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Quelle leçons le philosophe tire-t-il de l'étude des mathématiques ?

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« Introduction Philosophie et mathématique sont des disciplines qui ont connu, semble-t-il, des conditions d'émergences comparables, l'une et l'autre se réclament d'un certain usage privilégié de la raison.

De plus, au sens classique de connaissance, elles sont , parentes: manthanein, en grec, signifie apprendre, et mathèma, science.

C omment penser leurs rapports ? Le philosophe tire-t-il des leçons de l'étude et de la pratique des mathématiques ? Tirer leçon de quelque chose, c'est en dégager un enseignement.

Mais l'expression est assez vague.

Le plus souvent, on tire la leçon d'une mésaventure, d'un échec ou d'une erreur.

Est-ce en ces termes qu'il faudrait parler des mathématiques dont le philosophe pourrait tirer leçon ou au contraire, est-ce les succès et les réussites des mathématiques dont le philosophe doit tirer des enseignements ? Les questions posées par la figure du philosophe mathématicien. « Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre » A u linteau de la porte d'entrée de l'Académie était cet avertissement : «Nul n'entre ici s'il n'est géomètre».

C'est dire l'importance qu'attachait Platon aux mathématiques en tant que discipline préparatoire (propédeutique), nous apprenant à nous dégager des choses immédiatement sensibles pour considérer des rapports intelligibles, nous éloigner du «concret» pour appréhender «l'abstrait».

C 'est par cette discipline des mathématiques que nous devenons aptes à élaborer une construction, qu'on appelle hypothético-déductive, c'est-à-dire une théorie qui reconstruit déductivement (selon des règles logiques) un donné à partir d'hypothèses. P ar exemple : à partir du théorème que la somme des angles d'un triangle vaut deux droits, on déduit que la somme des angles d'un polygone vaut autant de fois deux droits qu'il a de côtés moins deux. C omme plus g énéra le ment : à partir d'une hypot hèse (axiome, postulat , définition) indémontré e, o n déduit logiquement une t héorie, un sys tème, une construction. C 'est grâce à cette méthode qu'il est possible de mesurer, compter, peser, et de rendre le réel intelligible et donc objectif. Mais les mathématiques ne sont que le "prélude de l'air qu'il faut apprendre". Platon aurait fait inscrire cette formule au fronton de son école, dans les jardins d'A cadémos.

Descartes, mathématicien lui-même, soucieux de ne découvrir que des vérités dont la certitude soit « égale à celle des démonstrations de l'arithmétique et de la géométrie » (Règles, II), est conscient de ce qu'il doit à la pratique des mathématiques.

Pour l'un comme pour l'autre celles-ci ont un statut philosophique privilégié.

La philosophie de Platon est un effort pour s'arracher aux apparences sensibles et aux illusions de la C averne ; il faut parvenir à contempler la vérité, qui est intelligible, c'est-à-dire qui doit être perçue par l'âme.

Les notions mathématiques font comprendre à l'apprenti philosophe que l'essentiel du savoir est au-delà des apparences, comme le nombre est au-delà des objets que je vois ou le carré au-delà de la figure perçue.

L'étude des mathématiques est « le prélude » de la philosophie, mais seulement « le prélude de l'air qu'il faut apprendre » (République, V II, 531, d).

Hypothético-déductives, les mathématiques posent en effet des propositions de départ non démontrées (postulats) et en tirent logiquement des conséquences.

« Le commencement est une proposition dont on n'a pas le savoir » : tout le système des déductions n'est donc pas une «vraie science», il ne donne qu'« une image de rêve » du réel (Rép.

VII, 533 c). La figure du dialecticien. La dialectique est la démarche qui, «bousculant les hypothèses », suit son chemin jusqu'au principe lui-même (ibid.), jusqu'à « l'anhypothétique » (511b), l'absolu qui ne dépend de rien, mais dont dépendent toutes choses, qui tiennent de lui leur ultime intelligibilité.

