Quel est le rôle de la raison dans la vie morale ?
Extrait du document
«
Position de la question.
KANT a identifié la conduite morale avec la conduite rationnelle.
Peut-on accepter
cette manière de voir ? Quel est le véritable rôle de la raison dans la vie morale ?
I.
En quel sens le Rationalisme moral est faux.
La thèse de Kant ne doit pas être interprétée en ce sens que, dans la conduite morale, dans la moralité vécue,
la raison se suffirait à elle-même.
Quoi qu'on en dise souvent, Kant d'ailleurs ne l'a pas soutenu et il a reconnu
qu'une certaine joie morale accompagne nécessairement l'acte conforme au devoir.
Le sentiment, pourvu qu'il
soit guidé par la raison, est en effet le moteur indispensable de l'action morale.
II.
Véritable rôle de la raison.
Le rôle de la raison dans la vie morale n'est donc pas exclusif : « La raison, écrit A.
LALANDE (La Raison et les
normes, p.
143), n'est pas une fée : elle n'a pas à renouveler pour nous le miracle de la création ex nihilo.
»
Son rôle est toutefois capital.
A.
— D'abord, en tant que faculté normative, la raison est essentiellement constitutive de valeurs.
Elle est
donc, de par sa nature même, la faculté qui doit diriger notre conduite.
En ce sens, la moralité ou la vertu est
bien obéissance à la raison : « Les officiers, dit MALEBRANCHE (Traité de Morale, chap.
II), qui s'exposent
volontairement aux dangers, ne sont point généreux, si c'est l'ambition qui les anime ; ni les soldats, si c'est
l'abondance des esprits et la fermentation du sang.
»
B.
— C'est qu'en effet, comme le dit encore MALEBRANCHE, la raison est la faculté de l'Ordre, l'Ordre lui-même
étant entendu comme une hiérarchie de valeurs, seule capable de fonder moralement nos options, nos
jugements de préférence.
C'est elle qui introduit dans notre conduite cette cohérence, cette constance, cette
fidélité à soi-même, qui distingue la vie droite de la vie désordonnée du passionné, du sensuel ou du capricieux.
C.
— C'est aussi sa rationalité qui explique ce qu'il y a d'universalité dans l'acte moral.
« Ce qui caractérise
l'honnête homme, écrivait RAUH, c'est de se placer, pour savoir ce qu'en somme il veut faire, dans une attitude
impartiale, impersonnelle.
Il juge en sa propre cause comme en celle d'autrui.
Cela s'appelle être raisonnable».
D.
— Enfin, en tant qu'elle est effort vers la pensée claire, la raison joue aussi un rôle essentiel dans la vie
morale.
Bien loin, en effet, que les valeurs aient leur fondement, comme on l'a soutenu de nos jours, «dans la
sphère des instincts », la moralité implique que l'on admet dans l'homme une certaine dualité entre une nature
inférieure, commune avec les animaux, et une nature supérieure, qui lui appartient en propre.
La sphère des
instincts, c'est le domaine du trouble, de l'obscur et du confus.
La vie morale, c'est au contraire l'effort pour
voir clair en soi-même et dans ses actes.
Comme l'a montré A.
LALANDE, il y a quelque affinité entre le mépris
de la pensée claire et cette «volonté de puissance » qui porte les individus comme les peuples à ne connaître
que leur instinct vital et à tenter d'asservir les autres à leurs fins.
Conclusion.
La raison n'est pas toute la moralité.
Quelquefois même, celle-ci semble la dépasser (cas de
l'héroïsme).
La raison y joue cependant un rôle essentiel..
»
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