Qu'est-ce qui distingue l'art de la technique ?
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
ART: 1) Au sens ancien, tout savoir-faire humain, toute pratique produisant un résultat non naturel (artificiel).
2)
Au sens esthétique moderne, production ou création d'oeuvres destinées à plaire (beaux-arts), c'est-à-dire à
susciter par leur aspect, une appréciation esthétique positive.
Oeuvre d'art : ensemble organisé de signes et de matériaux manifestant un idéal de beauté.
TECHNIQUE
Tout ensemble de procédés pour produire un résultat utile.
La technique moderne s'appuie sur la science; mais elle
s'en distingue puisque la science est un effort pour expliquer ce qui existe tandis que la technique cherche à
produire ce qu'on souhaite qui soit — qui n'est pas.
La technique peut se définir comme un vouloir, incarné en un
pouvoir par l'intermédiaire d'un savoir.
Comme adjectif: par opposition à esthétique, qui concerne des procédés susceptibles d'être développés et transmis,
et non des dons ou capacités innées.
Au sens large et originel, l'art désigne un ensemble de procédés permettant d'obtenir certains résultats.
On parle
ainsi des «arts et métiers», de l'art culinaire ou, de façon générale, de l'art de faire quelque chose (il a l'art de
trouver les mots justes).
L'art renvoie à l'habileté ou à un savoir-faire, et suppose la connaissance des moyens à
mettre en oeuvre pour obtenir le résultat escompté.
Or la technique aussi renvoie à un ensemble de procédés
permettant de parvenir à des fins.
De même que l'artiste, pour sculpter la pierre ou composer un tableau, utilise des
techniques, de même, le technicien n'est pas uniquement un manuel et a besoin d'un savoir, lui permettant de suivre
des règles précises et souvent complexes.
En quoi l'art se distingue-t-il alors de la technique?
1.
La similitude entre l'art et la technique
La similitude la plus évidente entre l'artiste et le technicien est le travail manuel de la matière.
Focillon parle à cet
égard de la «valeur tactile » de l'art : « L'art se fait avec les mains.
(...) Dans l'iconographie romane, Dieu ne souffle
pas sur le globe du monde pour le lancer dans l'éther.
Il le met en place en y portant la main.
Et c'est d'une
formidable main que Rodin (1840-1917), pour figurer l'oeuvre des six jours, fait jaillir d'un bloc où sommeillent les
forces du chaos» (La vie des formes).
De même, la main révèle l'intelligence proprement technicienne de l'homme.
Ce
n'est pas parce que l'homme a des mains qu'il est le plus intelligent, c'est au
contraire parce qu'il est le plus intelligent que Dieu l'a doté de mains: « L'être
le plus intelligent est capable de bien utiliser le plus grand nombre d'outils (...)
et d'acquérir le plus grand nombre de techniques (...) : or la main semble être
non pas un outil, mais plusieurs.
Car elle est pour ainsi dire un outil qui tient
lieu des autres (...); la main devient griffe, serre, corne, ou lance ou épée ou
tout autre arme ou outil.
Elle peut être tout cela, parce qu'elle est capable de
tout saisir et de tout tenir» (Aristote, Parties des animaux).
Ce texte a donc pour objet de montrer que non seulement l'homme n'est pas
le moins bien pourvu des animaux, mais même qu'il est celui qui a été pourvu
d'un organe tout à fait spécial, qui peut remplir la fonction de tous les autres
moyens qui ont été donnés aux autres animaux : la main.
En effet, « les autres animaux n'ont chacun qu'un seul moyen de défense et il
ne leur est pas possible de le changer pour un autre ».
Ils ne peuvent pas
même s'en séparer momentanément.
Le lion doit garder ses griffes et l'aigle
ses serres.
Le renversement de perspective par rapport au mythe de
Prométhée est donc radical : l'homme est en réalité le mieux pourvu car il
possède la main qui représente, virtuellement, tous les autres outils naturels
donnés aux êtres vivants.
Avec cette main, il possède de « nombreux moyens de défense » et il lui est toujours loisible d'en changer, de sorte
qu'il possède l'arme qu'il veut, quand il veut.
Car la main peut devenir «griffe, serre, corne [...] ou toute autre arme
ou outil ».
La main est donc un outil naturel qui « tient lieu des autres » et c'est là toute sa spécificité.
Pourquoi, alors, la
nature a-t-elle donné à l'homme seul cet outil « de loin le plus utile » ?
C'est que la nature ne fait rien en vain, selon Aristote, et si elle a doté l'homme de la main, c'est parce qu'il est seul
capable d'acquérir le plus grand nombre de techniques.
Seule, en effet, l'activité humaine est véritablement inventive.
La technè est chez l'homme une disposition tournée
vers la création, et « accompagnée de raison », ce qui l'oppose de ce fait, aux autres animaux.
La nature a donc donné à l'homme des mains à la mesure de ce que peut lui permettre de faire son intelligence.
L'outil, en effet, n'est pas seulement le prolongement naturel de la main, il est la traduction matérielle de son
intelligence.
C'est pourquoi Aristote peut affirmer que « ce n'est pas parce qu'il a des mains que l'homme est le plus intelligent
des êtres, mais c'est parce qu'il est le plus intelligent qu'il a des mains ».
Mais ne peut-on proposer de l'art une définition plus spécifique, qui permette de le distinguer radicalement de la.
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