Pourquoi échangeons-nous ?
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Définition des termes du sujet:
ÉCHANGE: Du latin excambiare, « échanger », «troquer» (de cambiare, «changer »).
En droit, contrat par lequel deux parties se donnent respectivement une chose pour une autre.
En économie,
transfert réciproque de biens ou de services, soit directement (troc), soit indirectement (par l'intermédiaire de la
monnaie).
Quelles sont les finalités de l'échange et les raisons de l'échange ? Quels sont la fonction, le rôle, le sens de
l'échange dans les communautés humaines, entre les hommes ? Quel est son intérêt ? Une communauté peut-elle
vivre sans échanges ? Un individu humain peut-il vivre sans échanges ? Il semble que l'échange soit une des
conditions de notre humanité.
Nous échangeons sans doute à cause de nos besoins (registre de la nécessité) mais
aussi pour témoigner de notre appartenance à la communauté humaine, de notre humanité (registre du désir au sens
où nous cherchons à persévérer dans notre être, comme le dit Spinoza, donc à nous affirmer).
Ainsi Robinson
sombre dans la folie la plus sombre (il se déshumanise) à cause de la solitude (et de l'absence d'échange) dans
laquelle il se trouve ; l'enfant sauvage, s'il est abandonné à la naissance, ne devient pas véritablement humain faute
d'échanges, entre autres linguistiques, mais aussi affectifs, sensitifs, échange de sens et de signification.
Échanger,
c'est dire notre humanité, c'est nous enrichir, créer d'une certaine manière, nous construire.
Quant aux sociétés,
elles ne peuvent vivre en autarcie et ont besoin des autres pour se maintenir.
À quoi bon échanger ? Pourrait-on
s'en passer ? On définit le fait d'échanger comme le fait de céder quelque chose en contrepartie d'autre chose, ce
qui suppose qu'est présupposée une égalité dans l'échange comme condition du bon fonctionnement de celui-ci,
égalité sans doute illusoire qu'il conviendra de questionner.
Références utiles : Mauss, Essai sur le don ; Malson,
L'Enfant sauvage ;la préface de Gilles Deleuze à Robinson ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier ; Aristote,
Éthique à Nicomaque, livre V, chap.8 ; mais aussi Marx, Capital, livre I.
Introduction & problématique:
Pour sa survie même, tout être vivant entre en relation avec son milieu.
La plante, par exemple, puise les nutriments
nécessaires à son développement du sol.
Sans échanges, toute forme de vie serait impossible.
Chez l'homme, les échanges ne sont pas simplement bornés à la survie biologique et s'étendent jusqu'à la sphère du
culturel.
Les hommes échangent des choses (dimension économique) mais aussi et surtout des mots (dimension
symbolique).
Ainsi, l'échange ne permet-il pas de réaliser la dimension culturelle de l'humanité ? Bien plus, n'est-il pas
la condition de possibilité même de toute culture ? On voit que la question "pourquoi échangeons-nous ?" - que l'on
pourrait orthographier "pour quoi échangeons-nous ?" se charge d'enjeux économiques, sociologiques, politiques
voire méta-physique.
L'échange, c'est la vie : le vivant se définit en partie par son rapport d'échange avec son environnement; c'est
même l'ensemble des rapports d'échange qui définissent le « milieu » naturel d'une espèce donnée.
Chez l'homme le cycle des échanges a pris une dimension spécialement étendue et a quitté le terrain purement
biologique pour prendre sa dimension culturelle, si bien que la question « Pourquoi échangeons-nous? » devient
pertinente : s'agit-il dans le fond d'une simple fonction naturelle, ou y réalisons-nous une dimension proprement
sociale? Dans une civilisation où les échanges prennent une ampleur inouïe, la question prend un relief particulier car
elle devient un enjeu social et politique essentiel.
I.
Une nécessité économique.
Le fait des échanges semble s'expliquer avant tout par nos conditions d'existence : de même que le phénomène
social remplit une fonction de collaboration en vue d'une survie mieux garantie, de même les échanges semblent être
un corollaire de cette collaboration sociale.
• Aménager la répartition naturelle des biens.
Les échanges sont tout d'abord nécessaires pour organiser une répartition des biens disponibles : dès que les
hommes commencent à humaniser l'espace, une circulation des biens devient indispensable car tout ne se trouve
pas dans le même lieu.
• Spécialisation et division du travail.
De même, comme l'analysait déjà Aristote, le processus de spécialisation des tâches et de division du travail rend
indispensable la mise en place d'échanges réglés et l'invention de monnaies d'échange.
Dès ce stade, les échanges
prennent un caractère conventionnel qui en complique la fonction.
• Logique économique et justice.
Dès que l'on considère un réseau économique un tant soit peu élaboré, les motivations de l'échange se compliquent
et se recouvrent mutuellement : à la nécessité de répartition de biens rares répond l'ambition d'accumulation à des
fins de puissance.
On voit ici qu'il ne suffit plus de dire que les hommes échangent entre eux : les échanges sont
marqués par des positions de domination ou d'infériorité, par des visées stratégiques ou des revendications de.
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