Platon: Peut-on donner une éducation esthétique ?
Extrait du document
Celui qu'on aura guidé jusqu'ici sur le chemin de l'amour, après avoir contemplé les belles choses dans une gradation régulière, arrivant au terme suprême, verra soudain une beauté d'une nature merveilleuse, celle-là même, Socrate, qui était le but de tous ses travaux antérieurs, beauté éternelle qui ne connaît ni la naissance ni la mort, qui ne souffre ni accroissement ni diminution, beauté qui n'est point belle par un côté, laide par un autre, belle en un temps, laide en un autre, belle sous un rapport, laide sous un autre, belle en tel lieu, laide en tel autre, belle pour ceux-ci, laide pour ceux-là ; beauté qui ne se présentera pas à ses yeux comme un visage, ni comme des mains, ni comme une forme corporelle, ni comme un raisonnement, ni comme une science, ni comme une chose qui existe en autrui, par exemple dans un animal, dans la terre, dans le ciel ou dans telle autre chose ; beauté qui, au contraire, existe en elle-même et par elle-même, simple et éternelle, de laquelle participent toutes les autres belles choses, de telle manière que leur naissance ou leur mort ne lui apporte ni augmentation, ni amoindrissement, ni altération d'aucune sorte. Quand on s'est élevé des choses sensibles par un amour bien entendu des jeunes gens jusqu'à cette beauté et qu'on commence à l'apercevoir, on est bien près de toucher au but ; car la vraie voie de l'amour, qu'on s'y engage de soi-même ou qu'on s'y laisse conduire, c'est de partir des beautés sensibles et de monter sans cesse vers cette beauté surnaturelle en passant comme par échelons d'un beau corps à deux, de deux à tous, puis des beaux corps aux belles actions, puis des belles actions aux belles sciences, pour aboutir des sciences à cette science qui n'est autre chose que la science de la beauté absolue et pour connaître enfin le beau tel qu'il est en soi.
Si la vie vaut jamais la peine d'être vécue, cher Socrate, dit l'étrangère de Mantinée [Diotime], c'est à ce moment où l'homme contemple la beauté en soi.
Liens utiles
- Psychologie et éducation (Platon, Rousseau, Kant)
- « Il faut éviter de donner accès dans notre âme à l'idée que dans les raisonnements il y a une chance qu'il n'y ait rien de sain ; préférons cette autre idée : que c'est nous qui ne nous comportons pas encore sainement. » Platon, Phédon, ivcs. av. j.-C.
- Rabelais fait donner par Gargantua à Pantagruel une éducation encyclopédique : « J'y veux un abîme de science », tandis que Montaigne préfère « une tête bien faite à une tête bien pleine » Vous apprécierez brièvement ces deux systèmes opposés et vous dir
- « Ce que je sais, c’est que je ne sais rien » PLATON
- « Apprendre, c’est se ressouvenir de ce que l’on a oublié » PLATON