? Car, en vérité, l'amour ne nous trompe point : dès qu'il se montre, il nous dit ce qu'il est, et de quoi il sera question ; l'âme, avec lui, sent la présence d'un maître qui la flatte, mais avec une autorité déclarée qui ne la consulte pas, et qui lui laisse hardiment les soupçons de son esclavage futur. Voilà ce qui m'a semblé de l'état où j'étais, et je pense aussi que c'est l'histoire de toutes les jeunes personnes de mon âge en pareil cas. Les deux jeunes gens se sont vus pour la première fois dans l’église, quelques instants auparavant. C’est-à-dire : Je compris pourtant qu’en provoquant notre rencontre le sort ne lui avait pas paru si défavorable.
Marivaux, La Vie de Marianne (1731-1742)
«
Récrivez la scène décrite par Marivaux sous la forme d'un récit évoquant l'accident arrivé à Marianne.
Ce récit sera fait par un narrateur qui a été témoin de
la scène qui s'est déroulée.
Il devra comprendre au moins une description et un dialogue.
(Marivaux, La Vie de Marianne, IIe partie (1731-1742)
« J'étais si rêveuse, que je n'entendis pas le bruit d'un carrosse qui venait derrière moi, et
qui allait me renverser, et dont le cocher s'enrouait à me crier : Gare ! Son dernier cri me tira de ma rêverie ; mais le danger où je me vis m'étourdit si fort que je
tombai en voulant fuir, et me blessai le pied en tombant.
Les chevaux n'avaient plus qu'un pas à faire pour marcher sur moi : cela alarma tout le monde, on se mit à
crier ; mais celui qui cria le plus fut le maître de cet équipage, qui en sortit aussitôt, et qui vint à moi : j'étais encore à terre, d'où malgré mes efforts je n'avais pu me
relever.
On me releva pourtant, ou plutôt on m'enleva, car on vit bien qu'il m'était impossible de me soutenir.
Mais jugez de mon étonnement, quand, parmi ceux qui
s'empressaient à me secourir, je reconnus le jeune homme que j'avais laissé à l'église.
C'était à lui à qui appartenait le carrosse, sa maison n'était qu'à deux pas plus
loin, et ce fut où il voulut qu'on me transportât.
Je ne vous dis point avec quel air d'inquiétude il s'y prit, ni combien il parut touché de mon accident.
À travers le
chagrin qu'il en marqua, je démêlai pourtant que le sort ne l'avait pas tant désobligé en m'arrêtant.
Prenez bien garde à mademoiselle, disait-il à ceux qui me tenaient ;
portez-la doucement, ne vous pressez point ; car dans ce moment ce ne fut point à moi à qui il parla.
Il me sembla qu'il s'en abstenait à cause de mon état et des
circonstances, et qu'il ne se permettait d'être tendre que dans ses soins.
De mon côte, je parlai aux autres, et ne lui dis rien non plus ; je n'osais même le regarder, ce
qui faisait que j'en mourais d'envie : aussi le regardais-je, toujours en n'osant, et je ne sais ce que mes yeux lui dirent ; mais les siens me firent une réponse si
tendre qu'il fallait que les miens l'eussent méritée.
Cela me fit rougir, et me remua le cœur à un point qu'à peine m'aperçus-je de ce que je devenais.
Je n'ai de ma vie
été si agitée.
Je ne saurais vous définir ce que je sentais.
C'était un mélange de trouble, de plaisir et de peur ; oui, de peur, car une fille qui en est là-dessus à son
apprentissage ne sait point où tout cela la mène : ce sont des mouvements inconnus qui l'enveloppent, qui disposent d'elle, qu'elle ne possède point, qui la
possèdent ; et la nouveauté de cet état l'alarme.
Il est vrai qu'elle y trouve du plaisir, mais c'est un plaisir fait comme un danger, sa pudeur même en est effrayée ; il
y a là quelque chose qui la menace, qui l'étourdit, et qui prend déjà sur elle.
On se demanderait volontiers dans ces instants-là : que vais-je devenir ? Car, en vérité,
l'amour ne nous trompe point : dès qu'il se montre, il nous dit ce qu'il est, et de quoi il sera question ; l'âme, avec lui, sent la présence d'un maître qui la flatte, mais
avec une autorité déclarée qui ne la consulte pas, et qui lui laisse hardiment les soupçons de son esclavage futur.
Voilà ce qui m'a semblé de l'état où j'étais, et je
pense aussi que c'est l'histoire de toutes les jeunes personnes de mon âge en pareil cas.
Les deux jeunes gens se sont vus pour la première fois dans l'église,
quelques instants auparavant.
C'est-à-dire : Je compris pourtant qu'en provoquant notre rencontre le sort ne lui avait pas paru si défavorable.
