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Quelle signification et quelle valeur attribue-t-on a l'opinion ?

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« En philosophie comme en science il semble que l'opinion, la doxa, soit condamnée à jouer le rôle de faire valoir.

Tout se passe comme si la marche vers le savoir se faisait à contre-courant de l'opinion, la barrière du langage entre le discours du sens commun et celui du savant tend à stigmatiser un écart entre deux rapports au monde, l'un immédiat et naïf, l'autre médiatisé et réfléchi.

L'opinion est par définition ce qui correspond à l'avis le plus répandu, paradoxalement c'est également celui dont il faut davantage se méfier.

L'opinion ce serait donc le niveau zéro du savoir, sa valeur ne serait que purement négative, à moins, nous le verrons, que ce ne soit pas le savoir qui est en jeu mais le pouvoir. I- Le savoir se construit contre l'opinion. Pour Pascal, la philosophie se nourrit de paradoxes, littéralement cela signifie que la philosophie procède en allant contre l'opinion.

Faire de la philosophie ne se résume pas à accumuler un savoir sur l'histoire de la philosophie mais cela consiste avant tout à faire l'épreuve de résistances, à ne pas se détourner des impasses en empruntant les chemins les plus sûrs, bref, à ne pas faire l'économie des questions concernant le monde en général.

La condition de possibilité minimale de cette capacité d'interrogation consiste en une prise de distance par rapport à l'opinion. Le savoir de l'opinion a en effet cela de singulier qu'il ne s'interroge pas sur lui-même, c'est un tissu de paroles dont la valeur est essentiellement pratique et sociale mais qui ne vise pas à proprement parler la vérité.

On peut remarquer avec Descartes que le savoir du sens commun se construit d'une façon symétriquement inverse par rapport au savoir du philosophe.

En effet, tandis que le philosophe doit tenir pour faux le douteux, selon le critère thématisé dans Les méditations métaphysiques ; l'opinion, elle, comme le montre Descartes dans Le discours de la méthode, consiste à tenir pour certain le douteux, et c'est là l'origine du phénomène de la rumeur.

La raison de cette différence est simple : le philosophe vise un idéal d'ordre gnoséologique, l'opinion, elle, est rivée à des impératifs pratiques.

Or, comme le souligne Descartes, on ne saurait agir qu'en prenant son parti et en suivant jusqu'au bout une voie, même si, sur un plan purement rationnel, on aurait des raisons de s'en détourner.

L'opinion a donc une valeur dans l'ordre de l'agir, lorsqu'il y a une décision urgente à prendre il faut prendre son parti et donc se tenir à une opinion.

Descartes prend l'exemple d'un homme perdu dans la forêt : la seule chance d'en ressortir est de choisir une direction et de s'y tenir, peu importe si elle n'est pas rationnellement justifiée. Si l'agir se soutient de l'opinion, celle-ci est exclue par le savoir, l'opinion a valeur d'obstacle dans l'ordre gnoséologique.

Cela est particulièrement vrai dans la constitution du savoir scientifique, en même temps que la philosophie la science nous apprend à nous méfier de nos sens et à ne pas inférer la nature des choses du monde du rapport direct que nous pouvons avoir avec celles-ci.

Freud a souligné dans un texte ce qu'il tenait pour deux blessures essentielles infligées par la science à l'humanité (la troisième étant sa découverte de l'inconscient et donc de l'impuissance relative du moi à s'auto-déterminer).

Ces deux blessures dites narcissiques, ce sont, respectivement, la remise en cause du géocentrisme au profit d'un système héliocentrique et la découverte d'une filiation de l'homme et du singe.

Ici il paraît clair que l'avancée du savoir s'est construite contre les données de l'opinion. II- La relativité des opinions. Le monde du sens commun se soutient d'une certaine tendance au relativisme, thématisée par un proverbe qui fait consensus « des goûts et des couleurs, on ne discute pas ».

Autrement dit, si le discours du sens commun n'est pas nécessairement exempt de prosélytisme, loin s'en faut, il n'a pas non plus l'ambition d'énoncer quelque vérité absolue. Les opinions se disent, s'échangent, se confrontent, se modifient, elles sont relatives aux circonstances et ne participent pas d'une pensée générale et systématique.

L'opinion est une unité de valeur dans le cadre de la conversation.

Ce n'est pas tant le contenu que la forme qui importe, l'opinion n'est pas une thèse fabriquée mais un simple avis que l'on donne spontanément.

Une opinion est un point de vue général et qui n'est pas spécifique à celui qui l'énonce ; à l'inverse, une proposition philosophique ou scientifique possède en propre sa singularité et a une place déterminée dans l'économie théorique à laquelle elle participe. L'opinion est donc essentiellement relative et fluctuante, c'est probablement parce qu'elle implique la précipitation du sujet qui l'énonce qu'elle est aisément influençable, ce que les politiciens, s'appuyant de nos jours sur les médias, ont bien compris.

C'est en ce sens que l'on peut comprendre que le discours du politique n'importe pas tant par son contenu que par le moment choisi pour énoncer tel contenu, ce n'est pas tant le message que l'opportunité qu'il y a à l'énoncer qui compte.

Si la forme prévaut dans le discours politique sur le fond, c'est que le politique doit composer avec l'opinion, c'est donc pourquoi il adapte son discours en conséquence. III- La valeur de l'opinion et l'enjeu du pouvoir. Si dans l'ordre de la connaissance on assiste à une mise à l'écart de la doxa, inversement, lorsque c'est le. »

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