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Qu'est-ce que le mauvais goût ?

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« Introduction Le sens commun affirme qu' « On ne discute pas des goûts et des couleurs.

» En d'autres termes, on pense que les goûts sont quelque chose de personnel, de subjectif et qu'on ne peut remettre en cause par une discussion argumentée et rationnelle.

Les goûts proviendraient de l'histoire personnelle de la personne comprenant son éducation, son niveau social, qu'une simple discussion ne pourrait de toute évidence modifier.

Mais c'est justement ignorer des relations sociales, de la discussion, des débats dans la construction du goût.

Cela serait ignorer aussi qu'il existe le mauvais goût, un goût contestable dont on peut disputer. I.

Le caractère individuel et social du goût a.

Le goût, en effet, désigne, d'une part, un « don » personnel, d'autre part un phénomène collectif, l'orientation d'une société ou d'un milieu vers certaines formes d'art nettement déterminées ; c'est la faculté d'éliminer, de choisir, de créer des associations heureuses, qui naît d'une certaine intuition de la qualité, de la « saveur » des choses, parallèle en somme à celle qui s'exerce sur le plan sensoriel et gastronomique.

Au sens de phénomène collectif, le goût n'a pas ce caractère subjectif : il est parfois une adhésion aux préférences et aux choix de personnalités marquantes d'un milieu, plus souvent le contrecoup d'événements historiques, d'une découverte ou d'une création dans le domaine de la culture ou même de la technique.

Le goût d'une époque est fréquemment une réaction contre celui de l'époque précédente.

Les différentes étapes de l'histoire du goût ne sont pas les phases successives d'une évolution continue, mais recèlent en elles-mêmes leur point de départ et leur terme.

Celui-ci est marqué d'abord par la création d'un style, plus ou moins éphémère et, parallèlement, par l'apparition de modes, de « manies », d'engouements, qui s'épuisent par leur excès même.

On comprend que dans la définition même du goût, il n' y a pas uniquement des prérogatives subjectives, mais le goût est façonné par l'entourage proche ou par la société. b.

Selon Kant dans la Critique de la faculté de Juger, l'essentiel est sans doute un déchiffrage de l'énigme du goût : tout en affirmant qu'il ne faut pas en disputer, chacun gardant le sien sans prétendre à l'assentiment d'autrui, c'est un fait que les hommes ne se résignent pas à déserter ce domaine de la communication, puisqu'on peut les voir se contester incessamment la valeur de leur goût, comme s'ils croyaient au fond qu'un accord devrait être possible.

Cette apparente contradiction a sa raison profonde : il est bien vrai que le jugement de goût ne saurait prétendre à la même objectivité que le jugement logique dans la connaissance, car il ne se fonde pas comme lui sur des concepts ; il est esthétique et il se rapporte à un sentiment, comme tel inaliénable en connaissance, celui d'une satisfaction éprouvée dans l'appréhension d'une forme.

S'il prétend néanmoins exiger comme nécessaire un assentiment universel, c'est que ce sentiment n'est pas subjectif au même titre que celui de l'agréable, suscité par la seule sensation.

Il doit être éprouvé par tous parce qu'il est désintéressé, indifférent à l'existence de la chose, qui est simplement contemplée, sans devenir l'objet d'aucune connaissance ni d'aucun désir, et qu'il est la conscience d'une espèce d'appropriation de la nature à l'homme se manifestant dans le jeu libre et harmonieux de l'imagination et de l'entendement, qui sont les conditions universelles de la faculté de juger.

Le principe de cette harmonisation des facultés en nous, et de l'appropriation de la nature hors de nous à notre faculté de juger, est le suprasensible, qui fonde la liberté et l'unité des fonctions théoriques et pratiques de la raison.

La faculté de juger s'y rapporte comme à une norme indéterminée, celle d'un sens commun à tous, sur lequel elle règle sa réflexion et qui lui permet, lorsqu'elle décide de ce qui rend le sentiment universellement communicable, d'exiger l'assentiment de tous comme une sorte de devoir. II.

Diverses modalités du « mauvais goût » a.

Si le milieu et les conditions de vie d'un individu contribuent à former le goût, ils peuvent aussi le déformer, voire le dépraver, entraînant des aveuglements qui annihilent cette faculté sélective, essentielle au libre exercice du goût : « Le goût dépravé dans les arts, écrit Voltaire, c'est se plaire à des sujets qui révoltent les esprits bien faits, préférer le burlesque au noble, le précieux et l'affecté au beau simple et naturel.

C'est une maladie de l'esprit.

» Même un œil exercé peut ne plus « voir » ce qu'il a constamment sous les yeux.

Les uns récusent, instinctivement, ce qui « ne leur rappelle rien ».

Les autres tiennent pour admirable tel objet qu'ils associent, à tort, à une œuvre belle.

Ces derniers ont fait les beaux jours des fabricants de buffets Henri II, ils font aujourd'hui ceux des marchands de Louis XV en série.

Les uns adoptent d'emblée le jugement des gens qu'ils estiment, les autres établissent leur choix par un antagonisme inavoué envers un individu, un groupe, un milieu qu'ils rejettent.

Il est bien évident que la véritable indépendance du jugement et du choix doit pouvoir faire abstraction des tendances qui sont celles du milieu, de la société contemporaine, sans opposition systématique, mais sans soumission aux contraintes ou aux préjugés et, le plus souvent, à contre-courant, puisque les options communes ne sont en général que le résultat d'un renoncement facile à l'élaboration d'une analyse personnelle.

A l'exemple du kitsch, il est parfois nécessaire de critiquer, de disputer du goût qui peut tomber dans le vulgaire et le frelaté. b.

Le mot « kitsch » tirerait son origine d'un verbe allemand verkitschen qui veut dire brader ; apparu vers 1870 dans la Bavière de l'hyperromantique et maniériste du roi Louis II ; où le terme est utilisé pour qualifier les. »

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