Raisonne-t-on bien quand on veut avoir raison à tout prix ?
Extrait du document
«
Discussion :
Il semblerait que celui qui veut avoir raison à tout prix ne s'inscrive pas dans une démarche intellectuelle mais plutôt dans une lutte avec l'autre.
Il ne s'agit
donc plus pour lui de chercher la vérité, le vrai, mais de prouver qu'il est seul, vainqueur.
Alors que le terme « raisonner » renvoie à la « raison » et donc à
la logique et à la réflexion, celui pour qui une discussion n'a d'intérêt que s'il la « gagne » semble échapper totalement au sens que peut avoir le mot «
raisonner ».
Car raisonner c'est avant tout se tromper, et c'est également prendre en compte la raison de l'autre.
Ainsi celui qui veut avoir raison à tout prix
voudrait, en quelque sorte, être seul au monde, et l'unique à détenir la vérité.
Mais, pourtant il ne peut pas y avoir de réflexion en solitaire ; il ne peut pas y
avoir de réflexion sans contradiction.
I.
Première partie : la vérité à tout prix.
Le philosophe est à la recherche de la vérité.
Il se pose des questions afin de trouver la voie du vrai.
Exemple de l'Apologie de Socrate : le logos qui est à la
recherche du vrai.
Socrate s'oppose aux Sophistes car, il le répète à plusieurs reprises, il est à la recherche du vrai, de la vérité, contrairement aux Sophistes
qui sont dans le paraître et dans l'illusion.
L'aspiration à la vérité semble une exigence de la raison.
C'est aller vers la profondeur des choses et non se
contenter d'approximations et d'opinions toutes faites.
C'est en outre ce qui s'attache à notre condition d'être pensant : « La connaissance des vérités
nécessaires et éternelles est ce qui nous distingue des simples animaux et nous fait avoir la raison et les sciences, en nous élevant à la connaissance de
nous-mêmes et de Dieu.
» Leibniz, La Monadologie)
Si on ne cherche pas la vérité cela veut dire qu'il y a en quelque sorte une acceptation du faux.
Et comment est-il possible de vivre dans l'erreur ? Du moins si
l'on exige de soi de se porter en-deçà de l'expérience sensible immédiate.
« Le vrai et le faux sont des attributs du langage, non des choses.
Et là où il n'y a
pas de langage, il n'y a ni vérité ni fausseté.
» Hobbes, Léviathan.
Il s'agit bien d'une capacité liée à l'intelligence.
Exemple de l'Allégorie de la Caverne : les prisonniers sont pris au piège de leurs illusions et de l'erreur.
Seul un prisonnier finit par s'échapper pour partir à la
recherche de la vérité et pour échapper à ce monde d'illusion.
La vérité est représentée, ici, par le Soleil.
« Ennemis de la vérité : Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges.
» Humain, trop humain, Nietzsche.
II.
Deuxième partie : la déformation des faits.
Ce qui prouve avant tout que celui qui veut avoir raison n'est plus en mesure de raisonner c'est la faculté qu'il a à déformer les faits.
Alors que ces derniers
sont l'aspect le plus sûr et le plus concret de la vérité, puisqu'ils sont des preuves matérielles et palpables, il existe toujours un moyen d'interpréter les faits
à son avantage et d'en oublier tout raisonnement logique.
C'est-à-dire que les faits sont toujours le fruit d'une interprétation, et l'on peut déformer à
souhait un fait précis en interprétant et en modifiant différemment une même réalité.
Les faits appartiennent donc malgré tout à un domaine subjectif.
Nietzsche, La volonté de puissance : " Il n'y a pas de faits, rien que des interprétations.
" On constate donc bien ici que les faits sont la résultante d'une
interprétation et d'une volonté de voir certaines choses s'enchaîner d'une certaine manière.
Nous ne sommes donc pas impuissants contre les faits.
Mais il
faut cependant discerner deux types d'interprétation des faits.
Tout d'abord une mauvaise interprétation due à une volonté inconsciente, voire consciente,
d'appuyer une certaine réalité.
Mais ensuite il existe une mauvaise interprétation qui est due à un manque de connaissance.
Par exemple, les scientifiques
qui affirmaient que la Terre était plate s'appuyaient sur des faits qui sont tout à fait concrets et qui effectivement peuvent être interprétés d'une manière
erronée.
Le fait de constater que les hommes tiennent debout sans tomber semblait la preuve la plus flagrante que la Terre ne pouvait être que plane.
Cependant, par un manque de connaissances et de moyens techniques cette interprétation est fausse et induit une déduction fausse elle aussi.
On ne peut
donc pas assimiler le fait au donné.
Si l'on prend l'exemple de Galilée, on constate le même schéma.
C'est-à-dire qu'il veut prouver au monde que la Terre est
ronde malgré la certitude des autres scientifiques à penser qu'elle est plate, mais il s'opère ici, presque une concurrence, un enjeu symbolique dans cette
lutte.
Ainsi, plutôt que d'écouter les arguments de Galilée et d'essayer de comprendre la contradiction, cette volonté de toujours avoir raison pousse les
scientifiques à le condamner à mort, et à s'apercevoir bien plus tard que ce qu'il croyait détenir pour vrai était faux.
III.
Troisième partie : la nécessité de la contradiction.
Ainsi il n'y a pas de pensée sans opposition, car il faut, pour savoir où se trouve la vérité, qu'il y ait toujours deux choix ; deux possibilités.
Car s'il n'y a
toujours qu'une seule réponse aux questions alors il n'y aurait plus de réflexion sur ces mêmes questions, et leur réponse serait implicite.
Dans le texte du
Ménon, Socrate dit que pour penser il faut une opposition, une contradiction entre deux éléments.
C'est ce qui permet de faire avancer la réflexion toujours
plus loin.
Ainsi il y a toujours un bon usage de la contradiction, puisque toute pensée est par nécessité fondé e sur une opposition.
Utiliser la contradiction à bon
escient n'a finalement pas vraiment d'importance, ce qui compte c'est qu'elle existe.
Hegel confirme son importance en soulignant que la contradiction n'est pas facultative, mais elle est nécessaire, et avant même d'être nécessaire elle est
interne à tout concept.
« La contradiction est la racine de tout mouvement et de toute manifestation vitale.
», Science de la logique Hegel Friedrich.
La
contradiction c'est la vie elle-même, elle est moteur de l'histoire, elle est ce qui fait avancer le monde.
Ainsi celui qui veut avoir raison devrait au contraire
tirer profit des contradictions qu'on lui apporte pour approfondir son argumentation plutôt que de rester figer sur une position qui ne le fait pas avancer.
Conclusion :
On constate donc qu'avoir raison n'est pas nécessairement détenir la vérité, mais plutôt détenir une victoire.
Il s'opère donc une véritable lutte entre les
individus qui veut déterminer à tout prix qui doit avoir raison ou tort.
Comme si les deux phénomènes ne pouvaient pas coexister et qu'il fallait
nécessairement qu'ils sortent de cette lutte un perdant et un gagnant.
Pourtant la vérité semble être un travail de collaboration et de patiente et non un
combat qui finalement s'écarte presque totalement du but original, c'est-à-dire la recherche de la vérité.
>>> Second corrigé de ce même sujet: http://www.devoir-de-philosophie.com/passup-corriges-12361b.html.
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