Poétique d'Aristote
Publié le 03/05/2023
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Table des matières
Aristote, La Poétique.
.....................................................................................................................
Chapitre I : La mimèsis et ses espèces ..............................................................................................2
Chapitre IV : L’homme, animal mimétique par excellence.
Causes naturelles de la mimèsis.......
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Chapitre VI : Définition de la tragédie.
De l’action et des parties de la tragédie ..........................
4
Chapitre VII : Du mûthos, de l’ « agencement des faits » ...............................................................7
Chapitre VIII : De l’unité d’action ...................................................................................................
8
Chapitre IX : Le poète plus proche du philosophe que l’historiographe.......................................
9
Chapitre X : De l'action simple et de l'action complexe ...............................................................
10
Chapitre XI : Caractéristiques de l’action complexe : péripétie, reconnaissance, pathétique.....
10
Chapitre XIII : Des qualités de la fable quant aux personnages ...................................................
12
Chapitre XIV : De l'événement pathétique dans la fable ..............................................................
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Aristote, Rhétorique.
Annexe sur la crainte et la pitié ..............................................................
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Livre II, chapitre V : Qu'est-ce que la crainte ? .............................................................................
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Livre II, chapitre VIII : Qu'est-ce que la pitié ? .............................................................................
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Aristote, La Poétique, extraits commentés
Cours d’ A.
Vousaris
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Aristote
La Poétique (334-324 av.
J.-C.)
Chapitre I.
La mimèsis et ses espèces :
[La mimèsis et ses espèces : les trois critères qui définissent un « genre
littéraire » ; on précisera qu’Aristote, lui, recourt au terme d’ « espèce », eidos, et
non à celui de « genre », genos]
Nous allons traiter de l’art poétique (poiètikè [tekhnè]) en luimême, de ses espèces (eidos), considérées chacune dans sa finalité
(dunamis) propre, de la façon dont il faut constituer (sustasis)
les histoires (mûthos) si l’on veut que la poésie (poièsis) soit
réussie, en outre du nombre et de la nature des parties qui la
constituent, et également de toutes les autres questions qui
relèvent de la même recherche.
La manière de « constituer »
l’histoire (mûthos), d’« agencer ses
parties » (« mise en intrigue »,
traduisait Paul Ricœur dans Temps
et récit) est d’emblée présentée
comme l’idée maîtresse de La
Poétique, la pierre angulaire de l’art
de raconter, plus généralement de
représenter (imiter).
Shakespeare, par exemple, procède
toujours à une profonde refonte de
ses sources d’inspiration.
Voir aussi les chap.
VI & VII.
Suivant l’ordre naturel, traitons en premier ce qui est premier.
L’épopée et la poésie tragique, comme aussi la comédie,
La célèbre notion de
l’art du dithyrambe, et […] celui de la flûte et de la cithare ont
Mimèsis, « imitation ».
tous ceci de commun qu’ils sont des représentations (mimèsis).
On traduit,
Mais il y a entre eux des différences de trois sortes : ou bien ils
aujourd’hui et le plus souvent,
représentent par des moyens autres, ou bien ils représentent
par « représentation ».
des objets autres, ou bien ils représentent autrement, c’est-àNous utiliserons ici les deux
termes.
dire selon des modes qui ne sont pas les mêmes.
Ainsi de même que certains font appel aux couleurs et aux figures pour représenter en images
une foule d’objets (qu’ils le fassent par art ou par habitude), tandis que d’autres usent de la voix,
de même dans le cas des arts (tekhnè) que nous avons cités : tous réalisent la représentation
(mimèsis) au moyen du rythme, du langage (logos) ou de la mélodie, mais chacun de ces moyens
est pris soit séparément, soit combiné aux autres.
[…]
Voici les trois critères qui définissent un genre littéraire.
La combinatoire n’est pas la même pour
l’épopée et la tragédie, par exemple !
Les moyens spécifiques d’expression utilisés par chaque genre (style bas ou élevé, en prose ou
a)
en vers ?),
b)
leur objet, c’est-à-dire l’ « image » de l’homme et de l’humanité (tantôt heureuse, tantôt
héroïque, ici absurde, là comique) que chaque genre nous renvoie, enfin
c)
le mode ou manière de représenter cette action : mode narratif ou mode dramatique (pour
simplifier : par un narrateur ou des acteurs de théâtre ?)
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Aristote, La Poétique, extraits commentés
Cours d’ A.
Vousaris
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Chapitre IV.
L’homme, animal mimétique par excellence.
Causes naturelles de la
mimèsis :
L’art poétique dans son ensemble paraît devoir sa naissance à deux causes, toutes deux
naturelles :
Dès l’enfance les hommes ont, inscrites dans leur nature, à la
Le grand plaisir de la mimèsis
fois une tendance à représenter — et l’homme se différencie des est lié à un acte de raisonnement (syllogisme) !
autres animaux parce qu’il est particulièrement enclin à représenter
C’est pourquoi Aristote rapproche
le poète du philosophe (voir ch.
