Quelle est, dans la vie sociale, la fonction propre du droit ?
Extrait du document
«
Position de la question.
Le droit est une des caractéristiques de la vie en société, à te] point que l'axiome Ubi
societas, ibi jus (là où il y a société, là il y a du droit) est communément reçu parmi les juristes.
Mais quelle est
exactement la fonction du droit dans la société ?
I.
Nature de la société.
A.
— Pour bien le comprendre, il convient d'abord de préciser quelle conception nous devons nous faire de la
société.
Souvent, on n'a voulu voir en celle-ci qu'un simple fait, un donné qui s'impose à nous, qui nous contraint
même comme une réalité étrangère.
Parfois encore, on l'a comparée à un simple organisme vivant dont les diverses
fonctions sont interdépendantes.
B.
— Mais ces conceptions sont inexactes ou, du moins, insuffisantes.
La société n'est pas seulement un fait ni un
organisme.
Le mérite de l'école durkheimienne est précisément d'avoir montré que la société n'est pas uniquement «
un corps », mais que, « dans ce corps, vit une âme » et que cette âme, c'est « l'ensemble des idéaux collectifs »,
l'ensemble des valeurs dont s'alimente sa vie morale.
D'autre part; la société n'est pas seulement un donné ; elle est
aussi en partie, notre oeuvre, dans la mesure où elle n'est pas simple unité organique, mais: aussi unité morale, faite
de la libre adhésion de ses membres aux idéaux communs.
II.
La fonction sociale du droit.
A.
— C'est précisément la fonction propre du droit de faire exister la Société ainsi conçue.
Certes, comme il a été
dit au.
début, il n'est point de société sans droit.
Mais dans les sociétés dites «primitives », c'est-à-dire peu
différenciées, le droit n'est encore qu'un ensemble le traditions et de coutumes que l'individu reçoit du passé.
C'est
seulement lorsqu'au droit coutumier succède le droit écrit que l'homme se crée une vie sociale nouvelle et qu'un
ordre idéal se superpose à l'ordre de fait, toujours plus ou moins fondé sur la force.
Le rôle du droit est ainsi de
substituer progressivement une société juste à la société de fait.
B.
— Il suffit d'ailleurs d'observer l'évolution du droit pour se convaincre que telle est bien sa fonction essentielle.
Les valeurs morales fondamentales, qui commandent la vie humaine, ont sans doute une certaine consistance et
une certaine permanence.
Mais elles doivent nécessairement se déterminer et se préciser en relation avec la
complication croissante des rapports sociaux (surtout dans nos sociétés industrielles) et avec l'extension,
aujourd'hui quasi illimitée, des cercles sociaux.
Or, nous constatons : 1° que de nouvelles formes du droit, le droit
social, le droit international, etc., se sont constituées et se développent de plus en plus pour répondre à ces
exigences nouvelles ; — 2° qu'au droit abstrait tel qu'on l'entendait au xviiie siècle, tend à se substituer un droit
réel, qui n'est plus seulement droit de..., c'est-à-dire simple reconnaissance d'une activité comme licite, mais droit
à..., c'est-à-dire qu'il nous autorise à revendiquer certaines satisfactions effectives.
Qu'on observe, par exemple, le
passage des anciennes institutions d'assistance aux obligations de la « sécurité sociale », et l'on se convaincra
facilement de ce dernier point.
Conclusion.
La fonction propre du droit est d'instituer progressivement dans la société un ordre juste et
véritablement humain..
»
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