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« Prenons-y garde, écrit le critique L. Moland. Dans le « Dom Juan » de Molière, il ne reste pas grand-chose des éléments mélodramatiques si complaisamment développés par ses devanciers. En dépit de certaines apparences, il s'est plu à y peindre son époq

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INTRODUCTION Comme il sied à un auteur classique, Molière ne se fait pas scrupule d'emprunter à d'autres écrivains la matière de ses pièces et, selon son propre aveu, il prend son bien partout où il le trouve. Mais son imitation n'est pas un plagiat. Même quand il traite un thème aussi traditionnel que celui de Don Juan, il sait, tout en s'inspirant assez étroitement de ses devanciers, en renouveler la portée et l'intérêt. Il en simplifie la trame et prend soin d'élaguer la plupart des éléments mélodramatiques. Tout en maintenant superficiellement cette impression de dépaysement que créent les noms des personnages et les cadres étrangers dans lesquels ils évoluent, il fait revivre dans sa pièce l'atmosphère de son pays et de son temps. Enfin, aux types conventionnels qui figuraient dans ses modèles, il substitue des types profondément humains, nuancés, individualisés et complexes.

« « Prenons-y garde, écrit le critique L.

Moland.

Dans le « Dom Juan » de Molière, il ne reste pas grandchose des éléments mélodramatiques si complaisamment développés par ses devanciers.

En dépit de certaines apparences, il s'est plu à y peindre son époque, à nuancer et à approfondir les caractères.

» Développez ce jugement. INTRODUCTION Comme il sied à un auteur classique, Molière ne se fait pas scrupule d'emprunter à d'autres écrivains la matière de ses pièces et, selon son propre aveu, il prend son bien partout où il le trouve.

Mais son imitation n'est pas un plagiat.

Même quand il traite un thème aussi traditionnel que celui de Don Juan, il sait, tout en s'inspirant assez étroitement de ses devanciers, en renouveler la portée et l'intérêt.

Il en simplifie la trame et prend soin d'élaguer la plupart des éléments mélodramatiques.

Tout en maintenant superficiellement cette impression de dépaysement que créent les noms des personnages et les cadres étrangers dans lesquels ils évoluent, il fait revivre dans sa pièce l'atmosphère de son pays et de son temps.

Enfin, aux types conventionnels qui figuraient dans ses modèles, il substitue des types profondément humains, nuancés, individualisés et complexes. I.

LA SUPPRESSION DE LA PLUPART DES ÉLÉMENTS MÉLODRAMATIQUES Le Trompeur de Séville, de Tirso de Molina, Le Convié de pierre de Cicognini étaient de véritables comédies de cape et d'épée où foisonnaient les éléments mélodramatiques.

On y assistait aux nombreuses aventures de Don Juan avec des filles nobles qu'il séduisait successivement sous les déguisements les plus divers, aux démêlés que lui valaient ses conquêtes avec les fiancés et les pères des victimes, avec les gouverneurs et les rois, avec les prévots et les archers lancés à sa poursuite.

Molière ne garde que l'histoire d'Elvire et celle du meurtre du Commandeur.

Encore ce meurtre est-il rejeté dans le passé.

Quant à la poursuite de Don Juan par les frères d'Elvire, seul vestige de ce qui constituait l'essentiel des pièces précédentes, elle est réduite à de courtes scènes.

Sans doute ces scènes restentelles empreintes de romanesque : on y voit Don Juan sauver la vie de Don Carlos attaché pourtant à sa perte, et ce même Don Carlos protéger à son tour Don Juan contre Don Alonse son frère; on l'entend même affirmer sous la foi du serment qu'il le défendra contre qui que ce soit et « saura lui faire un rempart de cette même vie qu'il a sauvée ».

Ce romanesque toutefois ne pouvait manquer d'être moins sensible aux contemporains de Molière qu'à un spectateur de notre temps.

