Reconnaître l'existence de l'inconscient, est-ce élargir notre conscience ?
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Introduction
Depuis la naissance de la psychanalyse, on a coutume d'opposer la conscience à l'obscurité de l'inconscience.
L'hypothèse de l'inconscient semble ainsi marquer le rétrécissement du domaine réservé à la conscience.
Mais faut-il
concevoir la relation entre le conscient et l'inconscient sur le mode de l'exclusion ? Et si non, faut-il en conclure que
la conscience se voit élargie par la reconnaissance de l'inconscient, voyant son domaine s'étendre ? Ou au
contraire, celui-ci se réduit-il, le mode d'être de la conscience pouvant s'avérer n'être finalement qu'une illusion ?
I La conscience comme dérivée de l'inconscient : réduction de son influence, Freud et Nietzsche
-Freud : la conscience s'expérimente spontanément comme libre ; mais le moi conscient normal procède en fait
d'une confrontation entre le fond pulsionnel du ça et l'instance morale du surmoi, qui permet au sujet d'intérioriser
les normes de la société (Le ça et le moi).
L'origine de la conscience est donc en partie au moins déterminée ; il
n'empêche que cette genèse psychologique du moi aboutit à un sentiment positif de liberté, qui recouvre l'influence
déterminante du surmoi.
Pour Freud, la conscience, ressentie comme libre, ne peut donc que voir son rôle fortement
relativisé face à l'influence du surmoi et au fondement pulsionnel du ça.
-Nietzsche : la conscience n'est qu'un effet de surface comparé aux volontés inconscientes qui constituent nos
comportements quotidiens.
La conscience est le résultat émergeant du jeu de ces volontés (Le gai savoir) : elle
apparaît donc comme résolument secondaire, voire même superflue selon le jugement de Nietzsche, sa relativité
pouvant aller alors jusqu'à une possible absence.
Cependant, Nietzsche remet également en cause la distinction
conscience/inconscience, en intégrant la conscience aux processus dynamiques inconscients (elle y est alors
absorbée).
II Inclusion de l'inconscience dans la conscience ? Descartes et Spinoza
-Descartes : si l'inconscience menace l'influence de la conscience, il faut admettre cette menace et rechercher les
moyens conscients de la contenir.
C'est ce que tente Descartes dans le Discours de la méthode : l'inconscience
doit atteindre la conscience comme possibilité, sous la forme du doute.
Le doute, c'est cette hypothèse que je me
soumets à moi-même, en me demandant si le contenu de mes pensées conscientes ne proviendrait pas finalement
de préjugés inconscients, solidement ancrés en moi.
Reconnaître l'existence d'un inconscient (ici les préjugés), c'est
donc rendre possible le maintien d'un rôle décisif de la conscience.
-Spinoza va plus loin : reconnaître l'existence de l'inconscient, c'est permettre d'élargir notre conscience, en la
sortant des illusions du sentiment pour atteindre un savoir rationnel.
Ce savoir ne peut être que celui des causes qui
nous déterminent, demeurant le plus souvent inconscientes.
Soumettre ces causes à l'examen de notre
entendement, c'est les faire quitter le registre inconscient pour les intégrer à notre conscience, sans supprimer leur
action de détermination.
Pour Spinoza, l'inconscient est réductible en droit, ce qui fait que le reconnaître dans son
existence, c'est permettre à la conscience de regagner du terrain.
III Inclusion de la conscience dans l'inconscience : au-delà de l'exclusion réciproque, Nietzsche encore et
Bergson
-Nietzsche : si Descartes et Spinoza tentent chacun de leur façon de concilier conscience et inconscience, ses
efforts n'empêchent pas la présence d'une logique d'opposition.
Nietzsche remet cela en cause en montrant que la
conscience n'est pas réservée à l'esprit réflexif : le corps également représente une conscience plus fondamentale,
ce que Nietzsche nomme la « raison du corps » (Par-delà bien et mal).
La conscience correctement conçue ne doit
pas s'opposer à l'inconscience : elle est simplement une différence de degré dans l'expression de la volonté de
puissance pour Nietzsche.
Reconnaître l'existence de l'inconscient permet donc d'étendre le domaine de la
conscience å l'ensemble des procédés d'affirmation de la puissance de vie, que lq conscience doit venir réactualiser.
-Bergson : différence de degrés entre conscience et inconscience.
La conscience est uniquement un moyen de
relancer la dynamique de l'inconscient, ce qui vient confirmer l'intuition de Nietzsche.
La conscience apparaît donc
comme ce moyen d'influer sur l'ensemble de la série des états inconscients de l'homme, et de les réactualiser en un
nouveau sens.
La conscience se voit rétrécie par sa nature même de ponctualité, de « contraction » (terme d
Bergson), mais son influence s'étend å tout l'inconscient.
Conclusion
-L'inconscient par son existence vient remettre en cause l'hégémonie de la conscience, dont le domaine objectif se
voit réduit.
-La conscience semble même menacée d'insignifiance, en tout cas d'une localisation minimale, la rendant
marginale, modeste face å l'omniprésence de l'inconscient.
-Cependant, on se rend compte que l'inconscient n'est qu'une forme en devenir de la conscience, qui par son
surgissement exerce une ibnfluence sur l'ensemble des niveaux infra-conscients.
L'inconscient par son existence
élargit notre conscience å son niveau maximal, par le pouvoir décisif qu'elle exerce sur l'ensemble de la vie humaine
et ce malgré l'extension objective minimale de cette conscience.
Conscience et inconscience ne se définissent plus
comme exclusifs, mais comme des modes de détermination complémentaires..
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