Marivaux, La Vie de Marianne (1731-1742)
« Je sortais de l'église lorsque je fus témoin de l'évènement du monde le plus effrayant et le plus tendre : vous jugerez par vous-même s'il n'est pas digne de
retenir votre attention.
Son principal acteur était une jeune femme dont la beauté remarquable m'avait frappé durant l'office.
Un air de noblesse répandu sur
ses traits, un maintien décent, une pudeur délicieuse dans chacun de ses gestes m'avaient surpris d'abord ; la modestie de son équipage et l'absence de
servante pour l'accompagner avaient éveillé ma curiosité ensuite.
Je ne la quittai guère des yeux tout le temps de la messe, observant avec délice une
physionomie délicieuse dont les principaux ornements étaient des yeux d'un brun profond et des lèvres menues.
J'aurais bien voulu faire plus ample
connaissance avec la détentrice de tous ces charmes : voilà pourquoi je la suivis des yeux, puis de toute la vélocité de mes jambes, lorsqu'il fut temps de
quitter le lieu sacré.
Seule, avec sur le visage une expression de tristesse, elle emprunta la rue où se pressaient les équipages aristocratiques et les
charriots populaires.
Les réflexions qui agitaient son esprit formaient comme un écran entre elle et le reste du monde : voilà pourquoi elle n'entendit pas le
carrosse qui venait derrière elle, en dépit des cris répétés du cocher.
Je joignis mon appel au sien en voyant le danger que la demoiselle courait; mais il fut
inutile pour détourner le désastre qui la menaçait.
À la dernière seconde, lorsqu'il n'était déjà plus temps de se mettre à l'abri, la jeune femme remarqua
enfin le carrosse qui s'apprêtait à la renverser : elle poussa un cri, tenta de se ranger sur le côté, mais en vain.
Je fermai les yeux pour ne pas voir le
malheur épouvantable qui allait se produire ; quand je les rouvris, la jeune femme gisait à terre, étourdie, incapable de se relever seule.
Je lui aurais
volontiers prêté mon secours, si une foule de passants alertés par les cris ne s'étaient amassés pour contempler la scène ; jusqu'à la fin, je dus me
contenter du rôle de spectateur.
Le cocher sauta à terre pour assister sa victime ; d'un air confus et le visage rougissant, elle le remercia le plus civilement
du monde en protestant qu'elle était indemne.
Son amabilité échauffa mon désir de faire sa connaissance, quand je dus reconnaitre au trouble qu'elle
manifesta que j'avais un rival.
De fort bonne mine, élégant comme seuls les gens de naissance peuvent l'être, un jeune homme s'élança hors du carrosse et
donna des ordres pour que l'on prenne soin de sa malheureuse victime.
Celle-ci n'osait le regarder, et j'en conclus à mon grand déplaisir qu'elle n'était pas
insensible à ses attraits.
Elle répondit de son mieux aux questions du cocher qui s'assurait qu'elle n'avait à se plaindre d'aucune fracture :
-
Êtes vous bien sure de ne pas avoir de membre brisé, mademoiselle ?
-
J'en suis certaine, tout va pour le mieux, je vous sais gré de votre sollicitude.
-
Sans doute mon maître peut vous venir en aide : ne désirez-vous pas l'assistance d'un médecin ?
-
Cela serait parfaitement inutile, je n'ai à me plaindre que d'une frayeur dont les effets se dissiperont bientôt, dès lors que je serai chez moi où j'aspire à
me rendre au plus tôt.
-
J'entends mon maître qui veut pourtant vous mener chez lui afin de vous prodiguer tous les soins que votre état exige.
Accepteriez-vous de le suivre dans
son hôtel particulier qui n'est qu'à trois rues d'ici ?
L'objet de mes vœux et son soupirant étaient dans un trouble qui me charma en dépit du léger chagrin que me donnait la jalousie : ils n'osaient se parler
sans intermédiaire et se servaient du pauvre cocher comme d'un interprète pour leurs sentiments délicats.
Je ne pus que me rendre à l'évidence : le sort ne
les avaient pas désobligés en provoquant leur rencontre, et je vis bien que la jeune fille montait de bonne grâce dans le carrosse pour recevoir des soins qui
seraient plus doux à son cœur qu'indispensables à son corps.
En m'éloignant du lieu de cette scène surprenante, je me répétai à moi-même le mot célèbre
de Marc A urèle « Considère l'alternative : ou bien la Providence, ou bien les atomes ».
Je jugeai que la P rovidence ne m'avait guère favorisée, que le hasard
faisait bien les choses pour ces deux jeunes gens, et qu'il me rendrait un service aussi recommandable un autre jour »..
»
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