Car les duels étaient alors fréquents et l'on gardait le souvenir d'un passé tout proche où pendant la Fronde s'exerçaient, au sein des grandes familles, des vengeances impitoyables.

Dans une certaine mesure, quand on le confronte ainsi avec l'atmosphère du temps, cet épisode paraît même empreint d'un certain réalisme. II.

MOLIÈRE PEINTRE DES MŒURS DE SON TEMPS L'atmosphère Cette impression de réalisme s'accuse bien davantage quand on examine l'ensemble de la pièce à la lumière de l'époque où Molière l'a écrite.

La.

réalité contemporaine se retrouve d'abord d'une manière assez extérieure mais significative dans l'habillement de Don Juan.

La description minutieuse et maladroite qu'en fait Pierrot devant Charlotte, depuis la perruque jusqu'aux rubans qui ornent généreusement les souliers, s'apparente étroitement à celle qui figure dans la première scène de l'École des Maris.

L'une et l'autre offrent une caricature amusante du costume des jeunes gens de la cour.

On trouve également ici et là un écho fidèle des sujets de discussion qui étaient alors d'actualité.

C'est ainsi que le valet de Don Juan expose doctoralement à son maître les effets de l'émétique, un médicament fort combattu et dont l'utilisation sera finalement autorisée par la Faculté un an après la première représentation de Dom Juan.

Dès son entrée en scène, le même Sganarelle chante les vertus salutaires du tabac, que l'on considérait en effet à l'époque comme un médicament et dont la vente en France depuis 1635 était réservée aux apothicaires, qui n'en devaient délivrer que sur ordonnance d'un médecin.

Même les discussions philosophiques et théologiques ont un caractère d'actualité.

Dans la longue polémique qui l'opposait depuis 1644 à Descartes, Gassendi s'était institué le défenseur du vieil argument des causes finales.

Or Sganarelle reprend laborieusement ce même argument quand il veut réfuter la profession d'athéisme de Don Juan.

Bien plus, certains détails qui pourraient à première vue paraître invraisemblables s'accordent avec la réalité des faits.

Si Don Juan propose à M.

Dimanche de le faire escorter par cinq de ses gens armés de mousquetons, c'est que les rues de Paris ne sont pas sûres, que les agressions y sont fréquentes après la tombée de la nuit, comme en témoigne de son côté Boileau dans ses satires publiées en 1666.

D'ailleurs le brigandage sévissait encore plus en province qu'à Paris et il n'y a pas lieu de s'étonner que Don Carlos soit attaqué par des bandits.

On pourrait aussi trouver étrange que Don Juan, qui s'est rendu coupable d'un meurtre, jouisse d'une parfaite impunité.

Mais rares étaient les châtiments imposés aux grands pour des crimes de droit commun et, quand les magistrats ne s'étaient pas laissé intimider, les lettres d'abolition permettaient de mettre les coupables à l'abri des poursuites. Les classes sociales L'évocation suggestive de cette atmosphère de l'époque se complète et s'approfondit en une peinture exacte des classes sociales.

Pierrot, Charlotte et Mathurine sont des paysans de l'Ille de France avec leur patois savoureux, pris sur le vif, avec leur vanité naïve et leur balourdise.

En outre, l'attitude de Pierrot en face de Don Juan qui a entrepris la conquête expéditive de sa fiancée est significative.

Il reste déférent même dans ses protestations indignées.

Il s'insurge contre la conduite indigne d'un homme qui lui doit la vie, non contre le grand seigneur qui traite un manant avec tant de mépris désinvolte.

Il n'y a pas dans ses propos la moindre trace de revendication sociale.

En vrai paysan du )(Vile siècle il est résigné à supporter les misères de sa condition. Avec Monsieur Dimanche, la bourgeoisie apparaît.

La fortune qu'elle est en train de conquérir lui donne dans la société une importance grandissante.

C'est aux bourgeois enrichis que les nobles «décavés» empruntent de l'argent,. »

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