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Pouvons-nous savoir avec certitude que nous sommes libres?

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« L'homme, comme le dirait Rousseau dans la Profession de foi du vicaire savoyard, a le sentiment intime de sa propre liberté : l'on se sent libre dès lors que l'on prend conscience de sa propre conscience.

Prendre conscience de soi et de sa propre activité d'être pensant, c'est donc avoir le sentiment irréductible de la structure inconditionnée de son propre être, qui ne dépend pas des choses extérieures au moi s'atteignant lui-même.

Or, un acte ne peut être dit libre que s'il est effectif, et dans son effectivité, cet acte peut toujours être expliqué, c'est-à-dire que l'on peut toujours reconstituer a posteriori une chaîne causale ayant déterminé cette action prétendue libre.

La prétention à la liberté ne peut-elle donc accéder à un statut autre que celui de simple hypothèse ? La certitude de ma propre liberté ne peut-elle donc prendre la forme que d'une "intuition" immédiate, et irréductible à toute démonstration possible ? Ainsi, l'aspect absolu de ma certitude ne peut-elle pas jouer, paradoxalement, en défaveur de cette certitude même, au sens où rien d'extérieur à cette certitude ne pourrait la vérifier comme telle ? I.

La liberté est à l'origine même de toute certitude, sans être elle-même une certitude en tant que telle : le cogito cartésien et ce qui le rend possible. -L'entreprise cartésienne d'un savoir absolument indubitable : à travers le doute méthodique, il s'agit de parvenir à une vérité absolument première, indéracinable.

Cette vérité, c'est que je ne peux pas douter que je doute, donc que je suis dans mon activité même de penser.

Or, cette vérité n'a été possible qu'à partir du doute, qui procède d'une liberté absolue, celle de se déprendre de toute opinion jusqu'ici acceptée comme vraie.

Avoir une certitude n'est donc originairement possible qu'à partir de la liberté. -Descartes développe également une théorie de la décision, dans les Méditations métaphysiques, selon laquelle l'homme, contrairement à l'âne de Buridan, peut choisir entre deux options également possibles, même si aucune raison ne pousse à choisir l'une plutôt que l'autre.

Cette "liberté d'indifférence" permet à l'homme d'éprouver positivement en lui sa liberté de choix. Pour ce qui est du libre-arbitre, je suis complètement d'accord avec ce qu'en a écrit le Révérend Père.

Et, pour exposer plus complètement mon opinion, je voudrais noter à ce sujet que l'indifférence me semble signifier proprement l'état dans lequel est la volonté lorsqu'elle n'est pas poussée d'un côté plutôt que de l'autre par la perception du vrai ou du bien ; et c'est en se sens que je l'ai prise lorsque j'ai écrit que le plus bas degré de la liberté est celui où nous nous déterminons aux choses pour lesquelles nous sommes indifférents.

Mais peut-être que d'autres entendent par indifférence une faculté positive de se déterminer pour l'un ou l'autre de deux contraires, c'est-à-dire pour poursuivre ou pour fuir, pour affirmer ou pour nier.

Cette faculté positive, je n'ai pas nié qu'elle fût dans la volonté.

Bien plus, j'estime qu'elle y est, non seulement dans ces actes où elle n'est pas poussée par des raisons évidentes d'un côté plutôt que de l'autre, mais aussi dans tous les autres ; à ce point que, lorsqu'une raison très évidente nous porte d'un côté, bien que, moralement parlant, nous ne puissions guère aller à l'opposé, absolument parlant, néanmoins, nous le pourrions.

En effet, il nous est toujours possible de nous retenir de poursuivre un bien clairement connu ou d'admettre une vérité évidente, pourvu que nous pensions que c'est un bien d'affirmer par là notre libre-arbitre. Ce texte est extrait d'une réponse de Descartes à la lettre d'un de ses correspondants qui l'interrogeait à propos d'un passage de la quatrième méditation métaphysique dans laquelle il disait : « de façon que cette indifférence que je sens lorsque je ne suis point emporté vers un côté plutôt que vers un autre par le poids d'aucune raison, est le plus bas degré de la liberté et fait plutôt paraître un défaut dans la connaissance qu'une perfection dans la volonté » (Méditations métaphysiques, Pléiade, p.

305). L'indifférence est cet état dans lequel se trouve la volonté lorsqu'ayant à se décider elle a le choix entre deux actions et qu'elle n'éprouve aucune inclination, ni ne perçoit de raison de choisir.

Descartes juge que, concrètement, cet état est celui de la moindre liberté.

Le terme d'indifférence est d'ailleurs un terme négatif qui désigne un manque d'éléments d'appréciation plutôt qu'une disponibilité quelconque.

Dans un cas d'indifférence totale je m'en remets, la plupart du temps, au hasard d'un coup de dé ou du « pile ou face », remplaçant la décision de la volonté par un événement quelconque du monde.

Inversement ma liberté ne saurait être remise en question sous prétexte que j'aie des raisons (dûment établies) d'agir comme je le fais.

Si je n'agis pas pour des raisons conscientes, j'agis pour des causes ce qui est proprement le contraire de la vérité. Descartes concède toutefois qu'on peut penser l'indifférence (dont il ne nie pas l'existence mais son lien avec la liberté) également comme une « faculté positive » c'est-à-dire comme la condition purement formelle de la liberté.

Il faut penser une capacité toujours présente de refuser même ce qu'on juge bon ou vrai, d'affirmer envers et contre tout une « liberté » qui existe de simplement s'affirmer.

Cette indifférence conçue cette fois positivement ne peut certes entraîner qu'un comportement irrationnel ou immoral puisqu'elle consiste à ne pas faire ce pour quoi nous avons des raisons évidentes d'agir, ce qu'est pour Descartes la vraie liberté — « Moralement parlant » c'est-à-dire raisonnablement il est inadmissible que nous fassions le contraire de ce qui est raisonnablement bon.

C'est « absolument parlant », c'est-à-dire sans égard à autre chose que le pur concept du libre-arbitre, que nous devons penser la possibilité d'un choix libre et irrationnel.. »

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