Que vaut, au point de vue moral, le principe: "La fin justifie les moyens" ?
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
PRINCIPE: Du latin principium, « commencement », origine » (de princeps, « premier »).
Origine, cause première des choses.
En logique, loi fondamentale de la pensée (exemple : le principe de noncontradiction).
Dans les sciences, proposition première posée au fondement d'un raisonnement ou d'une
démonstration.
En morale, règle de conduite ou norme des
jugements pratiques (exemple : avoir des principes).
Pétition de principe : faute logique qui consiste à s'appuyer, au
début d'un raisonnement, sur la thèse qu'il s'agit précisément de démontrer.
FIN / FINALITE:
1.
— Terme, limite, cessation, interruption d'un phénomène ; opposée à commencement.
2.
— But vers lequel tend
un acte (SYN.
dessein) ; ce en vue de quoi quelque chose est fait ; opposée à moyen.
Rem.
: les sens 1 et 2 sont
souvent confondus, comme dans l'adage : « La fin est première dans l'intention, dernière dans l'exécution » ; la
confusion entraîne celle de la cessation d'une action, du dessein qui préside à son exécution et du but qu'elle
atteint ; c'est cette confusion qui est au coeur de l'idée ant.
selon laquelle la fin d'un être est sa perfection, son
achèvement.
3.
— (Par anal.) Ce qui explique pourquoi une chose est telle qu'elle est : organisation de son activité
ou de ses parties ; cf.
finalité.
4.
— Fin dernière : fin ultime au sens de but ou de terme absolu, tel que le souverain
bien ; SYN.
fin suprême ; fin en soi : pour KANT, fin objective, nécessaire, inconditionnelle ; opposée à fin
subjective, empirique.
5.
— Règne des fins : état dans lequel les volontés des êtres raisonnables sont censées
s'accorder entre elles et avec l'ordre du monde (SYN.
monde des esprits) ; il s'agit pour KANT d'un idéal pratique
posant la liaison systématique, par des lois objectives communes, des êtres raisonnables en tant qu'ils sont une fin
en soi, et qu'ils peuvent se proposer des fins.
6.
— Final : a) Qui constitue ou concerne un terme ; SYN.
ultime,
dernier, opposé à initial.
b) Cause finale : qui provoque ou explique un fait à la manière d'un but à atteindre, ou
comme moyen par rapport à une fin ; opposée à cause efficiente ; cf.
cause, finalisme, téléonomie.
7.
— Finalité.
:
a) Fait de posséder une fin, une signification, d'être organisé selon un dessein, un plan ; on distingue : la finalité
externe qui a pour fin un être autre que celui dont il est question ; la finalité interne à un être dont les parties sont
considérées réciproquement comme moyen et fin (cf.
un organisme) ; la finalité immanente qui résulte de la nature
et du développement de l'être même (adaptation du vivant à son milieu) ; la finalité transcendante qui est réalisée
dans un être par l'action qu'exerce sur lui un autre être.
b) Principe de finalité : la nature ne fait rien en vain, c.-àd.
tout être a une fin ; d'où, à l'inverse, l'idée d'une preuve de l'existence de Dieu à partir de l'existence de la finalité
dans la nature ; cf.
téléologique (argument ).
8.
— Finalisme : a) Caractère de ce qui dépend d'une fin.
b) Toute
doctrine qui affirme l'existence d'une cause finale de l'univers, ou (par ext.) qui utilise les causes finales comme
principes explicatifs ; opposé à mécanisme.
MOYEN: Ce qui sert à la réalisation d'une fin: "La fin justifie les moyens."
La fin c'est le but qu'on se propose, les moyens c'est l'ensemble des dispositions, des méthodes, et des gestes
nécessaires pour atteindre ce but.
Si nous nous plaçons sur un plan purement technique, la maxime : « La fin justifie
les moyens » a l'air d'un truisme : un procédé technique paraît justifié dans la mesure exacte où il est un moyen
efficace, c'est-à-dire propre à atteindre la fin désirée.
Cependant, même sur le plan technique, la question est
moins simple parce qu'il y a toujours une pluralité de fins en jeu.
Supposons que des ingénieurs se proposent pour fin
de construire une automobile de tourisme extrêmement rapide.
La fin justifiant les moyens, vont-ils
systématiquement augmenter le nombre de chevaux-vapeur et le volume de la cylindrée ? Évidemment non, car les
clients n'entendent pas que la consommation d'essence, la puissance « fiscale u de leur voiture soient excessives !
Il faut aussi aménager un système de freinage qui, malgré la vitesse, préserve la sécurité.
Une fin ne justifie donc
les moyens que dans la mesure où ceux-ci ne font pas obstacle à d'autres fins concurremment poursuivies.
Ceci nous aide à concevoir la complexité du problème sur le plan moral.
Sans doute deux cas se présentent où la
réponse ne fait pas difficulté.
Est-il légitime de poursuivre des fins immorales ou indifférentes par des moyens
immoraux ? Par exemple, est-il légitime de tuer le caissier pour dévaliser la banque (fin immorale), de tricher à
l'examen pour être reçu (fin moralement neutre) ? C'est non, évidemment.
Est-il légitime de poursuivre des fins
moralement bonnes par des moyens irréprochables ? C'est oui, quels que soient par ailleurs le prix et la difficulté de
ces moyens.
Il est parfaitement légitime de mobiliser une armée de guides, une escadrille d'hélicoptères pour sauver
la vie d'un seul alpiniste en difficulté.
Il est parfaitement légitime d'alerter Air France pour faire venir de Paris, en
toute urgence, le remède capable de sauver un malade à l'autre bout de la France.
Mais le vrai problème qui se pose
au moraliste est celui-ci : est-il légitime d'user de moyens immoraux pour atteindre une fin morale, de mentir pour ne
pas désespérer son prochain, de supprimer des vies pour en sauver d'autres, de voler un homme riche pour
empêcher un pauvre de mourir de faim ? Dans ces circonstances tragiques la fin justifie-t-elle les moyens ?
Convertit-elle en « bien moral » ce qui, de soi-même, est un mal ?
A cette question Machiavel — dans son ouvrage Le Prince — n'hésite pas à répondre : oui.
Comprenons bien que
c'est au nom de la morale que Machiavel demande au politique d'exécuter sans trembler les actions les plus cruelles.
Pour lui, un but conforme au bon droit justifie toujours les moyens abominables.
*.
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