Tirer une leçon de l'étude des mathématiques ? Oui, à condition d'entreprendre de les parfaire, elles qui sont, sur le chemin de la vérité, une sorte de tremplin qu'il faut emprunter pour le dépasser. Une école de la vérité ? Savoir partiel chez Platon, les mathématiques sont plutôt, selon Descartes, un modèle de pensée rigoureuse pour la démarche philosophique.

Des « pensées détachées », isolées, si brillant qu'en puisse être le contenu, n'ont pas plus de valeur qu'un (impossible) « théorème » sans démonstration.

Bien plus, il faut enchaîner toutes les idées vraies à l'intérieur d'une philosophie qui montre comment elles sont toutes liées les unes aux autres par des liens nécessaires.

A insi procède Descartes : le doute méthodique, la découverte du « je suis, j'existe » qui le conclut, l'analyse de ce que je suis moi qui doute, etc., ces différents moments forment les tout premiers maillons métaphysiques d'une longue chaîne de raisons dont les géomètres ont fourni le modèle, et qui, de chaînon en chaînon, sans rupture, peut et doit intégrer toutes les vérités philosophiques et scientifiques.

Des mathématiques, Descartes a tiré la leçon qu'il n'y a de certitude que pour un esprit qui conduit par ordre s e s pensées.

L'ordre des mathématiques n'est pas plus rigoureux que l'ordre philosophique convenablement élaboré.

Les deux ont une même origine : la lumière naturelle de la raison humaine.

Bien plus, les thèses philosophiques ne sont pas que cohérentes; elles sont vraies, d'abord et au moins parce qu'elles sont toutes déduites d'une expérience intellectuelle inaugurale (je doute, je suis) dont la valeur de vérité est indubitable; les propositions qui en sont logiquement tirées ne peuvent donc qu'être vraies.

Descartes espère avoir « trouvé comment on peut démontrer les vérités métaphysiques d'une façon qui est plus évidente que les démonstrations de géométrie » (Lettre à Mersenne, 15 avril 1630).

Le philosophe n'est nullement prisonnier du « modèle » mathématique. La mathématique rassemble toutes les sciences où l'on étudie l'ordre et la mesure, indifféremment de leurs objets.

La science universelle qui rassemble toutes les autres sciences, qui n'en sont que les parties subordonnées, se nomme mathématique universelle.

C e doit être la science la plus utile et la plus facile de toutes, n'ayant aucun rapport à un objet particulier. Les difficultés qu'elle renferme se trouvent déjà dans les autres sciences, puisqu'elle leur est commune.

Si cette mathesis universalis a été négligée par tous, c'est en raison de son extrême facilité.

L'ordre de la recherche de la vérité requiert pourtant de commencer par les choses les plus simples et les plus faciles à connaître, et de ne passer à un ordre plus élevé que lorsque toutes les difficultés auront été résolues.

Ainsi, on est sûr de ne jamais se tromper.

Parmi les sciences connues, seules l'arithmétique et la géométrie sont absolument certaines.

Quelle en est la raison ? Nous ne pouvons connaître que de deux manières : soit par l'expérience, soit par la déduction. Si l'expérience est souvent trompeuse, la déduction, qui consiste à inférer une chose à partir d'une autre, peut être manquée si on ne la voit pas, mais ne peut jamais être mal faite.

"Toutes les erreurs où peuvent tomber les hommes ne proviennent jamais d'une mauvaise inférence, mais seulement de ce qu'on admet certaines expériences mal comprises, ou que l'on porte des jugements à la légère et sans fondement." A rithmétique et géométrie sont les seules sciences qui traitent d'un objet simple et pur et qui n'admettent rien d'incertain : leur travail ne consiste qu'à tirer des conséquences par voie de déduction rationnelle.

Leurs erreurs ne peuvent procéder que de l'étourderie.

Elles doivent par conséquent constituer l'idéal des sciences pour leur rigueur, leur clarté et leur certitude.. »

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