Platon
Extrait du document
«
Un homme est juste de la même manière que l'État est juste.
– C'est une conclusion qui est aussi de toute nécessité.
– Mais nous n'avons pas oublié que l'État est juste par le fait que chacun des
trois ordres qui le composent remplit sa fonction.
(...) Après cela, il nous
reste, je crois, à examiner l'injustice.
– Évidemment.
– N'est-elle pas nécessairement un désaccord de ces trois parties, une
ingérence indiscrète, un empiétement des unes sur les fonctions des autres,
et la révolte de certaine partie contre le tout, avec la prétention de
commander dans l'âme, en dépit de toute convenance, la nature l'ayant
faite pour obéir à la partie née pour commander ? C'est en cela, je crois,
c'est dans le désordre et la confusion de ces parties que consistent à nos
yeux l'injustice, l'intempérance, la lâcheté, l'ignorance, en un mot tous les
vices.
– Tout cela en effet, c'est la même chose, dit-il.
– Dès lors, repris-je, la
nature des actions justes et de la justice, celle des actions injustes d'autre
part n'apparaît-elle pas dans une clarté parfaite, s'il est vrai que nous connaissons la nature de
l'injustice et de la justice ? – Comment cela ? – C'est que, repris-je, elles sont exactement semblables
aux choses saines et aux choses malsaines et qu'elles sont dans l'âme ce que celles-ci sont dans le
corps.
– Comment ? demanda-t-il.
– Les choses saines engendrent la santé, les malsaines, la maladie.
– Oui.
– De même les actions justes engendrent la justice, les actions injustes, l'injustice.
– C'est forcé.
– Engendrer la santé, c'est établir entre les éléments du corps une hiérarchie qui les
subordonne les uns aux autres conformément à la nature ; au contraire engendrer la maladie, c'est
établir une hiérarchie qui les subordonne les uns aux autres contrairement à l'ordre naturel.
– En effet.
– De même, repris-je, engendrer la justice, c'est établir entre les parties de l'âme une hiérarchie qui
les subordonne les unes aux autres conformément à la nature ; au contraire engendrer l'injustice,
c'est établir une hiérarchie qui les subordonne les unes aux autres contrairement à l'ordre naturel.
–
C'est exactement cela, dit-il.
– La vertu est donc, en quelque sorte, semble-t-il, la santé, la beauté, le bon état de l'âme, et le vice
en est la maladie, la laideur et la faiblesse.
En quête de l'essence de la justice, Platon, dans La République, l'a d'abord définie à l'échelle de la Cité, où elle
se laisse déchiffrer en quelque sorte en plus gros caractères.
Dans ce texte, Platon opère une transposition à
l'échelle de l'individu.
POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE
Platon établit entre la justice dans la Cité et la justice dans l'individu un parallélisme strict.
La Cité comporte
trois classes : les philosophes, les gardiens, les artisans.
La première doit commander, la seconde et la
troisième doivent obéir.
La justice consiste en ce que chaque classe remplit la fonction qui lui est propre.
De
même l'âme se compose de trois parties : une partie qui est le siège de la raison, une partie qui est le siège du
courage et de la volonté, une partie qui est le siège des appétits et du désir.
C'est la partie la plus noble de
l'âme, la raison, qui doit commander aux deux autres.
Être juste, ce sera ne pas céder aux réclamations du
désir, ni aux ardeurs du courage sans en avoir jugé.
La justice est donc la vertu par excellence, puisqu'elle est
la réunion de trois autres vertus : la sagesse, le courage et la tempérance.
Mais si la justice de l'individu est construite sur le modèle de la justice dans la Cité, c'est en réalité la justice
dans l'individu qui garantit la justice dans la Cité.
Seul l'homme sage, autrement dit le philosophe, est capable
de véritable justice et c'est à lui, par conséquent, qu'il revient de gouverner..
»
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