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Puis-je me faire justice moi-même ?

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« Puis-je me faire justice moi-même ? Le sujet posé convoque une expression qu'il s'agit d'analyser.

On définit en effet la justice comme le caractère de ce qui est juste, à savoir l'égalité, ou plutôt l'équité.

Mais ce dont le sujet parle ici le sujet ici est moins un caractère qu'un acte, exprimé par l'expression « faire justice ».

En ce sens, l'expression renvoie à la décision et à l'action permettant de faire régner le juste entre des personnes, en rétablissant un équilibre entre des parties en conflit. Le sujet vous demande si un tel acte peut être effectué par le même individu que celui à qui il s'adresse.

(« me » et « moimême ») ; Pour répondre à cette question, vous devrez d'abord définir la fonction de l'acte de justice.

Si celui-ci consiste en effet à réparer un tort causé, pour rétablir une situation d'équité, vous pouvez concevoir que celui qui a subi un tort peut exercer luimême son pouvoir de faire justice, c'est-à-dire d'exercer son jugement en définissant le tort causé, en désignant l'auteur de ce tort et en réparant ce dernier.

Cependant, une telle situation est moins acte de justice que de vengeance.

Or, la justice vise justement à dépasser la vengeance pour établir rationnellement un juste milieu reposant en dernière instance sur le principe d'égalité.

Ce caractère objectif et rationnel, nécessaire à la désignation de cette équité, est annulée dans la vengeance, qui a pour source la douleur et la passion, et qui reste basée sur des considérations subjectives et partiales. Bien plus, se faire justice soi-même risque de conduire à une situation de non-droit, où chacun, en fonction de ses vues, est maître de punir, de châtier, de prendre à autrui ce dont il s'estime lésé.

Une telle situation correspond à un état de guerre permanent entre les individus, là où la loi cherche justement à établir un ordre qui vaut pour tous les individus d'une même société. Cet état d'anomie est d'ailleurs le contraire de la justice puisqu'il conduit au règne de l'inégalité par excellence, dans la mesure où chacun aura des vues différentes sur son dû. Se faire soi-même justice correspond donc précisément au contraire d'un acte visant à l'établir, puisqu'il ne peut se généraliser sans se nier lui-même.

Il est même possible d'affirmer avec Hobbes que la vengeance annule la notion même de justice et qu'un société basée sur elle ne serait pas injuste puisqu'elle nierait la possibilité même de la justice. Dès lors, il semble moralement insoutenable d'affirmer que je peux me faire justice moi-même, dans la mesure où l'établissement du juste repose précisément sur l'abstraction du règne du particulier et du subjectif.

Ainsi la justice est-elle considérée certes comme un acte, une décision visant à établir une équité entre des individus, mais également comme une institution, qui applique des lois en fonction des cas particuliers et, surtout, de façon impartiale. Cependant, un point peut vous mener à nuancer cette position et à considérer le sujet posé sous un nouvel angle.

En effet, si nous ne comprenons pas la justice comme un acte mais comme un pouvoir de jugement, se faire justice soi-même renvoie dès lors non plus à la possibilité de réparer soi-même le tort causé par autrui mais à exercer un pouvoir de jugement moral sur les actes de ce dernier et, de même sur les siens.

Cet aspect du sujet nous invite à voir le sens de la justice comme compris dans la conscience de chaque individu et non pas simplement reléguée à un pouvoir institué qui, si il est parfois représentatif de la volonté d'une majorité, peut toujours suivre la « pente à dégénérer dont parle Rousseau ».

Il s'agit donc, en gardant en vue cette possibilité d'exercer un jugement critique, de mettre en avant le devoir qui consiste, pour chaque homme, à juger ses actes, voire même à juger la justice instituée qui peut parfois ne pas être juste.

Il ne s'agit pas ici de se faire justice soi-même dans le sens de la vengeance et de la décision purement subjective, mais de pouvoir être prêt à rendre justice lorsque l'institution s'est égarée. 1) Si faire justice renvoie à un acte qui, basé sur un jugement, vise à rétablir une équité entre des parties opposées, la justice se distingue cependant de la vengeance.

La vengeance, qui semble revenir à se rendre justice soi-même, annule le caractère objectif et raisonné de la décision dans l'acte de justice. Si la culture a établi le commandement de ne pas tuer le voisin que l'on hait, qui nous fait obstacle et dont on convoite les biens, cela fut manifestement dans l'intérêt de la vie en commun des hommes qui, autrement, serait impraticable.

Car le meurtrier attirerait sur lui la vengeance des proches de la victime du meurtre et la sourde envie des autres, qui intérieurement se sentent tout autant enclins à un tel acte de violence.

Il ne jouirait donc pas longtemps de sa vengeance ou de son butin, il aurait bien au contraire toute chance d'être lui-même bientôt abattu.

Quand bien même, grâce à une force et à une prudence extraordinaires, il se protègerait d'un adversaire isolé, il ne pourrait que succomber à une union d'adversaires plus faibles.

Si une telle union ne se constituait pas, la pratique du meurtre se prolongerait indéfiniment.

Freud. L'état de nature, cette guerre de tous contre tous a pour conséquence que rien ne peut être injuste.

Les notions de droit et de tort, de justice et d'injustice n'ont dans cette situation aucune place.

Là où il n'y a pas de Pouvoir commun il n'y a pas de loi ; là où il n'y a pas de. »

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