Quel sens accorder à l'expression : « Deviens ce que tu es ! » ?
Extrait du document
«
Définition des termes du sujet:
EXPRESSION (n.
f.) 1.
— Représentation correspondant de manière analogique à ce qu'elle représente ; la
projection plane d'un solide en est l'expression (LEIBNIZ).
2.
— Attitudes, gestes liés à un état psycho.
:
expressions du visage, expression corporelle.
3.
— (Lato) Auj., SYN.
de phrase, suite de symboles formant un sens,
notation, manière de parler.
4.
— (Ling.) Partie de la signification d'une phrase se rapportant au sujet qui l'énonce
(chez RUSSELL, opposée à indication).
Cf.
JAKOBSON : fonction expressive ou émotive du langage.
PLAN
1° L'expression bien connue de Nietzsche (dans Ainsi parlait Zarathoustra) peut être interprétée, dans le sens du
romantisme héroïque de son auteur, comme l'affirmation du « destin » propre à la force d'exister, à la volonté de
puissance, sinon à la force vitale qui caractérise chacun.
2° a) Tout dépend alors de l'idée que l'on se fait de la notion de l'éternel retour chez Nietzsche : pure répétition, sur
le mode du temps des Anciens ? Ou bien sélection en quelque sorte « éthique », comme le soutient Deleuze
(Nietzsche et la philosophie) ?
b) Dans un cas, tout est (tragiquement) joué d'avance, dans l'autre il existe encore une possibilité d'être ce que l'on
devient — si tant est qu'Heidegger (Nietzsche, Essais et Conférences) ait raison de considérer que l'éternel retour
entretient à la volonté de puissance le même rapport que l'être à l'étant, dont il constitue la vérité.
c) Le « surhomme » sera alors — en quelque sens qu'on l'entende (créateur, artiste, législateur, héros, guerrier,
destructeur, nihiliste ?) — la « vérité » de l'homme, ce « pont tendu entre la bête et le surhomme ».
3° a) Mais le « sois ce que tu deviens » auquel nous aboutissons peut encore être entendu en un sens tout à fait
différent du sens nietzschéen.
Il peut signifier que l'homme, ne reconnaissant rien de transcendant par rapport au
devenir se « résigne » en quelque sorte à la maîtrise de celui-ci, par exemple...
b) à l'émergence du « moi » par rapport au « ça » — dont il émane pourtant — chez Freud, ou...
c) à l'insociation chez Rousseau, Kant, Hegel, Marx, etc., toutes doctrines dans lesquelles l'homme cesse, de toute
manière, d'être ce qu'il est supposé « être » en fonction de l'« ordre naturel ».
L'Éternel Retour chez Nietzsche.
« Que dirais-tu si un jour, si une nuit, un démon se glissait jusque dans ta
solitude la plus reculée et te dise : « Cette vie, telle que tu la vis maintenant
et que tu l'as vécue, tu devras la vivre encore une fois et d'innombrables fois
; et il n'y aura rien de nouveau en elle si ce n'est que chaque douleur et
chaque plaisir, chaque pensée et chaque gémissement et tout ce qu'il y a
d'indiciblement petit et grand dans ta vie devront revenir pour toi et le tout
dans le même ordre et la même succession – cette araignée-là également, et
ce clair de lune entre les arbres, et cet instant-ci et moi-même.
L'éternel
sablier de l'existence ne cesse d'être renversé à nouveau –et toi avec lui ô
grain de poussière de la poussière ! »
- Ne te jetterais-tu pas sur le sol, grinçant des dents et maudissant le démon
qui te parlerait de la sorte ? Ou bien te serait-il arrivé de vivre un instant
formidable où tu aurais pu lui répondre : « Tu es un Dieu et jamais je
n'entendis choses plus divines ! » Si cette pensée exerçait sur toi son empire,
elle te transformerait, faisant de toi, tel que tu es, un autre, te broyant peutêtre : la question posée à propos de tout et de chaque chose : « Voudrais-tu
ceci encore une fois et d'innombrables fois ? » pèserait comme le poids le plus
lourd sur ton agir ! Ou bien ne te faudrait-il pas témoigner de bienveillance
envers toi-même, et la vie pour ne désirer plus rien que cette dernière,
éternelle confirmation, cette dernière éternelle sanction ? » Nietzsche.
Pendant l'été 1881 NIETZSCHE séjourne en Haute-Engadine dans le petit
village de Sils-Maria.
C'est là qu'au cours d'une promenade sur les bords du lac de Silvaplana, au lieu-dit Surlei, près
d'une saillie rocheuse (sur laquelle est aujourd'hui fixée une plaque qui rappelle l'événement) il a pour la première fois
l'intuition du Retour Eternel.
Les éléments du monde étant en nombre fini, les combinaisons possibles finies
également, chacun de nos instants est donc appelé à revenir.
Nous repasserons indéfiniment par les mêmes phases,
nous revivrons plus tard et encore plus tard éternellement cette vie que nous vivons à présent.
Révélation brutale, inopinée qui dit-on parfois transforme alors radicalement la philosophie de NIETZSCHE, préludant
à son ultime phase.
En réalité ceux qui ont lu attentivement toute l'oeuvre de NIETZSCHE savent que ce thème de
l'éternel retour a toujours hanté la pensée de l'auteur.
Auriez-vous le courage de revivre toute votre vie avec ses.
»
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