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Qu'est-ce que le bon sens ?

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« DESCARTES: Une écriture du bon sens En 1637, paraissent trois essais scientifiques puis le Discours de la Méthode écrit non en latin comme c'était l'usage, mais en français pour que les êtres doués d e raison puissent le lire.

En 1641, il publie les Méditations sur la philosophie première, les Méditations métaphysiques, traduites en français par le duc de Luynes.

À partir de 1643, il entretient une correspondance avec la princesse Élisabeth de Bohème à qui il dédie les Principes de philosophie.

Les Passions de l'âme seront le fruit de ces échanges épistolaires ; il correspond également avec la reine Christine de Suède.

En septembre 1747, il rencontre Pascal à Paris et reçoit une pension de 3 000 livres du roi de France (il ne touchera que le brevet !).

Aux premiers troubles d e la Fronde, il repart en Hollande puis, en septembre 1649, répond à l'invitation de la reine Christine qui veut s'initier à la philosophie.

Elle décide que les cours se donneront à cinq heures du matin ; en octobre, Descartes arrive à Stockholm, en novembre paraît le Traité des Passions ; en décembre, le philosophe compose les vers d'un ballet en l'honneur de la paix.

Il fait un froid de loup et Descartes prend mal, il meurt en février 1650, des suites d'une pneumonie ; son corps est rapatrié en France et inhumé en l'église Sainte-Geneviève-du-Mont, en 1667 – avant d'être transféré à Saint-Germain-des-Prés, sans son crâne dérobé à Stockholm et acquis par Cuvier pour les collections du Muséum d'histoire naturelle… Le bon sens est une faculté aussi répandue que mystérieuse.

O n l'invoque fréquemment comme l'un des meilleurs experts pour trancher débats et difficultés.

Chacun appelle son témoignage à l'appui de ses opinions.

En effet, la « solution du bon sens » est censée rallier à elle tous les suffrages.

On serait pourtant bien en peine de le définir avec précision.

Le bon sens n'est pas un « sixième sens », ce n'est pas une faculté perceptive supplémentaire.

Mais ce n'est pas non plus un savoir à proprement parler, une s o m m e d e connaissances déterminées et transmissibles.

C'est tout au plus une certaine clairvoyance, dont, à vrai dire, on peut contester la possession à celui qui la revendique. Qu'est-ce donc que ce « bon sens » ? Offre-t-il un savoir réel, même s'il n'est pas théorique? Ou bien est-il au contraire constitué de préjugés dont nous ignorons la véritable nature? Nous consacrerons le premier temps de notre étude à déterminer les caractéristiques couramment attribuées au bon sens, pour ensuite souligner ses limites et ses défauts.

Enfin, nous tenterons de préciser sa signification, afin de montrer son caractère indispensable. L'usage courant du terme de « bon sens » le sépare assez nettement de facultés plus abstraites ou plus raffinées, comme la raison, l'imagination ou le sens artistique.

Ainsi, le personnage d'Eugène Rougon, dans le roman de Zola Son Excellence Eugène Rougon, est pourvu par son créateur d'un « gros bon sens paysan », par opposition à une intelligence déliée ou à une grande capacité de synthèse.

Le bon sens apparaît ici comme une faculté de discernement acquise « sur le tas », par l'accumulation des expériences.

[homme de bon sens ne se préoccupe jamais de valeurs universelles ou d'idées générales.

Il reste au plus près des problèmes particuliers qu'il doit résoudre. Le bon sens n'est pas une intelligence théorique, c'est une clairvoyance pratique. De surcroît, le bon sens est une vertu « populaire », à la différence d e capacités plus rares.

Le bon sens n'est pas une qualité exceptionnelle, dans la mesure où tous s'estiment capables de bon sens.

Descartes relève cette universalité proclamée du bon sens, avec une ironie savoureuse, dans la première phrase du Discours de la méthode : « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée, car chacun pense en être si bien pourvu, que ceux mêmes qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre chose, n'ont point coutume d'en désirer plus qu'ils n'en ont.

» Le bon sens serait ainsi une sagesse pragmatique et universellement répartie.

Il fournirait un souverain remède contre les méandres obscurs, de la réflexion et contre les complexités factices de la vie intellectuelle.

« Revenir au bon sens », voilà quel serait le mot d'ordre salvateur lorsque la rationalité abstraite est désorientée. Doit-on pour autant estimer que le bon sens n'est qu'un « pis-aller », utile seulement quand nos facultés supérieures sont inefficaces? Aristote, dans le chapitre V du livre VI de l'Éthique à Nicomaque, montre au contraire que le bon sens peut s'avérer irremplaçable.

Dans le domaine de la vie sociale et politique, on n'use pas du bon sens, d e la « prudence » faute d e mieux, mais parce que c'est la seule d e nos facultés capables de comprendre les singularités de la vie en commun.

Une science politique trop abstraite ne peut en effet s'adapter aux urgences et aux mille détails de la vie politique.

En conséquence, le bon gouvernant n'est pas l'homme le plus savant ou le plus profond, c'est celui qui possède un « flair » infaillible et une grande capacité d'adaptation.

En somme, l'homme prudent, l'homme du bon sens, est le meilleur des chefs politiques. Cette définition du bon sens reste pourtant bien nébuleuse.

Le moins rationnelle, un «je-ne-sais-quoi », supérieur par principe, qualifié de « bon ».

Cette notion est d'autant plus imprécise gnoséologie que de la morale : le bon sens est incapable d'erreur bon sens serait une intuition plus ou notons-le, puisqu'il est toujours déjà qu'elle relève tout aussi bien d e la comme de vilenie. La confusion est à son comble lorsque l'on note que le bon sens est bien souvent invoqué justement lorsque l'on se trouve à court d'arguments rationnels.

Quand je prétends qu'une idée est « de bon sens », c'est généralement que je suis incapable de la démontrer selon l'ordre des raisons.

Se tourner vers le bon sens est en quelque sorte recourir à un argument d'autorité déguisé qui ne prouve rien.

En opposant à son interlocuteur un « Mais enfin, c'est de bon sens! », on ne manifeste rien d'autre que son impuissance.

On convoque dans la discussion l'autorité bien discutable de la « vox populi » ou d e la sagesse des nations. Cela nous incite à suivre Platon dans sa critique du bon sens.

Bien souvent, il n'est qu'une somme de préjugés, comme il le souligne dans l Apologie de Socrate.

De plus, la croyance, la « doxa », ignore qu'elle est une simple croyance et non un véritable savoir.

Le bon sens a donc tendance à revendiquer pour lui seul la vérité, au détriment de savoirs plus solides.

Or, il est loin d'être toujours cohérent.

C'est tout l'objet des premiers dialogues de Platon où Socrate débusque les contradictions cachées dans les adages populaires ou dans les opinions de bon sens. En outre, ce qui découle du bon sens à une époque et dans une société déterminées sera considéré comme absurde dans d'autres circonstances.

Par exemple, la loi du talion (« oeil pour oeil, dent pour dent ») a longtemps semblé aller de soi, être de bon sens.

Elle nous apparaît désormais non comme le fondement d'une véritable justice mais comme la profession de foi de la vengeance perpétuelle. Loin d'être une faculté universelle et intemporelle, le bon sens semble bien instable.

Le plus souvent incohérent, il ne peut nous fournir une règle de jugement fiable et constante. Doit-on pour autant récuser la notion de bon sens comme entachée de préjugés et d'imprécision? N'est-il pas possible d'en réformer le sens?. »

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