IX),
et qu’il a recours à la représentation dans ses premiers
contrairement à Socrate et Platon
apprentissages — et une tendance à trouver du plaisir aux
(exil des poètes dans la République) !
représentations.
Nous en avons une preuve dans l’expérience pratique: nous Nous voyons parfaitement ici le paradoxe de
avons plaisir à regarder les images les plus soignées des choses dont la tragédie : le plaisir que suscite la tragédie
la vue nous est pénible dans la réalité, par exemple les formes vient de la représentation de faits dont nous
ne tolérerions pas la violence et la douleur
d’animaux parfaitement ignobles ou de cadavres ; la raison en est
dans la réalité.
qu’apprendre est extrêmement agréable, non seulement pour les Jean-Baptiste Dubos y reviendra près de 20
philosophes, mais également pour les autres hommes (mais ce qu’il siècles plus tard dans ses Réflexions critiques
sur la poésie et la peinture (1719).
y a de commun entre eux sur ce point se limite à peu de chose) ; en
effet, si l’on aime à voir des images, c’est qu’en les regardant on
apprend à connaître et on conclut par un raisonnement (syllogisme) ce qu’est chaque chose comme
lorsqu’on dit : celui-là, c’est lui.
Puisque nous avons une
tendance
naturelle
à
la
représentation, et aussi à la
mélodie et au rythme (car il est
évident que les mètres font partie
des rythmes), ceux qui au départ
avaient les meilleures dispositions
naturelles firent peu à peu des
progrès et donnèrent naissance à
la poésie à partir de leurs
improvisations.
Puis la poésie se
divisa suivant le caractère propre
de chacun : les auteurs graves
représentaient des actions de
qualité accomplies par des
hommes de qualité, les auteurs
plus légers celles d’hommes bas,
en composant d’abord des blâmes,
comme les autres composaient des
hymnes et des éloges.
Aristote, La Poétique, extraits commentés
Cours d’ A.
Vousaris
Chapitre VI.
Définition de la tragédie : la nature de son action et ses parties
Masque tragique de jeune homme
2e siècle avant J.-C.
Terre cuite, Louvre
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Aristote, La Poétique, extraits commentés
Cours d’ A.
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Puisque ce sont des personnages en action qui font la représentation, nécessairement on aurait
d’abord comme élément de la tragédie l’organisation du spectacle (opsis) ; ensuite viennent la
composition du chant (melopoiia), l’expression (lexis), puisque ce sont les moyens qui permettent
de faire la représentation.
J’appelle « expression » (lexis) l’agencement (synthesis) même de
mètres ; quant à « composition du chant » (melopoiia), la signification en est parfaitement claire.
Puisque la tragédie est représentation d’action et que les agents en sont des personnages en
action qui doivent nécessairement avoir des qualités dans l’ordre du caractère (èthos) et de la
pensée (dianoia) (en effet c’est par référence à ces données que nous qualifions aussi les actions – il
y a deux causes naturelles des actions, la pensée (dianoia) et le caractère(èthos) – et c’est dans
leurs actions que les hommes réussissent ou échouent), eh bien c’est l’histoire (mûthos) qui est la
représentation de l’action (j’appelle ici « histoire » [mûthos] le système des faits), les caractères
(èthos) sont ce qui nous permet de qualifier les personnages en action, la pensée (dianoia) tout ce
qui dans leurs paroles (logos) revient à faire une démonstration ou encore à énoncer une maxime
(gnômè).
Il s’ensuit que toute tragédie comporte nécessairement six parties, selon quoi elle se qualifie.
Ce sont l’histoire (mûthos), les caractères(èthos), l’expression(lexis), la pensée (dianoia), le
spectacle (opsis) et le chant (melos).
En effet il y a deux parties qui sont les moyens de la
représentation, une qui en est le mode, trois qui en sont les objets, et il n’y en a pas d’autres en
dehors de celles-là […].
Je vous propose ici un schéma explicatif récapitulatif (vous vous souviendrez des critères énoncés
dès le chapitre premier) :
Le quoi de la
mimèsis tragique :
Les trois
critères
définissant le
genre
littéraire
qu’est-ce que la
tragédie
représente ?
en hois = avec quels
moyens expressifs ?
vers vs prose, par
exemple
ou
prose « précieuse » vs
« écriture blanche »,
etc.
Les six
parties
qualitatives
de la tragédie
Comment, de quelle
manière, selon quel
mode la
représentation est-elle
faite ?
mode narratif
ou
mode dramatique ?
Critères
OBJET de la mimèsis
MOYENS de la mimèsis
MODE de la mimèsis
Parties
Histoire (fable, mûthos)
Caractères (èthos)
Pensée (dianoia)
Expression (lexis)
Chant (melos)
Spectacle (opsis)
Le plus important de ces éléments est l’agencement des faits en système.
En effet la tragédie est
représentation non d’hommes mais d’action, de....
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