Que nous apprend sur l'homme le sentiment de la faute?
Extrait du document
«
Analyse du sujet :
Homme : « Homme » est le nom commun qu'on donne à l'Homo sapiens sapiens.
« Sapiens » est un adjectif latin qui
signifie « intelligent », « sage », « raisonnable », ou encore « prudent ».
Le trait saillant qui définit l'homme semble
donc être le fait que c'est un être vivant doué de raison.
Cette hypothèse résulte d'une longue tradition
philosophique qui a construit le concept d'humanité en opposition à celui d'animalité.
Ainsi, on a tendance à
considérer que l'homme se distinguerait du reste des créatures vivantes parce qu'il serait capable de pensée, de
conscience, de langage et de liberté, alors que les animaux n'en auraient pas la capacité.
Cela confèrerait à l'homme
une dignité particulière : seul d'entre les créatures à posséder la raison, il serait également le seul à pouvoir se
représenter une fin, et à ce titre, il serait en lui-même une fin, c'est-à-dire une personne que l'on devrait respecter,
et non pas une simple chose dont on pourrait disposer.
Sentiment : Le sentiment est une connaissance plus ou moins claire et liée au domaine affectif.
C'est une
connaissance tirée du ressenti, relevant des émotions et qui appartient au domaine des passions.
On peut aussi
l'utiliser pour désigner une inclination, comme lorsqu'on parle par exemple du « sentiment moral » pour désigner
l'inclination à la moralité.
Le sentiment, dans la tradition philosophique, est généralement teinté d'une connotation
péjorative, car il se rapporte au domaine des passions dont il incarne une des déclinaisons possibles.
Or, même si ce
n'est pas obligatoire, la philosophie oppose en règle générale les passions à la raison et considère que cette dernière
est supérieure aux premières.
De la sorte, on a tendance à reléguer le sentiment dans le domaine de l'incertain ou
de la faiblesse.
Le problème principal du sentiment est de savoir si celui-ci peut constituer un moyen réel de
connaissance puisque ce dernier n'est pas tributaire de la seule raison.
Faute : Le terme « faute » désigne un manquement à une règle ou à un devoir, et est le plus souvent employé pour
ce qui concerne le devoir moral.
La faute prend sens en cela qu'on considère que celui qui la commet aurait pu
l'éviter.
Elle fait donc intervenir la notion de responsabilité, et par suite, de liberté.
En ce sens, elle se distingue de
l'échec, qui peut être dû intégralement à des causes extérieures.
Sentiment de la faute : Le sentiment de la faute renvoie généralement à l'idée du remords : la faute est quelque
chose qu'on se reproche.
On considère habituellement qu'on aurait pu l'éviter et que c'est un mal.
Mais le sentiment
de la faute peut également être quelque chose qui concerne des individus extérieurs à l'agent : ainsi celui qui
commet un crime peut éveiller le sentiment de la faute chez les autres, mais pas forcément en lui-même.
Dans un
tel cas, le sentiment de la faute met particulièrement en avant l'enjeu sociologique avec lequel il est aux prises.
Problématisation :
Le sentiment de la faute semble nous indiquer que l'homme est un être capable de choix : il ressent son échec
comme une faute parce qu'il sait qu'il aurait pu faire en sorte que cette action soit couronnée de succès.
Plus
encore, ce sentiment de faute se rapporte à un sentiment moral, car dans la faute, l'homme ne considère pas
seulement qu'il a raté son coup, il ajoute à cela l'idée qu'il a fait quelque chose de mal, là où il aurait pu faire le bien.
Le sentiment de la faute semble donc être une sorte de message venant d'ailleurs, un ailleurs qui nous signalerait
par là notre manquement au devoir moral.
Mais tout le problème consiste donc à savoir si tel est véritablement le
cas, ou si le sentiment de la faute n'est à cet égard qu'une illusion.
Proposition de plan :
1.
Le sentiment de la faute comme indice de la moralité humaine.
a) Il semble évident que le sentiment de la faute éveille en nous l'idée que nous aurions pu nous comporter
autrement que tel que nous l'avons fait.
Commettre une faute, ce n'est pas seulement échouer, ce n'est pas
uniquement faire de son mieux et malgré tout manquer sa cible.
La faute renvoie plutôt à l'idée que nous avons
commis une action mauvaise alors que nous aurions pu agir en bien.
b) Si nous ressentons ainsi les actions mauvaises comme des actions fautives, c'est peut-être parce que l'homme
est sensible à quelque chose de supérieur à son intérêt primaire.
Le sentiment de la faute serait alors la preuve que
l'homme est capable d'aller à l'encontre de ses inclinations, qu'il est capable d'échapper par exemple à l'intérêt
personnel et au plaisir immédiat.
Selon Kant, cette chose qui serait supérieure à l'intérêt, ce serait le sens du devoir
qui nous enjoint à un respect inconditionnel envers la loi morale.
Le sentiment de la faute nous montrerait donc que
l'homme est un être moral.
Ainsi que l'écrit Kant dans la Critique de la raison pratique : « La loi morale est donnée
comme un fait de la Raison dont nous sommes conscients a priori et qui est apodictiquement certain, en supposant
même qu'on ne puisse alléguer dans l'expérience aucun exemple où elle ait été exclusivement suivie.
»
c) D'autre part, cette moralité n'a de sens que si l'homme est capable de liberté.
En effet, seule la liberté nous
fournit les moyens de nous donner à nous-mêmes notre propre loi.
Ainsi, la liberté est ce par quoi nous devenons
responsables de nos actes.
C'est elle qui nous permet d'échapper aux déterminations naturelles, aux velléités du
corps, et qui ainsi nous octroie la possibilité d'agir en vue de l'unique respect.
Sans liberté, la loi morale n'aurait
aucun sens.
La liberté est, ainsi que Kant l'écrit dans la préface de la Critique de la raison pratique : « ratio essendi
de la loi morale », ce qui donne sens à la morale.
Aussi est-il en droit d'ajouter que : « s'il n'y avait pas de liberté, la
loi morale ne saurait nullement être rencontrée en nous.
» (Critique de la raison pratique, préface).
Le sentiment de
la faute semble donc nous indiquer que l'homme est également capable de liberté.
Transition : Toutefois, prétendre que le sentiment de la faute n'a de sens qu'en vertu de la morale, et que cette
morale elle-même n'a de sens qu'en raison de la liberté, n'est-ce pas postuler beaucoup de sens là où rien ne prouve
qu'il y en ait ?
2..
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